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Le sabordage du porte-avions Foch au large du Brésil est-il un "crime environnemental"?

Construit à la fin des années 1950 à Saint-Nazaire, le porte-avions a été racheté par le Brésil à la France en 2000. - ERIC ESTRADE / AFP
Construit à la fin des années 1950 à Saint-Nazaire, le porte-avions a été racheté par le Brésil à la France en 2000. - ERIC ESTRADE / AFP

Un porte-avions à près de 5000 mètres de profondeur. La marine brésilienne a annoncé vendredi avoir coulé dans l'océan Atlantique l'ancien porte-avions Foch contenant différents déchets toxiques dont de l'amiante et des peintures. Cette décision a été largement critiquée par des associations écologistes qui dénoncent un "crime environnemental".

9,6 tonnes d'amiante, plus de 600 tonnes d'encres

Le ministère public fédéral du Brésil s'est lui-même inquiété de cette décision, dénonçant la présence de "9,6 tonnes d'amiante, une substance au potentiel toxique et cancérigène, ainsi que 644 tonnes d'encres et d'autres matières dangereuses" sur le bateau.

Il y a un "risque de graves dommages environnementaux (...) notamment parce que la coque est endommagée", a fait valoir le ministère public.

Malgré des recours du ministère devant les tribunaux, le bateau mis en service en 1963 a été coulé à quelque 350 km des côtes brésiliennes, dans une zone d'une "profondeur approximative de 5000 mètres", selon les autorités brésiliennes. Il avait été vendu par la France au Brésil en 2000.

Des dommages "incalculables" pour les ONG

De quoi inquiéter les associations de défense de l'environnement. "La première catastrophe, c'est qu'il va y avoir une mortalité immédiate dans ces communautés de mollusques, de crustacés, de poissons qui seront ensuite pêchés par les Brésiliens", dénonce sur BFMTV Jacky Bonnemains, président de l'association de défense de l'environnement Robin des bois.

"Un jour ou l'autre cette catastrophe sera perceptible dans l'assiette des consommateurs", s'inquiète-t-il.

Les ONG environnementales Greenpeace, Sea Shepherd et Basel Action Network estiment que ce naufrage causera des dommages "incalculables" et dénoncent une "violation de trois traités internationaux" sur l'environnement, dans un communiqué commun.

"La seule solution" selon la marine brésilienne

Sans nier les dommages environnementaux, la marine brésilienne a justifié cette décision en assurant ne pas disposer d'autre alternative. Pour elle, le porte-avions de plus de 60 ans ne pouvait pas faire son retour près des côtes en raison du "risque élevé" qu'il représentait pour l'environnement.

"Face aux risques qu'implique le remorquage et en raison de la détérioration de la coque (...), la seule solution est d'abandonner la coque en la coulant de façon contrôlée", avait expliqué mercredi la marine dans un communiqué conjoint avec le ministère brésilien de la Défense.

Le juge du tribunal fédéral de l'État du Pernambouc (dans le nord-est du pays), a autorisé l'opération bien qu'il l'ait considérée comme une solution "tragique et regrettable", selon le média G1.

Une lente décomposition

La décomposition du bateau va maintenant se faire "petit à petit", prenant probablement "des siècles", selon notre consultant Défense le général Jérôme Pellistrandi.

Malgré la présence de peinture et d'amiante, le porte-avions de 30.000 tonnes a pourtant au préalable été vidé de nombreuses substances dangereuses. "C'est en gros 28.000 tonnes d'acier, (et en plus) des peintures, un peu d'amiante parce qu'à l'époque on en mettait, mais l'essentiel a été retiré", assure-t-il.

"Quand vous avez des bateaux qui coulent qui transportent de la marchandise, ils transportent beaucoup plus de produits dangereux et contaminants que ce porte-avions qui était à l'état de ferraille", assure-t-il encore.

Ce naufrage est loin d'être une première. En 2020, un cargo minéralier, le Staller Banner, qui s'était échoué avec sa cargaison, avait notamment été sabordé au large du Brésil, sur décision de Jair Bolsonaro, président à l'époque.

Article original publié sur BFMTV.com