Le secours en milieu périlleux, une spécialité qui fait rayonner la Lozère depuis 40 ans

Des pompiers évacuent un volontaire avec une civière lors d'une formation au GRIMP à Florac en Lozère, le 13 juin 2024 (Pascal GUYOT)
Des pompiers évacuent un volontaire avec une civière lors d'une formation au GRIMP à Florac en Lozère, le 13 juin 2024 (Pascal GUYOT)

Deux coups de sifflets et la civière progresse le long de l'abrupte falaise, hissée au bout de cordages manœuvrés par des pompiers venus se perfectionner aux techniques du secours en milieu périlleux à Florac, petite ville de Lozère à la réputation internationale chez les secouristes.

Après avoir remonté la moitié de la forte pente, la civière se trouve bloquée par les branches d'un un jeune chêne, avec à son bord un volontaire jouant le rôle d'un homme blessé lors d'un accident de canyoning sur la petite rivière qui coule au fond de la gorge, à une vingtaine de mètres en aval.

"On n'est pas dans une jardinerie, là ! Le chef d'équipe, il faut qu'il lise le relief", peste le capitaine Guy Pourchot, 46 ans, dont 29 chez les pompiers et 11 à la tête du Centre national de formation secours en milieu périlleux et montagne (SMPM), héritier du Groupe de reconnaissance et intervention en milieu périlleux (GRIMP).

Malgré cette erreur d'appréciation, l'intransigeant capitaine n'intervient pas et laisse les apprentis tracter tant bien que mal la civière jusqu'au chemin surplombant la vallée. "Je ne veux que l'excellence", pour le bien-être des personnes secourues, plaide-t-il auprès de l'AFP.

"Il faut qu'ils se rendent compte par eux-même qu'ils auraient dû procéder différemment, placer la tyrolienne un peu à l'écart", explique Guy Pourchot en scrutant aux jumelles les détails du dispositif en place, afin de vérifier sa conformité avec les règles élaborées par ce centre, unique en France, qui fêtera en octobre son 40e anniversaire.

Les quatre hommes et la jeune femme, suant depuis le début de la matinée sous le soleil, font partie de la quinzaine de pompiers-secouristes arrivés début juin à Florac pour se former pendant 10 jours au commandement.

S'ils valident leur brevet, ils pourront diriger des équipes intervenant dans un environnement naturel difficile, comme les gorges de rivière, mais aussi en milieu urbain, au sommet d'une grue ou dans une galerie de mine par exemple.

Chaque année, ils sont plus de 300 stagiaires, originaires de France ou de l'étranger, à rejoindre cette "école des chefs" installée à la sortie de cette petite ville touristique du massif des Cévennes, nichée au creux d'une vallée à près de deux heures de route de Nîmes.

- Souvenirs de Chine -

Alors que la première équipe remballe son matériel, Nicolas Audren, sapeur-pompier professionnel à Brest, dirige à la voix et au sifflet un autre exercice, quelques centaines de mètres plus loin, sous le regard intéressé de randonneurs qui cheminent sur le célèbre chemin de Stevenson qui longe les points sélectionnés ce jour-là par les pompiers pour leurs manoeuvres.

Après une dernière vérification du positionnement des poulies et des mousquetons, de la tension des cordages et de la stabilité de la potence, le chef d'équipe du jour lance d'une voix ferme: "Allez les gars... Traction!"

Tirée par un treuil électrique et soutenue par un secouriste tout le long de la pente, la civière parvient cette fois sans encombre à s'extraire du ravin.

"Cela fait une dizaine d'années que je suis sauveteur-équipier et j'avais l'envie de monter en responsabilité. C'est aussi une remise en question pour savoir quoi faire quand les moyens traditionnels n'ont pas su répondre", explique le pompier de 43 ans, convaincu que ces techniques ont leur place sur la côte et dans les forêts de Bretagne.

Au-delà de l'organisation de stages de perfectionnement parfois très spécifiques - secours dans les arbres, dans les parcs d'attraction, sur les lignes à haute tention ou dans les prisons -, le centre de formation de Florac a aussi une fonction de veille sur l'évolution des technologies, notamment celles liées à l'intelligence artificielle, et de mise à jour des doctrines appliquées à l'échelle nationale par la Sécurité civile.

Appelés également à intervenir sur le terrain, localement ou à l'étranger, lors de catastrophes naturelles, ces spécialistes du secours en milieu périlleux mènent régulièrement des "actions pédagogiques et d'expertise à l'international", comme en attestent les souvenirs de Chine, de Colombie ou du Tadjikistan qui trônent dans une vitrine du bureau du capitaine Pourchot.

siu/ol/or