Séquestration de Paul Pogba : ce que son frère Mathias a justifié face à la juge lors de son audition

L’interrogatoire du frère aîné du footballeur et l’exploitation du téléphone portable d’un suspect semblent lever le voile sur les coulisses de cette affaire familiale et amicale.

JUSTICE - Éloigné des terrains de football pour une durée de quatre ans, c’est sur le terrain judiciaire que l’ex-international français Paul Pogba fait encore parler de lui, mais en tant que victime. Car un rebondissement inattendu semble avoir eu lieu dans l’affaire de séquestration et d’extorsion du footballeur, et cela concerne son frère Mathias Pogba.

Yeo Moriba, la mère de Mathias et Paul Pogba, s’exprime dans une première interview

Lié à cette affaire pour avoir été mis en examen après avoir été soupçonné d’avoir fourni une « aide active » pour convaincre son frère de payer la somme réclamée par les braqueurs, le frère aîné de Paul Pogba estime pourtant qu’il n’a été qu’une « marionnette » des malfaiteurs, qu’il connaissait pourtant très bien.

C’est ce qu’il laisse entendre dans un interrogatoire devant la juge d’instruction chargée des investigations sur la séquestration de Paul Pogba. Un interrogatoire qui s’est déroulé le 25 janvier dernier, mais dont l’AFP n’a eu connaissance que ce mardi 2 avril.

« On m’a baladé de gauche à droite, on m’a menti depuis le début », a-t-il dit, « ému aux larmes ». Les raisons de son émotion ? Réaliser que les trois amis d’enfance et les deux vieilles connaissances du quartier où les Pogba ont grandi s’étaient potentiellement joués de lui sur leur version des faits de la nuit du 19 mars 2022, où Paul Pogba avait été séquestré et braqué en banlieue parisienne par deux hommes non identifiés qui lui réclamaient 13 millions d’euros.

Les regrets de Mathias

Tous présents cette nuit-là, contrairement à Mathias, ils seront mis en examen pour extorsion avec arme et séquestration en bande organisée. Mais jusqu’alors, Mathias Pogba croyait à leur version, explique-t-il à la juge. Car tous niaient les faits et expliquaient même avoir été agressés car Paul Pogba avait refusé de payer la somme demandée.

Mathias Pogba s’était donc chargé de parler à son jeune frère pour le convaincre de payer afin d’éviter d’autres « victimes » parmi ses proches. Mais le 25 janvier, la magistrate lui dévoile les résultats de l’exploitation du téléphone portable d’un suspect. Et Mathias serait visiblement tombé de haut car ces nouveaux éléments dessinent, selon les enquêteurs, les contours d’une « organisation » de la nuit fatidique par au moins deux des suspects, Adama C. et Mamadou M..

« C’est comme des frères pour nous », a ainsi réagi, décontenancé le frère du joueur de la Juventus Turin. « Ils viennent me raconter tout ça comme si c’était des victimes alors que tout était déjà orchestré », ajoute-t-il alors qu’il avait lui-même publié des vidéos incriminant son cadet à l’été 2022, estimant que le footballeur avait « abandonné » ses proches en refusant de payer.

Une tournure médiatique et des propos qu’il regrette aujourd’hui : « J’espère le revoir au plus vite. (…) Ça prendra le temps que ça prendra mais j’espère que notre union va se reconsolider », avant d’ajouter qu’avec ces vidéos, il « voulait sortir la rage » mais « à aucun moment » lui mettre la pression.

Une commission plutôt qu’une extorsion ?

Il faut dire que plusieurs échanges téléphoniques alourdissent les suspicions à l’encontre des deux amis d’enfance de la famille Pogba. Le 10 mars, soit neuf jours avant la séquestration, Adama C. reçoit une note vocale de Mamadou M. : « Il faut taper fort, fort, fort, fort, mais après si vraiment on demande 25 (...) c’est un quart de sa fortune, frère (...) faut bien faire les choses, (...) pas le dépouiller ».

Adama C. téléphone aussi à un ami vivant en Outre-mer. Entendu en garde à vue mi-novembre, ce dernier raconte qu’Adama C. lui avait dit : « Viens, on va parler à Paul pour récupérer des sous (...) faut pas louper le wagon ». Adama lui propose même de payer son billet d’avion pour la métropole. Lui refuse car il sent Adama, habituellement « pacifique », assez « énervé ». Pour lui, « Paul promettait des choses qu’il ne faisait pas », analyse-t-il.

Il affirme avoir prévenu le champion du monde 2018 que des personnes lui en voulaient, sans « donner de nom ». Intriguée par toute cette « organisation » préalable, la juge d’instruction a donc questionné fin décembre les deux hommes soupçonnés. Mais leur version laisse entendre qu’ils prévoyaient d’obtenir une commission rêvée en devenant les agents de Paul Pogba. Rien à voir avec un projet d’extorsion donc.

« Quand je disais qu’il fallait taper fort, je disais qu’il faut que tout le monde parle » pour « avancer main dans la main », avait d’ailleurs assuré Mamadou M. devant la juge. Reste à savoir si cette version sera suffisamment convaincante pour éviter une condamnation aux deux amis d’enfance de la star du foot lourdement sanctionné pour dopage en Italie le mois dernier.

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