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"Je me souviens m'être dit 'ils veulent nous tuer'": un gendarme présent à Sainte-Soline témoigne

"Sur le moment, on s’est dit qu’ils venaient là pour faire la guerre." Boucliers avec des clous, barres de fer, cocktails molotov, mortiers, pavés, "en quantité quasiment illimitée", le lieutenant Martin était en première ligne, avec son escadron mobile composé d'une vingtaine d'hommes, samedi dernier à Sainte-Soline, dans les Deux-Sèvres pour sécuriser le site de construction des méga-bassines.

Ce jour-là, l'escadron mobile d'Aurillac qu'il commande a été briefé sur sa mission alors que des personnes se sont rassemblées malgré l'interdiction de la préfecture. "On nous donne notre position. Notre mission c'est d'interdire, on ne s'attend pas à un tel déferlement de violence", commente sur BFMTV le lieutenant de gendarmerie.

"Ça a été un vrai déluge de feu et de pierre pendant presque une heure", confie-t-il.

"Très bien équipés"

Pendant plusieurs heures, manifestants et forces de sécurité se font face. Les gendarmes sont déployés pour empêcher l'accès à la zone où doit être construite la méga-bassine qui fait "11 terrains de football". Les manifestants étaient alors présents de manière pacifique. "Ce sont eux qui sont venus au contact, détaille le lieutenant Martin. Une bonne partie nous a encerclés, un gros black bloc s’est détaché."

"Ça a commencé à avancer. Nous avons fait des tirs d’interdiction pour dire aux manifestants de ne pas avancer", poursuit-il.

Puis un "groupe de manifestants très virulents a progressé petit à petit". "Les tirs de lacrymogènes pour essayer de les ralentir n’ont pas été efficaces parce qu’ils sont très bien équipés. Le vent étant contre nous, ça a créé un masque entre eux et nous. Ils ont donc pu progresser et arriver jusqu’aux véhicules". Au total, quatre véhicules de la gendarmerie ont été incendiés.

"On essaie de reprendre du terrain, mais on ne voit rien. Ça crame de partout, il y a des cocktails molotov qui tombent tout le temps", détaille-t-il encore.

Les affrontements vont durer une heure, "en ressenti on a eu l'impression que ça a duré 3-4 heures". Preuve de la violence, la première charge ordonnée par le lieutenant Martin ne fonctionne pas.

"On se prend trop de mortiers, de pavés, de cocktails. On recule à nouveau, ça prend feu de partout", explique le gendarme.

L’usage de la force "proportionné"

L'épaulière du gendarme a fondu, sa cartouche de masque à gaz est éventrée en deux, son casque couvert d'impacts, sa visière à moitié brûlée. "C’était continu, ça ne s’arrêtait jamais, on se demandait combien ils avaient de munitions, insiste le lieutenant Martin. On cramait en permanence." De mémoire, "les plus anciens gendarmes de l'escadron n'ont jamais connu un niveau de violences pareil".

"Je me souviens de m’être dit quand on était en face d’eux 'ils veulent nous tuer'", confie-t-il.

La présence de 3000 gendarmes pour sécuriser un site pas encore construit aurait-elle attisé cette violence, comme le disent les critiques? La riposte des forces de l'ordre a-t-elle été disproportionnée? "Quand on vient avec des frondes, des boucliers avec des clous, des barres de fer... L’usage de la force était proportionné", tranche le lieutenant Martin.

"Il y a eu des tirs d'interdiction et un usage crescendo. Quand on vient avec armes, on vient pour blesser, voire pire", conclut-il.

Ces affrontements à Sainte-Soline sont également marqués par une autre polémique sur un possible empêchement par les gendarmes de l'intervention des secours auprès des blessés. "Après l'affrontement, j’ai vu le médecin militaire aller vers les manifestants et se faire caillasser alors qu’il allait essayer de leur porter secours", balaie le lieutenant Martin avant de conclure: "Je me suis engagé pour servir et protéger la population".

Article original publié sur BFMTV.com