Rentrée scolaire 2022 : Les fournitures gratuites, une bonne idée mais…

Rendre les fournitures scolaires gratuites, une bonne idée mais...(photo d’illustration prise en août 2015 près de Rodez)
PASCAL PAVANI / AFP Rendre les fournitures scolaires gratuites, une bonne idée mais...(photo d’illustration prise en août 2015 près de Rodez)

PASCAL PAVANI / AFP

Rendre les fournitures scolaires gratuites, une bonne idée mais...(photo d’illustration prise en août 2015 près de Rodez)

RENTRÉE SCOLAIRE - Rendre les fournitures scolaires gratuites pour réduire le coût de la rentrée. Dans un contexte économique inflationnaire, l’idée fait son chemin, portée aussi bien par les députés d’opposition LFI que par Olivier Klein, ministre délégué à la Ville et au Logement. Mais encore faut-il savoir ce que l’on met dans le cartable.

Le 26 août dernier, le ministre délégué à la Ville et au Logement s’est dit favorable à la gratuité d’un « trousseau » pour les enfants issus des familles les plus modestes à la rentrée 2023. « Avoir ce trousseau sur la table le jour de la rentrée, cela a une force symbolique, une force d’équité. Il y a une forme d’appartenance à voir ce matériel partagé par tous les enfants », fait valoir Olivier Klein.

« Force symbolique d’équité », pour le ministre à la Ville

Il n’est pas le seul à défendre cette idée. Quelques semaines plus tôt dans Libération, le député LFI de Paris Rodrigo Arenas plaidait pour que « tout ce qui concerne l’éducation de nos enfants soit pris en charge par la puissance publique ». Le 30 août, une proposition de loi signée par 105 députés de la NUPES a été déposée à l’Assemblée nationale pour « garantir la gratuité réelle de l’éducation ». Les élus incluent dans cette gratuité les fournitures scolaires, mais aussi les cantines et les sorties scolaires, de la maternelle au lycée.

« Il faut y inclure le cartable et tout son contenu, mais pas seulement », détaille au HuffPost Rodrigo Arenas. « Il faut aussi penser aux équipements pour les filières professionnelles ou technologiques. Par exemple, pour un Bac Pro Cuisine, il faut compter 500 euros pour l’achat des couteaux », ajoute l’ancien président de la FCPE, principale fédération de parents d’élèves.

La gratuité d’une partie des fournitures est déjà mise en œuvre à l’échelle locale. C’est le cas à Clichy-sous-Bois, ville dirigée par Olivier Klein avant son entrée au gouvernement, où « tous les enfants du CP au CM2 ont, sur leur table, l’ensemble du trousseau nécessaire ». À la Réunion, la Région a pris en charge cette année les douze manuels nécessaires aux élèves de la seconde à la terminale. Mais sans dispositif national, la composition du trousseau, ainsi que les personnes qui en bénéficient varient et dépendent du bon vouloir et des moyens des collectivités.

Quatre ou huit stylos ?

L’idée étant simplement en discussion à ce stade, le ministre délégué à la Ville n’a pas donné de détail sur la composition de la liste et a dit vouloir travailler avec les enseignants et les parents. Il a en revanche évoqué « les quartiers populaires » comme cible première. Deux points qui font tiquer la FIDL, parmi d’autres. Auprès du HuffPost, Louri Chrétienne, son président, reconnaît que la gratuité des fournitures est « une très bonne mesure au premier abord ». Le « mais » n’est pas loin : « Ce n’est pas parfait pour autant. Qui va en bénéficier ? Qui choisit les fournitures ? », ajoute-t-il.

La composition du trousseau est cruciale. Le 16 août dernier, le ministre de l’Éducation a partagé une « liste modèle » qui comprend un grand et un petit cahier, 12 feutres et 12 crayons, une gomme, un tube de colle, quatre stylos à bille et deux crayons de papier, entre autres.

Cette liste n’a pas été établie dans le cadre des discussions menées sur la gratuité du matériel scolaire. Mais la FIDL l’a utilisée comme base pour ses calculs et chiffre à 104 euros le coût du panier conçu par le ministère. Immédiatement, elle pointe un premier écueil : la liste est loin de répondre aux besoins des élèves du secondaire. « Il y a des choses évidentes qui manquent. Le ministère ne met qu’un cahier dans sa liste, il les faut en double. Pareil pour les stylos, il n’y en a que quatre. Et il y manque aussi la calculatrice… » énumère Louri Chrétienne. Coût moyen du panier élargi conçu par la FIDL : entre 210 et 215 euros. Le double de celui du ministère.

De son côté, l’association Famille de France estime dans son étude annuelle que le coût de la rentrée 2022, calculé en incluant les fournitures (trousse, stylos, cartable, etc. ) et les équipements de sport (une paire de baskets, un jogging et deux paires de chaussettes), atteint 208,12€. En hausse de 8,48€ par rapport à 2021.

Selon la composition du trousseau par la liste du ministère ou celle des associations, les économies pour les parents iraient donc du simple au double. Si on inclut la cantine, comme le souhaite le député Rodrigo Arenas les économies seraient alors encore plus importantes, « de l’ordre de plusieurs centaines d’euros par an ».

« Les fournitures gratuites ne doivent pas faire disparaître l’ARS », selon la Fidl

Autre inquiétude : les bénéficiaires. Faut-il prioriser les élèves du premier degré ? Du second ? Tous les élèves ? Ceux dont les parents ont des revenus modestes ? Par quartier, comme l’a suggéré le ministre délégué ? « Si l’on commence à attribuer les aides en fonction des quartiers, cela va vite poser problème », s’inquiète le représentant de l’association lycéenne. Le ministre lui-même avait anticipé la difficulté : « Il y a aussi des enfants pauvres dans des quartiers qui ne sont pas en REP ou REP+. Il faudra trouver une proposition juste et équitable », avait-il déclaré sur franceinfo.

Au-delà de ces questions techniques, le représentant syndical s’inquiète de voir la gratuité des fournitures prendre le pas sur d’autres aides. Il cite très précisément l’allocation de rentrée scolaire qui a, cette année encore, fait l’objet de critiques de la part des Républicains. « Les fournitures gratuites ne doivent pas faire disparaître l’ARS », craint Louri Chrétienne. Au contraire, il plaide pour que cette aide de rentrée soit revalorisée, au-delà des 4 % décidés cette année et que le plafond de son attribution soit revu à la hausse, afin que davantage de familles puissent en bénéficier. Cette année, environ 3 millions de familles ayant un enfant entre 6 et 18 ans l’ont reçu.

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