Sur le SNU, cette piste (éruptive) évoquée par El Haïry inquiète déjà les syndicats et la gauche

Le 8 mai 2022, Emmanuel Macron salue des membres du SNU lors de la cérémonie sous l’Arc de Triomphe.
Le 8 mai 2022, Emmanuel Macron salue des membres du SNU lors de la cérémonie sous l’Arc de Triomphe.

POLITIQUE - Service national universel… et obligatoire pour les mineurs ? C’est bel et bien une des pistes à l’étude sur ce dossier initié sur la base du volontariat en 2019. Rien n’est tranché pour l’instant mais l’idée provoque déjà un tollé. « Embrigadement des lycéens » et « mascarade » dénonce ainsi le député LFI Bastien Lachaud dans l’hémicycle ce mardi 28 février, en interpellant la secrétaire d’État à la Jeunesse et du SNU Sarah El Haïry.

La veille, un document du ministère de l’Éducation nationale révélé par le site Politis a donné un aperçu des discussions en cours sur le futur du Service national universel. Y est évoqué un « séjour obligatoire de cohésion de 12 jours » sur des plages horaires de 6h30 à 22h30, hors du département de résidence, avec port de l’uniforme obligatoire, Marseillaise, levée de drapeau, ainsi que divers modules imposés dont certains sur la défense et la sécurité intérieure.

Surtout, le SNU deviendrait obligatoire pour tous les élèves de seconde et de première CAP. Selon Politis et le SNES-FSU, une première expérimentation devrait être menée dans six départements : le Cher, les Hautes Alpes, les Vosges, le Finistère, la Dordogne et le Var. À partir de quand ? Le flou reste entier. Mais contactée par nos confrères, Sarah El Haïry reconnaît qu’il s’agit effectivement d’une piste à l’étude, et qu’elle a sa préférence. Et précise : « Si le SNU devenait obligatoire, il pourrait alors s’inscrire sur le temps scolaire ».

Obligation et heures de cours en moins ?

Indignation dans l’opposition de gauche. « La République ne s’enseigne pas à coups de pompes et de casquettes ridicules », a tonné le député écologiste Benjamin Lucas à l’Assemblée ce mardi, tandis que la veille, les Jeunes écolos se disaient « prêts à se mobiliser devant les lycées, partout en France, contre la généralisation du Service national universel. »

La France Insoumise est sur la même ligne et dénonce dans un communiqué « un dispositif coûteux, qui ne remplit aucun objectif légitime en termes de défense, d’éducation, d’insertion, de cohésion sociale, de résilience ou de solidarité ». « C’est grave, sûrement contraire à la Constitution ou à la Convention des Nations unies pour les droits de l’enfant », ajoute Bastien Lachaud depuis le Palais Bourbon. « C’est donc ça votre ambition pour la jeunesse ? » interroge aussi sur Twitter la socialiste Fatiha Keloua Hachi, en dénonçant entre autres le « coût exorbitant » du projet.

Plusieurs syndicats ont aussi fait part de leurs inquiétudes. Dans un communiqué mis en ligne dès le 26 février, le SNES-FSU, premier syndicat des enseignants du 2nd degré, pointait notamment la perte de deux semaines de cours ainsi les difficultés à organiser un séjour imposé.

« Il ne serait pas acceptable qu’une telle chose voie le jour ! Que ce gouvernement envisage de consacrer plusieurs milliards annuels au SNU est révélateur des priorités politiques qui l’animent. (...) Pour le SNES-FSU, le SNU constitue une attaque en règle contre les principes même d’un système éducatif qui fait de l’émancipation par les savoirs, le cœur de son organisation. Les jeunes ont besoin d’école, pas d’un dispositif de domestication qui dévoie les symboles de l’armée au profit d’un projet politique qui vise une fois de plus à affaiblir l’Éducation nationale », écrit le syndicat.

Des annonces avant la fin de l’année scolaire ?

Face aux critiques dans l’hémicycle ce mardi, Sarah El Haïry a assuré que les consultations se poursuivaient sur tous les volets. « Oui ou non sur le temps scolaire ? Oui ou non sur la complémentarité éducative ? Oui ou non sur la généralisation ou l’extension ? », a-t-elle énuméré. « À aucun moment le service national universel n’est la caricature que vous en faites », a-t-elle aussi lancé à Bastien Lachaud.

Il faudra cependant attendre encore un peu pour connaître les arbitrages de l’Élysée. Lors de sa visite aux armées sur le Charles-de-Gaulle en décembre 2022, Emmanuel Macron avait évoqué des annonces « au début de l’année prochaine ». Mais depuis, silence radio. À peine se risque-t-on désormais à évoquer la fin de l’année scolaire, sans vouloir s’engager... Une frilosité née de la volonté de ne pas ouvrir un deuxième front, en pleine mobilisation contre les retraites ? Les mouvements de protestation, déjà forts en janvier et février, reprennent le 7 mars prochain et l’opposition, en particulier à gauche, mise sur la jeunesse pour faire plier le gouvernement, comme à l’époque du CPE. Un risque que le gouvernement préférerait éviter.
À voir également sur Le HuffPost :

L’écologie recule, la jeunesse avec l’armée: ces détails (importants) du remaniement

Macron détaille sa vision de la défense pour les prochaines années