Aux sources de Boko Haram

Tandis que les Nigérians déjà débarqués à Baga Sola sont emmenés en direction du camp de Dar-es-Salam, d’autres attendent leur ration de nourriture. Les gendarmes, eux, confisquent les machettes ou autres objets qui pourraient servir d’armes.

Passé d’une lutte contre les injustices sociales à un jihad qui s’en prend d’abord aux civils, la secte nigériane sème le chaos dans la région du lac Tchad.

«Au début, Abubakar Shekau [leader de Boko Haram, ndlr] était un bon samaritain, souffle Abba Aji Kalli, un habitant de Maiduguri, la capitale de l’Etat de Borno. Même moi, j’ai eu envie d’adhérer à Boko Haram.» A l’autre bout de la ligne téléphonique, la voix d’Abba Aji Kalli, père de 14 enfants, polygame et musulman pratiquant, est peu audible. Il chuchote. Aujourd’hui, il risque sa vie pour défendre sa ville et sa famille contre les terroristes. Depuis 2012, il est l’un des chefs de la Civilian Joint Task Force, les milices civiles formées par l’Etat de Borno pour combattre Boko Haram aux côtés d’une armée nationale sous-payée, inefficace et apeurée par la barbarie du groupe.

«Grand orateur». Kidnappings, attentats, tueries représentent le quotidien des habitants du nord-est du Nigeria. Boko Haram a poussé l’horreur à utiliser, une fois encore, une fillette de 7 ans comme kamikaze, sur le marché de Potiskum, faisant au moins 5 morts et une vingtaine de blessés dimanche. Toujours à Potiskum, 17 personnes ont été tuées mardi lors d’une attaque à la bombe, alors qu’une autre explosion retentissait dans la grande ville de Kano.

«Mohamed Yusuf [le fondateur de la secte, ndlr] était un grand orateur, poursuit Abba Aji Kalli. Aux débuts des années 2000, il faisait des prêches dans la ville en répétant "Boko is haram ! Boko is haram !" [l’Occident est pêché !]. Il se battait contre l’injustice sociale, il voulait une société basée sur l’islam strict, mais ne parlait pas de jihad.»

Dans l’Etat de Borno, on pratique la charia depuis 1999, les enfants vont à l’école coranique tous les après-midi, les femmes portent toutes le hijab et doivent utiliser des transports en commun différents de ceux des hommes. «Mais quand il n’y a plus de place, on peut monter avec eux, raconte la dernière épouse d’Abba Aji Kalli. (...)

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«On restera tant qu’on ne sera pas attaqués»
Combattre les terroristes, un casse-tête régional
Un reportage photo précieux
Repères. Boko Haram
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