Record de détenus en prison : comment a évolué la population carcérale en France ?
L’Hexagone fait partie des dix pays européens où la population carcérale progresse, alerte un rapport de la Cour des comptes.
Il n’y a jamais eu autant de détenus dans les prisons françaises. Dans un rapport publié ce jeudi, la Cour des comptes alerte sur l’augmentation continue de la population carcérale depuis plus de vingt ans. "La France figure parmi les dix pays européens où la population incarcérée progresse", est-il précisé.
Et pour cause, les prisons françaises comptaient 58 231 détenus au 1er janvier 2005, 66 678 au 1er janvier 2015 et 71 173 au 1er janvier 2023. Seule exception à cette courbe en constante progression : l’année 2021 où 62 673 personnes étaient incarcérées au 1er janvier. Cette chute exceptionnelle du nombre de détenus a été amorcée entre avril et juin 2020, date de la première vague du Covid-19 et des premiers confinements.
"L'explication vient pour moitié du fort ralentissement des entrées en prison et pour l'autre moitié de la forte accélération des libérations", précise l’Observatoire des disparités dans la justice pénale. Dans une ordonnance publiée en mars 2020, le gouvernement a incité les magistrats à promouvoir des alternatives aux incarcérations et à la réduction de peines supplémentaires pour motif sanitaire. La pandémie a également contraint à annuler bon nombre d’audiences et par conséquent, à limiter les entrées. Après 2021, la courbe des incarcérations est repartie de plus belle.
73 693 détenus en septembre 2023
Au 1er septembre 2023, 73 693 personnes étaient incarcérées, selon les données du ministère de la Justice. C’est moins qu’au 1er juillet de la même année, où 74 513 personnes étaient en prison, mais toujours bien plus que la capacité d’accueil. Il n’y a que 60 629 places disponibles. "Il en résulte une aggravation de la suroccupation des établissements pénitentiaires : fin 2022, le taux d’occupation des maisons d’arrêt était de près de 143 %", précise le rapport de la Cour des comptes.
Or, "la suroccupation expose les détenus et les personnels à des conditions de détention marquées par des tensions quotidiennes, la promiscuité et des risques de violence accrus", ajoute le rapport. La France a notamment été condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme en 2020 et 2023 en raison "des conditions de détention subies" par certains détenus.
Les raisons de la hausse des incarcérations
Parmi les raisons évoquées pour expliquer ce phénomène, "la réponse pénale à la délinquance (qui) s’est durcie", une "répression accrue" pour certains crimes et délits comme les "violences intrafamiliales, les délits routiers ou les violences envers les forces de l'ordre", "l'augmentation du recours aux comparutions immédiates et le maintien, à un niveau élevé, du taux de détention provisoire".
De plus, les alternatives aux incarcérations comme les travaux d’intérêt général ou le port d’un bracelet électronique n’ont pas permis de réduire les détentions. Quant à la construction de nouveaux établissements pénitentiaires, la maximisation des taux d’occupation ou le déploiement de la nouvelle politique des peines pour réduire les courtes peines de prison, ils n’ont eu à ce jour qu’un impact "à ce jour limité".
L'institution rappelle que le fonctionnement du système carcéral "n'est pas satisfaisant au regard d'un objectif ambitieux de prévention de la récidive" et que cette surpopulation a un coût pour les finances publiques : 4 milliards d’euros.
VIDÉO - Prisons : nouveau record du nombre de détenus en France en décembre 2022