Un record de fusion nucléaire en Europe repousse les limites connues

Un record de fusion nucléaire en Europe repousse les limites connues
Eurofusion Un record de fusion nucléaire en Europe repousse les limites connues

ÉNERGIE - Dix mégajoules de plus : quelques mois de consommation énergétique d’un appartement. Cela peut sembler négligeable, mais c’est un record pour le monde de la fusion nucléaire. En décembre dernier, près d’Oxford, l’équipe du Joint European Torus (JET) a ainsi réussi à produire 69 mégajoules pendant 5 secondes, une nette amélioration de leur performance de 2022 où 59 mégajoules avaient été produits pendant le même laps de temps.

Un nouveau record de fusion nucléaire pousse un réacteur jusqu’à ses limites

Une réussite qui vient juste d’être révélée alors que le JET part à la retraite cette année… Et qui ouvre la porte à de futures avancées.

Le JET est un tokamak, c’est-à-dire une construction en forme de donut formant un puissant champ magnétique, et dans laquelle les atomes viennent se fracasser à des vitesses très élevées afin d’atteindre des températures dix fois plus élevées que celle que l’on trouve au cœur du soleil ; on parle de 150 à 200 millions de degrés Celsius. À de telles températures, les atomes forment un plasma et se mettent à fusionner entre eux, dégageant une énergie phénoménale.

Dans ce domaine, les records s’enchaînent pour aller vers le Graal, le nombre d’or de Q=1, ou Q équivaut à l’énergie générée divisée par l’énergie utilisée. Lorsque ce chiffre sera atteint, cela signifiera que la fusion nucléaire est capable de produire plus d’énergie qu’elle n’en dépense, et donc de s’auto-entretenir, comme à l’intérieur d’une étoile (notre soleil par exemple). Avec ce nouveau record, l’équipe européenne a atteint Q=0,33 : un tiers du chemin a donc été parcouru.

À la limite de la fonte des équipements

« Vous êtes exactement dans la position ou vous essayez d’allumer un feu avec du bois mouillé », résumait en 2022 Yannick Marandet, chercheur au CNRS, directeur de la Fédération de recherche sur la fusion par confinement magnétique ITER, au HuffPost. « Il faut chauffer les brindilles, et si on arrête de chauffer, le feu ne prend pas. Si on chauffe suffisamment longtemps, le feu se maintiendra tout seul », poursuivait-il.

Bien sûr, pour que le processus s’auto-alimente, il faudra aller au-delà, bien au-delà des cinq secondes. Mais ce n’est pas JET, vaillant mais au bord de la retraite, qui s’en chargera. « Au-delà des 5 secondes, les bobines de cuivre du tokamak fondent », explique Yannick Marandet. L’expérience acquise devra maintenant être transférée dans le « petit » frère, celui que tant de chercheurs attendent : ITER.

Le tokamak en construction à Saint Paul-lez-Durance (Bouches-du-Rhône), fruit de la collaboration de 35 pays, aura la charge de reproduire l’expérimentation de JET, mais avec une ampleur toute autre. Il s’agira désormais de maintenir le plasma dans un état stable pendant non pas quelques secondes, mais jusqu’à une heure, en produisant 50 fois plus de puissance. Avec cette fois, de sérieuses chances d’atteindre le nombre d’or.

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