La Russie selon Poutine

À la fin, il ne restera qu’un, et ce sera Vladimir Poutine. Au sommet du pouvoir depuis plus de vingt ans – avec un interlude comme chef de gouvernement entre 2008 et 2012 –, le président russe se succédera à lui-même, sans l’ombre d’un doute, dimanche 17 mars (le vote se déroule sur trois jours à partir du 15). Le maître du Kremlin vise 80 % des suffrages dans ce qui s’annonce d’abord comme un plébiscite pour la poursuite de la guerre en Ukraine. C’est en tout cas la volonté affichée du pouvoir, qui a verrouillé l’élection, recalant six candidats, parmi lesquels Boris Nadejdine, le seul ouvertement pacifiste.

Il y a quinze jours à Moscou, des milliers de Russes avaient rendu hommage à Alexeï Navalny, mort le 16 février dans une colonie pénitentiaire en Arctique. Combien seront-ils à oser défier le régime le jour du scrutin ? C’est l’une des rares inconnues de cette élection. Ioulia Navalnaïa, la veuve de l’opposant, a appelé les Russes à manifester leur hostilité à Poutine en votant en masse à la même heure, à midi pile, le 17 mars, pour submerger les bureaux de vote. Pas sûr qu’elle soit entendue.

Car comme l’explique très bien Alexeï Levinson au quotidien tchèque Denik N, “les Russes ont besoin de Poutine pour se rassurer”. Dans la passionnante interview qu’il a accordée à la journaliste Petra Prochazkova, le sociologue explique ainsi la longévité politique du président russe :

“La description la plus précise de la relation qu’entretiennent les Russes avec leur leader est la volonté de préserver le statu quo. Il s’agit de laisser les choses en l’état […]. Les Russes sont convaincus, non sans fondement, que tout changement ne peut être que négatif. Ils tiennent cette idée de leurs parents, de leurs grands-parents…”

Pour Alexeï Levinson, Poutine a su rendre à la Russie son statut de puissance, et c’est cela qui prime aux yeux de ses concitoyens.

Une interview d’autant plus forte qu’Alexeï Levinson enseigne et vit à Moscou. C’est une voix de l’intérieur. De celles que l’on entend rarement. Ce n’est pas celle d’un dissident, mais d’un esprit critique sans aucun doute. Et ces voix-là sont devenues inaudibles et trop rares depuis le début de la guerre en Ukraine, il y a deux ans.

[...] Lire la suite sur Courrier international

Sur le même sujet :