"On s'estime en danger": une prof d'un collège des Yvelines diffamée après avoir montré une œuvre représentant cinq femmes nues

Des rumeurs de provocations et de racisme de la part d'une enseignante en classe de 6e, toutes fausses, se sont rapidement propagées dans cet établissement. Les professeurs, qui dénoncent un climat délétère depuis la rentrée, ont déposé un préavis de grève pour cette journée de lundi.

Une histoire qui rappelle tragiquement celle de Samuel Paty. Jeudi passé, dans le cadre d'un cours de sensibilisation à l'art, une professeure de français du collège Jacques-Cartier d'Issou, dans le département des Yvelines, a présenté à une classe de 6e le tableau Diane et Actéon du peintre Giuseppe Cesari, qui date de la première partie du XVIIe siècle.

La toile revient sur une scène de la mythologie, tirée des Métamorphoses d'Ovide, et représente Actéon surprenant la déesse Diane au bain avec ses nymphes. L'œuvre fait écho à des textes étudiés au programme.

Très vite, plusieurs élèves ont détourné le regard, offusqués. Ils ont expliqué que les cinq femmes nues représentées sur cette toile étaient contraires à leurs convictions religieuses.

"Nous avons affaire à quelques parents vindicatifs"

À la sortie du cours, des rumeurs se sont rapidement diffusées dans l'établissement. Selon des élèves de confession musulmane, l'enseignante les aurait volontairement mis mal à l'aise en les interrogeant sur la toile en question, et aurait, toujours selon eux, tenu des propos racistes.

Plus tard dans la journée, lors d'une heure de vie de classe, les discussions ont révélé que les propos prêtés à la professeur relèvent en réalité de la pure diffamation, précise le site Actu. Un parent d'élève a envoyé un mail au principal, l'accusant d'avoir empêché son fils de s'exprimer lors de cette heure de vie de classe. Depuis, les élèves ont présenté leurs excuses à l'enseignante.

"Elle n’a jamais dit ça, mais le mal est fait. Nous avons affaire à quelques parents vindicatifs, qui préfèrent croire la parole de leurs enfants plutôt que la nôtre. Notre collègue a besoin d’être protégé. Il faut la protéger!, dit une enseignante auprès du même média.

"Un vrai cri s'alerte, un SOS"

Depuis, cette professeure, mais également l'ensemble de l'équipe pédagogique, vivent dans l'angoisse. "On a très peur pour notre collègue, ça nous a rappelé Samuel Paty", signale un autre professeur, toujours auprès d'Actu.

"On sait très bien que ce genre de méthodes peuvent conduire à un drame, on l’a vu dans le cadre de l’assassinat de Samuel Paty. Nos collègues se sentent menacés, en danger, les professeurs font leur métier, ils doivent être respectés pour ça", précise pour sa part, auprès de BFMTV, Sophie Vénétitay, secrétaire générale du syndicat SNES-FSU.

Depuis la rentrée scolaire de septembre dernier, au moins quatorze faits dits "d’établissement", comprendre des atteintes à laïcité, aux personnes, à la sécurité ou aux biens, ou encore des faits de racisme, ont été enregistrés dans l'établissement, contre seulement trois sur toute l'année scolaire dernière.

Début décembre, dans un courrier adressé au directeur académique adjoint des services de l’Éducation nationale, la direction de l'établissement fait part des dénonciations calomnieuses dont sont victimes certaines professeurs de la part d'élèves et de parents d'élèves. De manière générale, ce courrier fait état du mal-être de l'équipe enseignante et d'une partie des élèves, qui se sentent abandonnés.

"On s’estime en danger, clairement, on n’a pas de retours de l’institution, on est soutenus par notre hiérarchie directe mais pas au-dessus, c’est un vrai cri d’alerte, un SOS", martèle, à BFMTV, une enseignante.

Vendredi, le corps enseignant a fait valoir son droit de retrait et a déposé un préavis de grève pour la journée de lundi. Afin d'améliorer la situation ceux-ci réclament la réattribution d'un demi-poste de CPE manquant ainsi que la création d'un poste supplémentaire d'AED. Des renforts académiques devraient être envoyés au collège Jacques-Cartier avant de trouver une solution à plus long terme.

Article original publié sur BFMTV.com

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