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Des scientifiques canadiens ont contribué au vaccin ARNm. Mais la recherche fondamentale est en péril au pays

Le financement de la recherche est essentiel pour relever les défis futurs en matière de santé. Shutterstock
Le financement de la recherche est essentiel pour relever les défis futurs en matière de santé. Shutterstock

Le prix Nobel de physiologie ou médecine sera décerné le 3 octobre. Le Canada sera de nouveau à l’honneur grâce à la participation de scientifiques canadiens au développement d’un vaccin à ARNm.

Le prix international Canada Gairdner, offert à cinq chercheurs qui ont excellé dans les sciences médicales, est souvent considéré comme un prédicteur du prix Nobel.

Or, cette année, ce prix a récompensé un de nos chercheurs, Pieter Cullis, de l’Université de Colombie-Britannique, ainsi que ses collègues Katalin Karikó, de BioNTech, en Allemagne, et Drew Weissman, de l’Université de Pennsylvanie. Cullis a été reconnu pour la mise au point de l’emballage de nanoparticules lipidiques enveloppant l’ARNm conçu par Karikó, ainsi que par Weissman, pour les composantes du vaccin de la Covid-19.

Développement d’un vaccin à ARNm

La contribution du Canada au développement de vaccins à ARNm fonctionnels comprend également Nahum Sonenberg, un pionnier de la recherche sur l’ARNm qui a été consulté en lien avec le développement du vaccin à ARNm de Moderna. Sonenberg a reçu un Prix international Gairdner en 2008 pour avoir découvert comment l’ARNm est construit pour permettre la synthèse des protéines.

Moderna a elle-même été cofondée par Derrick Rossi de l’Université de Toronto, et Noubar Afeyan de l’Université McGill.

Vaccins contre les adénovirus

En 2021, le Canada avait approuvé non seulement les vaccins à ARNm de BioNTech et Moderna, mais également le vaccin d’Oxford utilisant un virus connu sous le nom d’adénovirus. Ce vaccin utilise un adénovirus pour insérer le gène de la protéine de pointe du virus Covid-19. La vaccination conduit à l’immunité au Covid-19.

C’est le biologiste moléculaire Frank Graham qui a été le pionnier de l’utilisation de l’adénovirus pour générer ce type de vaccins.

La recherche a estimé que 19,8 millions de vies ont été sauvées grâce aux vaccins en 2021, avec plus de 310 000 vies au Canada seulement.

Sous-estimer l’importance de la recherche

La reconnaissance de scientifiques exceptionnels par le comité du prix Nobel n’est malheureusement pas une valeur partagée par notre gouvernement fédéral aujourd’hui. En 2017, la ministre des Sciences Kirsty Duncan a souligné la nécessité d’augmenter le financement des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG) et le Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) pour inverser le déclin de la recherche canadienne.


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En 2017, le financement des IRSC ne représentait que 2,5 % de celui des National Institutes of Health (NIH) correspondants aux États-Unis. En 2022, le financement des IRSC était proportionnellement inférieur, à 2,3 % à celui des NIH.

Les États-Unis reconnaissent l’importance de la recherche en investissant cinq fois plus par habitant que le Canada. Au fur et à mesure que chaque budget fédéral est annoncé, tous les scientifiques du Canada attendent avec impatience une augmentation des budgets à des niveaux compétitifs à l’échelle internationale. Malheureusement cette croissance ne vient jamais.

L’écart entre le Canada et les autres pays du G7 et de l’OCDE, signifie que nos futurs scientifiques canadiens formés en recherche fondamentale iront ailleurs pour poursuivre des opportunités de carrières fructueuses.

La perte de nos scientifiques aura un effet nuisible sur la santé des Canadiens et sur l’économie.

La culture scientifique au Canada

Pendant la pandémie, les Canadiens ont suivi les mises à jour et les nouvelles concernant les messages de santé publique qui affectent leur vie quotidienne. Nous avons observé et examiné comment la recherche scientifique est menée et communiquée.

La pandémie semble avoir suscité une soif et une curiosité pour la science. Plus les gens s’informent, plus ils sont protégés des fausses informations qui pourraient leur nuire ainsi qu’à leurs proches.

Jamais il n’a été aussi nécessaire de promouvoir la pertinence de la science auprès de tout le Canada et particulièrement auprès de nos décideurs aux niveaux fédéral et provincial.

La pandémie de Covid-19 nous a ouvert les yeux sur le fait que le Canada n’était pas préparé pour contrer les grandes pandémies. Du premier séquençage de l’ARN viral du SARS-CoV-2 à la première inoculation du vaccin requis pour atténuer la menace, la rapidité de la réponse des scientifiques fondamentaux et appliqués du monde entier, a démontré pourquoi la recherche scientifique est si pertinente pour tous. Avec de multiples menaces sanitaires, investir dans la recherche ne doit plus être considéré comme un luxe.

Compétition mondiale

Alors que l’inflation apparemment incontrôlable et les problèmes économiques s’installent, les scientifiques canadiens, leurs étudiants et leurs postdoctorants sont gravement touchés par le manque de financement pour soutenir les laboratoires. Sans un investissement accru dans les budgets des trois organismes subventionnaires de la recherche scientifique, le Canada ne pourra pas être compétitif sur le plan scientifique. Cette situation est une menace pour la santé et l’économie du Canada.


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Avec la compétition mondiale pour recruter des chercheurs, il nous faut retenir, recruter et soutenir nos scientifiques de grands talents. Le Canada se doit de relever les défis qui proviendront de nouvelles pandémies, de l’augmentation de la résistance aux antibiotiques contre les infections bactériennes, du traumatisme et de la dévastation du cancer, de la crise des pathologies liées à l’âge, y compris la maladie d’Alzheimer et d’autres neurodégénératives, et bien sûr, contre le diabète. Cette dernière est un exemple de réussite. C’est en effet la découverte de l’insuline qui nous a valus notre premier prix Nobel de physiologie ou médecine en 1923.

La recherche sauve les vies.


John Bergeron remercie Kathleen Dickson en tant que coauteure et Michel L. Tremblay (Université McGill) pour la lecture du texte.

La version originale de cet article a été publiée sur La Conversation, un site d'actualités à but non lucratif dédié au partage d'idées entre experts universitaires et grand public.

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