Retraites: le Conseil constitutionnel va-t-il valider la seconde demande de référendum?

Après le rejet d'une première demande de référendum d’initiative partagée, la gauche retente sa chance avec une seconde mouture pour ramener l'âge de départ à la retraite à 62 ans. Les Sages rendent leur décision ce mercredi.

Un nouvel espoir pour la gauche? Après la promulgation express de la réforme des retraites et un 1er-Mai jugé réussi par les syndicats, le Conseil constitutionnel doit annoncer ce mercredi sa décision sur une nouvelle demande de référendum d'initiative partagée (RIP), près de trois semaines après le rejet d'une première demande.

• Qu'est-ce que le référendum d'initiative partagée?

Prévue par la Constitution, cette disposition ouvre la possibilité d'organiser un référendum sur une proposition de loi "à l'initiative d'un cinquième des membres du Parlement", soit au moins 185 des 925 parlementaires (577 députés, 348 sénateurs).

En mars puis en avril, des parlementaires de gauche ont déposé une proposition de loi référendaire pour que "l'âge légal de départ à la retraite ne puisse pas être fixée au-delà de 62 ans".

Le RIP est vu comme l'une des dernières chances de revenir sur la réforme des retraites alors que le gouvernement essaie tant bien que mal de tourner la page. Emmanuel Macron a rappelé à plusieurs reprises vouloir son application en septembre prochain.

Le Conseil constitutionnel a pour mission de vérifier que le référendum remplit bien les critères fixés par le législateur. L'institution dirigée par Laurent Fabius doit ainsi confirmer que le référendum "porte sur l’organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique ou sociale de la nation et aux services publics qui y concourent".

Le Conseil constitutionnel doit également vérifier que le RIP n'a pas "pour objet l’abrogation d’une disposition législative promulguée depuis moins d’un an ".

• Pourquoi le premier RIP a-t-il été rejeté?

Si les Sages ont validé partiellement la réforme des retraites, dont le recul de l'âge de départ à 64 ans, ils ont également rejeté une première demande de RIP le 14 avril dernier.

"À la date de l'enregistrement de la saisine, la proposition de loi visant à affirmer que l'âge légal de départ à la retraite ne peut être fixé au-delà de 62 ans n'emporte pas de changement de l'état du droit", indique le Conseil constitutionnel.

Concrètement, la demande de RIP n'avait pas le caractère d’une "réforme" comme l'exige la Constitution, poussant les Sages à la refuser. La demande a en effet été déposée en mars alors que la réforme des retraites n'a été promulguée que le 14 avril.

• Ce deuxième RIP est-il différent?

Dans cette deuxième mouture, les parlementaires de gauche ont bien gardé la demande de ne pas pouvoir dépasser les 62 ans pour l'âge légal de départ à la retraite mais ils ont ajouté un volet sur la "recette fiscale liée aux ressources du capital pour sécuriser le financement de la retraite par répartition".

"Après analyse, nous avons rédigé un texte qui est davantage conforté en termes juridiques, avec des arguments financiers, afin de porter une vraie proposition de réforme", a précisé Patrick Kanner, le patron des sénateurs PS, à l'origine du dépôt de la seconde demande, auprès de Public Sénat.

Le Conseil constitutionnel devra donc déterminer si l’ajout d’une ressource fiscale peut être considéré comme une réforme.

La manœuvre est moins simple qu'il n'y paraît: les Sages n'ont dû se prononcer qu'à quatre reprises sur le sujet. "Le problème, c'est que le Conseil constitutionnel crée des normes au fur et à mesure donc c'est compliqué de savoir de quel côté la pièce va tomber", nous expliquait le constitutionnaliste Paul Cassia, après l'invalidation de la première version.

• Que se passera-t-il en cas de validation?

Si le Conseil constitutionnel juge le RIP conforme, ce sera le début d'un long parcours semé d'embûches. Il va d'abord falloir que la demande de référendum parvienne à récolter la signature d'un "dixième des électeurs", soit 4,87 millions de personnes dans un délai de 9 mois.

Lors du dernier RIP contre la privatisation des Aéroports de Paris, seulement un million de personnes avaient signé. Il faut dire que la plateforme de recueil des signatures sur le site du Conseil constitutionnel est relativement complexe, avec une vérification préalable de l’inscription au répertoire électoral unique (REU).

Si le seuil de 4,8 millions est atteint, l'Assemblée nationale et le Sénat auront six mois pour examiner la proposition de loi et décider de l'adopter ou de la rejeter. En l'absence de vote des parlementaires - très peu probable -, le président de la République devra alors convoquer un référendum.

Pendant ce temps, "le RIP ne gèle pas l'application de la loi", rappelle le constitutionnaliste Paul Cassia auprès de BFMTV.com. Très concrètement, Emmanuel Macron pourrait donc faire appliquer la réforme en septembre prochain tandis que la collecte des signatures serait en cours. Mais politiquement, l'affaire semble intenable.

En cas de rejet du RIP par le Conseil constitutionnel, la gauche mise encore sur une proposition de loi du groupe Liot à l'Assemblée nationale pour revenir à la retraite à 62 ans. Elle doit être examinée le 8 juin prochain, deux jours après une nouvelle journée de mobilisation organisée par l'intersyndicale.

Article original publié sur BFMTV.com

VIDÉO-Retraites: le Conseil constitutionnel rendra sa décision sur la seconde demande de référendum d'initiative partagée ce mercredi