Afrique du Sud-Irlande: "Nous avons besoin de vaincre cette incroyable histoire", confie Bryan Habana

Afrique du Sud-Irlande: "Nous avons besoin de vaincre cette incroyable histoire", confie Bryan Habana

Bryan, que représente ce retour en France de la Coupe du monde, après votre sacre de 2007 ici-même ?

2007 a vraiment été le début de mon idylle avec la France. Personnellement, la Coupe du monde s’est parfaitement déroulée, ça a été un des plus grands moments de ma carrière. Puis en 2008, j’ai eu des contacts avec Bayonne, et enfin mes premières discussions avec Mourad (Boudjellal) en 2009 puis mon arrivée en 2013. Mais tout ceci a commencé avec ce qu’il s’est passé en 2007. C’était vraiment spécial. Quelques années plus tard, seize précisément, vous revenez là et l’Afrique du Sud est en plus basée à Toulon, utilise le centre d’entraînement du club… j’ai laissé une partie du mon cœur en France et je me suis construit en 2007, une période où j’ai marqué des essais, où j’ai été nommé joueur de l’année. Mais le plus important c’est un groupe de mecs avec qui on a un truc spécial aujourd’hui, quelque chose "d’extra". Gagner la Coupe du monde pour la première fois à l’extérieur de l’Afrique du Sud, c’est un souvenir unique qui restera gravé pour le reste de ma vie.

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Cette Coupe du monde est très relevée. Il y a plusieurs favoris sur le papier, dont l’Afrique du Sud, l’Irlande et la France. Quel est le vôtre ?

J’étais au Japon en 2019 et ce que j’ai vu, selon moi, c’est la meilleure expérience de l’histoire des Boks en Coupe du monde. En 1995, c’était inspirant pour moi. En 2007, c’était honnêtement le plus grand moment de ma carrière, de faire partie d’une équipe qui gagne la Coupe du monde. Mais ce qu’on a vu en 2019, où Siya Kolisi a été le premier capitaine noir sud-africain à lever la coupe, Makazole Mapimpi le premier à marquer un essai en finale, Cheslin Kolbe, qui a marqué de l’autre côté, une gestion cette équipe qui représentait entièrement l’Afrique du Sud, a été incroyablement spécial. Et 2023 est certainement la Coupe du monde la plus relevée de l’histoire. Trois des cinq meilleures équipes les mieux classées au monde n’iront pas en demi-finale (entre l’Irlande, l’Afrique du Sud, La France, la Nouvelle-Zélande et l’Ecosse, ndlr). Et même dans le top 4, quand vous prenez l’Irlande, la France, l’Afrique du Sud et la Nouvelle-Zélande, deux seulement iront en demi-finale. Ça sera très dur et le niveau va commencer à monter à partir des quarts. Il y aura une grosse pression pour y arriver, mais je pense que l’opportunité pour les Springboks de Jacques Nienaber et Siya Kolisi de devenir la première équipe des Boks à garder son titre est vraiment quelque chose que je vais chérir très fortement.

Le résultat de ce samedi face à l’Irlande va déterminer l’affiche des quarts de finale et un éventuel France-Afrique du Sud. Suivez-vous les matchs des Français ?

Oui ! Vous ne pouvez pas ne pas les suivre actuellement. Je pense que ce qui s’est passé avec Fabien Galthié sur ces quatre dernières années a été incroyable. Tout a commencé en quittant le Japon en 2019 où ils avaient déjà obtenu le respect. Quand vous avez Charles Ollivon, Antoine Dupont, Grégory Alldritt, vous avez l’identité française. Ce qu’ils ont fait l’an dernier, gagner 12 matchs de suite (14 en fait, ndlr) était vraiment phénoménal. Et j’ajouterai également que lorsque vous avez l’opportunité d’accueillir une Coupe du monde dans votre propre pays et que vous jouez à ce niveau, c’est comme si c’était plus facile. Oui c’est de la pression, mais cela vous donne un surplus de motivation. Malheureusement, en 2007, la France a perdu le match d’ouverture contre l’Argentine, puis en demi-finale contre l’Angleterre, mais ils ont aussi cette victoire incroyable contre la Nouvelle-Zélande en quart de finale. Donc, j’ai toujours pensé que les Français étaient favoris. Mais en tenant compte que je suis Sud-Africain et la manière dont mes compatriotes jouent en ce moment, j’espère vraiment que tout ira pour les Springboks. En dépit de tout ça, qu’ils puissent aller en finale.

"J’étais à l’Ellis Park le 24 juin 1995, témoin de l’histoire qui s’est écrit"

L’Afrique du Sud, c’est une identité, une culture d’avants forts sur le terrain. Pourtant, il y a quelques joueurs qui doivent vous plaire sur le terrain, comme Kolbe, Arendse… il y a-t-il un lien à travers les générations ?

Je ne pense pas qu’il y ait un lien entre les générations. Vous ne pouvez pas me comparer avec Makazole (Mapimpi), avec Cheslin (Kolbe) ou Arendse. Ni avec Chester Williams ou Breyton Paulse. Il y a potentiellement le lien d’être un joueur de couleur, mais je pense que ce beaucoup d’équipe n’ont pas et ce que l’Afrique du Sud a, c’est cette incroyable histoire dont nous avons besoin de vaincre. Et une chose que le rugby a donné particulièrement à notre pays à travers ces victoires, et ce que aucun autre sport n’a pu donner, c’est de donner de l’espoir à pleins de joueurs mais aussi à des jeunes partout dans le monde. En 1995, j’étais un garçon de 12 ans et je ne connaissais rien au rugby. J’étais à l’Ellis Park le 24 juin 1995 (le jour du premier titre de champion du monde de l’Afrique du Sud, ndlr), témoin de l’histoire qui s’est écrit, et ça m’a donné beaucoup d’inspiration.

C’est le pouvoir du maillot sud-africain ?

Oui. Ce que le maillot des Springboks a en lui, c’est cette capacité d’amener les gens à s’unir. C’est pourquoi pour moi, je le répète, 2019 a tout simplement été la plus grande victoire en Coupe du monde que nous avons eu. Parce que ça a vraiment montré qu’à travers un dur travail, un sacrifice, à travers nos croyances d’amener tout le monde ensemble et en dépit des circonstances, du contexte, si vous travaillez pour aller vers un but ensemble, quelque chose de grand peut être réalisé. En 1995, on a vu l’équipe Springbok la plus changée. Mais ce qu’on fait des gars comme Siya, comme Mapimpi et Kolbe, pour l’Afrique du Sud, pour environ 60% de la population qui ne voyait probablement pas le rugby comme une opportunité, de leur donner cet espoir est un grand pas. Je regarde ce qu’il va se passer dans cette Coupe du monde 2023. Nous avons des joueurs de classe mondiale donc j’espère que le maillot des Springboks aura une nouvelle ligne de champion du monde sur les épaules. Ça va être un moment particulier.

Article original publié sur RMC Sport