Du RN au camp Macron : ces députés qui voulaient détricoter le non-cumul des mandats (en vain)

Du RN au camp Macron, ces députés qui voulaient détricoter le non-cumul des mandants (ici Laurent Marcangeli, le président du groupe Horizons)
EMMANUEL DUNAND / AFP Du RN au camp Macron, ces députés qui voulaient détricoter le non-cumul des mandants (ici Laurent Marcangeli, le président du groupe Horizons)

POLITIQUE - Le renouvellement, ça commence à bien faire ? Une proposition de loi clivante remettant en cause l’interdiction du cumul des mandats, qui semblait en passe d’être adoptée jeudi 14 mars au soir à l’Assemblée nationale, n’a finalement pas pu faire l’objet d’un vote, faute de temps suffisant, à l’issue d’une séance électrique.

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Le groupe du parti d’Édouard Philippe, Horizons, qui avait inscrit ce texte au menu de sa journée réservée dans l’hémicycle, a dénoncé une « obstruction » de la gauche, après que celle-ci a ralenti les débats jusqu’à minuit, à coups de sous-amendements, de rappels aux règlements et autres demandes de suspension de séance.

Les « niches parlementaires » dédiées à un groupe s’arrêtant forcément à minuit, sans possibilité de se poursuivre un autre jour, l’examen de la proposition de loi ne pourra pas reprendre. « Nous y reviendrons ! », a promis la députée Horizons Naïma Moutchou.

Alliance de circonstance

Le texte visait à « assouplir » une loi de 2014, adoptée sous François Hollande et appliquée depuis 2017, qui a interdit d’être à la fois parlementaire national et titulaire d’un mandat exécutif local. Avec l’objectif de renouveler les élus et de féminiser le Parlement, mais aussi de garantir que les élus se consacrent pleinement à leurs mandats.

Le texte des députés du parti d’Édouard Philippe, alliés des macronistes de Renaissance et du groupe Modem au sein de la majorité présidentielle, ne proposait de revenir qu’en partie sur ce principe. Il autorisait à nouveau députés et sénateurs à exercer des fonctions d’adjoint au maire (mais pas de maire), ou de vice‑président (et non président) de département ou de région. Leur proposition aurait sans doute été adoptée en première lecture en cas de vote final. Un scrutin sur son article principal a ainsi été remporté avec 64 voix contre 44.

Soutenue par la droite et l’extrême droite, et farouchement combattue par la gauche, elle divisait au sein du camp présidentiel. Mais dans un hémicycle clairsemé en séance nocturne, les députés Renaissance favorables à l’initiative étaient surreprésentés, selon un cadre du groupe.

« Un équilibre a été rompu au sein de notre République », a plaidé le député Horizons Henri Alfandari, qui portait ce texte, jugeant que le Parlement devrait bénéficier « de figures solidement ancrées dans un territoire » pour « contrebalancer le jacobinisme républicain ».

Le gouvernement ni pour ni contre

« Ce débat doit se tenir, il est normal, il est sain, il ne faut pas le refouler », a estimé en début de soirée la ministre déléguée chargée des Collectivités territoriales, Dominique Faure, sans se prononcer ni pour ni contre le texte. Le débat ainsi ouvert nourrira « les décisions collectives qui viendront » ultérieurement, a-t-elle ajouté.

Lors d’une réunion dans la semaine, une majorité de députés macronistes s’était positionnée contre un retour du cumul des mandats. Mais certains s’y sont montrés favorables, à l’image du député Karl Olive, qui a même défendu jeudi des amendements levant l’interdiction de cumul y compris pour les maires, à l’instar des députés Les Républicains (LR, droite).

« Jamais notre pays n’a traversé autant de tempêtes provoquées par l’absence de capteurs de terrain », a fait valoir le député LR Pierre-Henri Dumont. Pour Bruno Bilde (RN), faute d’ancrage local des députés, « c’est l’administration qui prend la place laissée vacante ».

La gauche appuyée par quelques voix dans la majorité

La gauche a fait front commun face à la remise en cause du non-cumul, soulignant le risque d’accentuer la défiance envers les parlementaires. Pressentant une adoption possible du texte à l’approche de minuit, les socialistes ont déposé des sous-amendements par dizaines en fin de séance pour qu’il n’y ait pas de vote.

« Je ne suis pas sûr qu’il y ait beaucoup de députés ou sénateurs qui ont du temps pour faire autre chose que leur mandat de parlementaire », a argumenté la députée communiste Elsa Faucillon. « Vous êtes déconnectés », a lancé l’Insoumis Carlos Martens Bilongo aux députés Horizons, tandis que l’écologiste Charles Fournier leur a reproché de nourrir « une sorte de nostalgie des baronnies locales ».

Autant de critiques qui ont trouvé un certain écho sur les bancs de la majorité présidentielle. « Il est difficile de comprendre pourquoi le débat est remis sur la table tant il apparaît comme une régression », a ainsi estimé Ludovic Mendes (Renaissance), dont le groupe avait accordé une liberté de vote à ses membres.

Ce n’est pas la première fois que le non-cumul est remis en cause. L’Assemblée avait rejeté en 2021 un texte sénatorial, qui avait déjà embarrassé la majorité macroniste de l’époque, accusée d’être « hors-sol » après la crise des gilets jaunes.

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