Avec « Second tour », Albert Dupontel parodie l’univers politico-médiatique pour servir son univers déjanté
CINEMA - « J’enfonce des portes ouvertes avec beaucoup d’enthousiasme ». Ces mots d’Albert Dupontel, le 18 octobre sur France Inter, résument à merveille Second tour, le nouveau film du réalisateur inclassable, en salles ce mercredi 25 octobre.
Car en effet, le cinéaste sort les gros sabots pour peindre la société politico-médiatique à sa façon, ne craignant pas d’enfiler les clichés et de grossir à foison les travers d’une société en panne d’imagination. Des journalistes qui se permettent en pleine campagne présidentielle de ne pas la couvrir, des bandeaux de chaînes infos (à peine) plus exagérés que d’ordinaire, des gardes du corps qui s’enflamment, des conseillers en communication absents.
Ce n’est pas le réalisme que cherche Albert Dupontel dans cette fable où la politique ne lui sert que de décor pour faire ce qu’il préfère : emmener son spectateur loin de la réalité, le surprendre, le faire sourire, rire ou s’émouvoir, prendre la défense des plus faibles et inverser les rôles.
Passées les quelques blagues lourdes sur les Roumains « qu’on trouve aux feux rouges », l’ambiance est drôle, cocasse, inattendue, pleine de suspense et surtout poétique. Un long métrage qui s’inscrit dans la droite ligne d’Adieu les cons (2020, 7 César dont le meilleur film) pour ses rebondissements à la limite du trash et qui pourrait presque en constituer la suite, sans forcément en réussir la prouesse.
Loin de la politique, mais plein de suspens
Une femme - Cécile de France, comme Virginie Efira avant elle, vient à l’écoute et au secours du héros - Albert Dupontel dans les deux cas, et prend la lumière. Impeccable dans le rôle de Mlle Pove, (pour Point of view), journaliste sportive qui bascule au service politique à cause d’un film sur les actionnaires de sa propre chaîne, Cécile de France est aussi touchante que son comparse caméraman joué par Nicolas Marié (99 francs, Adieu les Cons).
Chargés de suivre le candidat Pierre-Henry Mercier (Albert Dupontel), ils vont bien vite s’éloigner du quotidien de la campagne pour en découvrir plus que leurs confrères et mener l’enquête. Au centre d’une intrigue rocambolesque, le trio qui deviendra un mystérieux quatuor nous emmène loin des meetings et déplacements de campagne, pour s’envoler vers une morale simple, mais poétique.
On retient la scène magistrale du débat d’entre deux tours - qui souffre régulièrement de mauvaises réalisations et interprétations - et des plans des Cévennes chères à Dupontel qui raviront les amoureux de la nature. Le réalisateur aurait pu camper son intrigue dans n’importe quelle autre atmosphère - pas sûre que la politique soit la plus judicieuse, mais elle lui permet d’aborder les questions d’environnement, d’identité et de justice qu’il chérit.
Lui qui reproche aux médias de « scénariser le quotidien avec beaucoup d’anxiété », toujours sur France Inter, rare interview qu’il a accordée, nous permet, le temps d’une heure et demie de s’en éloigner. C’est toujours ça de gagné.
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