"Le silence est l'ennemi de la justice" : Dupond-Moretti défend son projet de "statut de repenti"
Invité sur le plateau de BFM Politique, le ministre de la Justice a détaillé les raisons qui l'ont amené à vouloir créer un statut de repenti pour les trafiquants de drogues collaborant avec la justice.
Éric Dupond-Moretti l'admet bien volontiers, il est "allé voir ce qu'ont fait les Italiens". Afin de lutter contre la criminalité organisée et les réseaux de trafic de stupéfiants, le ministre de la Justice a annoncé dans une interview à La Tribune Dimanche la création d'un "véritable statut de repenti". Une mesure qu'il a défendue ce dimanche 28 avril sur le plateau de BFM Politique, estimant que "'le silence est l'ennemi de la justice".
Pour le garde des Sceaux, la loi actuelle sur les repentis, qui date de 2004, "ne marche pas du tout".
"Le décret d'application a été pris en 2014, dix ans plus tard", a-t-il souligné. "On a tergiversé et c'est une litote." Il en veut pour preuve le fait qu'elle n'a été utilisée qu'à une vingtaine de reprises.
"En Italie, on a 1.000 affaires qui ont été réglées grâce au statut des repentis", a fait valoir Éric Dupond-Moretti, prenant comme exemple le célèbre "maxi-procès" de Palerme qui s'est tenu dans les années 1980 et qui a abouti à plus de 300 condamnations. Un résultat qui n'aurait pu être obtenu sans le témoignage d'un ancien mafieux, Tommaso Buscetta. "Si on n'a pas Buscetta, on n'a pas de maxi-procès", a résumé le ministre.
"Ce qui nous manque, c'est des témoins"
Les "grands bandits" connaissant "parfaitement les techniques policières", "ce qui nous manque, c'est des témoins", a encore souligné Éric Dupond-Moretti. "Les témoins, soit ils ne viennent pas vers la justice parce qu'ils sont complices d'une certaine façon, soit ils ont la trouille chevillée au corps."
En échange de la collaboration de ces repentis, le ministre affirme qu'ils seront protégés, notamment via un changement d'état civil, et qu'ils bénéficieront d'une "peine réduite".
Quant au financement de ce nouveau statut, le garde des Sceaux assure qu'il "ne coûtera pas un centime aux contribuables".
"L'année dernière, l'Agrasc (Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués) a saisi 1,4 milliard d'euros d'argent criminel, a indiqué Éric Dupond-Moretti. C'est ça qui va permettre de payer le statut des repentis."
Le ministre de la Justice est aussi revenu sur BFMTV sur une autre mesure phare dévoilée ce week-end pour lutter contre la criminalité organisée, la création d'un parquet national dédié.
Selon lui, "il ne s'agit pas de renier ce qui a été fait" avec la naissance de ce PNACO, mais de "centraliser", "d'être plus efficace" et de "coordonner davantage", notamment en ayant à l'international "un seul interlocuteur".