Sébastien Peytavie, premier député en fauteuil roulant : "On ne peut pas être satisfait de cette situation"

Changer le regard sur le handicap et transmettre un message fort en faveur de l’inclusion, c’est l’ambition de "Différent.e.s". Pour l’incarner, qui mieux que Salim Ejnaïni : cavalier de Jumping, sportif, conférencier, entrepreneur… et non-voyant ? Comment vit-on avec une "différence", comment apprend-on à s'accepter soi et à accepter le regard de l'autre ? Parcours cabossés, destins contrariés et incroyables leçons de vie : Salim Ejnaïni recueille les témoignages de nos invités extra-ordinaires. Des histoires fortes et inspirantes autour de la résilience et du vivre-ensemble…

Député écologiste de Dordogne, Sébastien Peytavie est le premier politicien en fauteuil roulant à siéger sur les bancs de l’Hémicycle. Pour Yahoo, l’homme de 41 ans a accepté de revenir sur sa situation, faisant part de ses nombreux combats pour faire évoluer le quotidien des personnes handicapées. Un témoignage fort.

C’est un symbole. Sébastien Peytavie est le premier député en fauteuil roulant à accéder à l’hémicycle. En y siégeant, l’élu de Dordogne souhaite rappeler aux personnes, dont la situation est similaire à la sienne, que tout est possible. Et ce, malgré les diktats de la société. Pour Yahoo, il a accepté de se livrer sur son histoire, revenant en détails sur les nombreux combats pour lesquels il se bat au quotidien. Son but : améliorer la vie des personnes handicapées. (Retrouvez l’intégralité de l’interview en fin d’article)

Comme il le raconte, le député côtoie dès son plus jeune âge les blocs opératoires. Victime d’une communication interventriculaire (une malformation cardiaque congénitale aussi appelée maladie bleue), il subit à ses trois ans une lourde opération du cœur. Seulement voilà : en pleine période post-opératoire, un caillot se forme, un phénomène aux très lourdes conséquences. Le sang ne circule plus dans le bas du corps, provoquant des lésions au niveau de la moelle épinière.

Ils finissent par l’opérer une nouvelle fois mais le mal est déjà fait. "La rencontre avec le handicap s’est donc faite très jeune", confie-t-il expliquant avoir grandi avec. Fort heureusement, Sébastien a la chance de pouvoir compter sur le soutien sans faille de ses parents mais aussi d’habiter en milieu rural où "les déplacements sont plus simples". Exit les trottoirs, les escaliers et les difficultés liées à la vie citadine. "À l’école par exemple, les parents d’élèves achetaient du béton et construisaient une rampe", se remémore-t-il confiant avoir été témoin d’une certaine entraide. Mais le politicien déplore l’absence des services d’aide. "Quand j’étais gamin, il n’y avait ni les MDPH (Maisons départementales des personnes handicapées) ni les AESH (Accompagnant des élèves en situation de handicap)."

"Quand on regarde une chambre d’hôtel PMR, c’est moche"

Plus le temps passe et plus Sébastien s’aperçoit de certains manquements mais aussi d’un manque d’investissement et de réflexion dans le domaine du handicap. Il prend pour exemple le cas de l’hôtellerie, un secteur au sein duquel les architectes ne donnent pas de leur personne pour rendre beau les établissements. "Lorsqu’on regarde une chambre d’hôtel PMR, c’est moche. C’est pratique mais c’est souvent très médicalisé", déplore-t-il, appelant à une prise de conscience collective. "On aura réussi le jour où il y aura quelque chose de beau en plus d’être pratique."

En parallèle, Sébastien déplore aussi la configuration des salles de spectacle. Pour lui, il est illogique que l’accès aux salles soit étudié pour laisser entrer les personnes handicapées mais que l’accès à la scène ne le soit pas. "Encore aujourd’hui, on n’imagine pas qu’il puisse y avoir un intervenant, un acteur ou encore un danseur en fauteuil roulant", confie-t-il tout en affirmant avoir confiance en l’avenir. "Il faut ouvrir le champ des possibles. Une fois que c’est mis en route, ça permettrait à plein d’autres de suivre." Même chose dans l’hémicycle. Tout a été fait pour permettre aux personnes handicapées de le visiter mais rien n’avait été fait pour celles qui souhaiteraient devenir députée.

"La loi sur l'accessibilité a été votée à l'Assemblée, mais l'institution n'a pas pu se l'appliquer"

Mais tout a changé depuis peu. Lorsqu’il l’est devenu, des ajustements ont dû être réalisés. Interrogé sur sa place au sein de l’hémicycle, Sébastien affirme avoir été placé au premier rang à côté des ministres. "Le symbole est important", affirme-t-il.

"Se retrouver en situation de vulnérabilité ne veut pas dire que nous sommes faibles"

Et si les choses commencent à évoluer dans le bon sens, Sebastien souhaiterait que les stéréotypes selon lesquels les personnes dont le corps est diminué doivent compenser en faisant du sport cessent à tout prix. Pour imager ses propos, il donne pour référence la publicité réalisée en 2012 pour les Jeux olympiques de Londres dans laquelle des "surhommes" handicapés étaient mis en avant.

"C’est quelque chose de terrible. Que fait-on dans une société qui a comme mythe la question de la performance ?", s’interroge-t-il expliquant qu’il y avait encore du chemin à faire. "Se retrouver dans une situation de vulnérabilité ou de fragilité ne signifie pas pour autant qu’on est faible", rappelle-t-il, énumérant les avantages à s’appuyer sur des gens. "C’est un tout autre rapport, il y a du soutien, de l’aide, de la solidarité."

Retrouvez en intégralité l'interview de Sébastien Peytavie