Les sœurs Nardal et les prémices du concept de négritude

Paulette (debout) et Jane Nardal (à dr.), avec leur sœur Lucy, à Clamart, le 19 octobre 1935. Premières étudiantes noires de la Sorbonne, elles lanceront La Revue du monde noir : « Nous avons pleinement conscience de ce que nous devons à la culture blanche. […] Sans elle, nous n’eussions pas pris conscience de ce que nous sommes. »  - Credit:Coll. Collectivité territoriale de Martinique–Archive-61J Papiers Nardal/SP

Elles sont entrées dans l'histoire littéraire par une trop petite porte, celle de leur appartement de la rue Hébert, à Clamart, en banlieue parisienne, où les Martiniquaises Paulette (1896-1985) et Jane Nardal (1902-1993) reçurent dans leur salon, à partir de 1928 et chaque dimanche après-midi, tout ce que le monde noir comptait d'intellectuels, d'écrivains, d'artistes dans le Paris des années 1920.

Elles reviennent aujourd'hui par la grande porte, à la hauteur de leur contribution dans la circulation des idées entre l'Amérique de la Harlem Renaissance, leurs Antilles natales et l'Afrique, grâce à l'essai biographique que Léa Mormin-Chauvac leur consacre.

Les sœurs Nardal sont les filles de Paul Nardal, premier « Noir de France à obtenir une bourse pour étudier aux Arts et Métiers », et premier ingénieur en travaux publics de Martinique. Leur mère, Louise, est professeure de musique.

Dans la maison de la rue Schoelcher, à Fort-de-France, les sept sœurs Nardal grandissent dans un environnement qui favorise leur épanouissement intellectuel : « Un centre culturel avant la lettre », confie Paulette, l'aînée, dans ses entretiens avec Philippe Grollemund, seule trace des Mémoires qu'elle regrettera de n'avoir pas écrits.

Les graines du mouvement de la négritude

Venues en métropole en 1920, Paulette, 24 ans, et sa sœur Jeanne, devenue Jane, 18 ans, sont les premières étudiantes noires de la Sorbonne. Elles s'immergent dans le Paris du Bal Blomet, où l'on court danser [...] Lire la suite