Coup d’État au Niger : les militaires au pouvoir accusent la France de préparer une « agression »

Le colonel major membre de la junte putschiste Amadou Abdramane a accusé samedi la France de « déployer ses forces » dans plusieurs pays ouest-africains en vue d’une « agression » contre le Niger.
TV Sahel / AFP

NIGER - La junte militaire au Niger surveille de très près les activités militaires françaises en Afrique. Le régime militaire issu d’un coup d’État a accusé samedi 9 septembre la France de « déployer ses forces » dans plusieurs pays ouest-africains en vue d’une « agression » contre le Niger.

« La France continue de déployer ses forces dans plusieurs pays de la Cedeao (Communauté économique des État d’Afrique de l’Ouest, NDLR) dans le cadre de préparatifs d’une agression contre le Niger, qu’elle envisage en collaboration avec cette organisation communautaire », a ainsi déclaré un membre du régime, le colonel-major Amadou Abdramane, dans un communiqué lu à la télévision nationale.

Interrogé sur le sujet lors d’une conférence de presse à l’issue du sommet du G20 à New Delhi ce dimanche, Emmanuel Macron a déclaré  : « Nous ne reconnaissons aucune légitimité aux propos des militaires qui retiennent en otage le président élu Mohammed Bazoum ». Il a ensuite appelé au retour de l’ordre constitutionnel dans le pays et ajouté que « Les forces françaises sont là pour lutter contre le terrorisme, à la demande du Niger et de ses dirigeants élus. Si nous redéployons quoi que ce soit, je ne le ferai qu’à la demande du président Bazoum et en coordination avec lui ».

« Une intervention militaire contre notre pays »

Selon le communiqué, le régime a constaté depuis le 1er septembre que « deux aéronefs de transport militaire type A400M et un Dornier 328 ont été déployés en renfort en Côte d’Ivoire », et que « deux hélicoptères multirôles type Super Puma » et « une quarantaine de véhicules blindés » l’ont été « à Kandi et Malanville au Bénin ».

« Le 7 septembre 2023, un navire militaire français a accosté à Cotonou (Bénin, ndlr) avec à son bord, du personnel et des moyens militaires », selon le communiqué. Les généraux au pouvoir font également état d’« une centaine de rotations d’avions militaires cargo ayant permis de débarquer d’importantes quantités de matériel et d’équipement de guerre au Sénégal, en Côte d’Ivoire et au Bénin, pour ne citer que ceux-là ».

« Ces manœuvres » ont pour but de « réussir une intervention militaire contre notre pays », selon eux.

Après le coup d’État du 26 juillet, la Cedeao a brandi la menace d’une intervention militaire au Niger, dont elle avait annoncé la préparation, pour rétablir l’ordre constitutionnel, libérer le président renversé Mohamed Bazoum et le restaurer dans ses fonctions. Une décision soutenue par la France, qui compte environ 1 500 soldats dans ce pays sahélien, dans le cadre de la lutte antijihadiste.

Retrait d’une partie des forces françaises

Le 3 août, les généraux nigériens au pouvoir, qui souhaitent le départ des soldats français, avaient dénoncé plusieurs accords de coopération militaire conclus avec l’ex-puissance coloniale.

L’un de ces textes contenait un préavis d’un mois, selon eux. Le régime a affirmé dans le communiqué que ces forces étaient désormais présentes « illégalement » au Niger.

« Le 1er septembre », le « chef d’état-major des armées du Niger a reçu à Zinder le commandant des forces françaises au Sahel pour discuter d’un plan de désengagement des capacités militaires françaises », a-t-il indiqué. Le régime dit avoir été informé d’« une annonce de retrait (...) qui nous vient d’un niveau opérationnel et n’est donc portée ni par l’état-major des armées françaises, ni par le gouvernement français et n’a fait l’objet d’aucun communiqué officiel ».

Ce mardi, Paris affirmait que des « échanges » étaient en cours entre armées nigérienne et française pour « faciliter les mouvements de moyens militaires français », confirmant des propos tenus la veille par le Premier ministre du Niger nommé par le régime, Ali Mahaman Lamine Zeine. « La question du maintien de certaines de nos forces se pose », avait déclaré le ministère français des armées.

Bras de fer autour de l’ambassadeur français

Chaque jour depuis plus d’une semaine, des milliers de personnes au total se sont rassemblées dans la capitale nigérienne Niamey, aux abords d’une base militaire abritant des soldats français pour réclamer leur départ.

De leur côté, les États-Unis, qui disposent de quelque 1 100 soldats au Niger, ont commencé « par précaution » à repositionner leurs troupes de la base 101 de Niamey à la base 201 d’Agadez, dans le centre du pays, a déclaré le département de la Défense jeudi.

La France est engagée dans un bras de fer avec le Niger, qui a par ailleurs retiré l’immunité et le visa diplomatiques de l’ambassadeur français Sylvain Itté et exigé son « expulsion ». Paris, qui ne reconnaît pas le régime militaire, a justifié plusieurs fois le maintien de Sylvain Itté.

« La France refuse de rappeler son ambassadeur déclaré persona non grata par les autorités et la justice nigérienne », a souligné une nouvelle fois le communiqué du régime. Lamine Zeine avait toutefois déclaré que son gouvernement espérait « si possible maintenir une coopération avec un pays avec qui on a partagé énormément de choses ».

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