Rapport mondial sur le bonheur: des jeunes moins heureux que leurs aînés, une tendance "troublante"
Le bonheur devrait-il désormais attendre le nombre des années? Publiée ce mercredi 20 mars, la dernière édition du Rapport mondial sur le bonheur, qui a vu la Finlande conserver son titre de pays le plus heureux du monde, révèle une tendance inquiétante. Alors que les jeunes étaient traditionnellement plus heureux que leurs aînés, cette étude montre que l'écart entre générations s'est fortement réduit voire s'est résorbé en Europe occidentale.
Et dans les pays d'Amérique du Nord (États-Unis, Canada), en Nouvelle-Zélande, ou en Australie, l'évolution est encore plus flagrante: l'indice de bonheur est désormais bien plus élevé chez les plus de 60 ans que chez les moins de 30 ans.
Interrogé par le Guardian, Jan-Emmanuel De Neve, directeur du Centre de recherches sur le bien-être de l'université d'Oxford et l'un des auteurs du rapport, juge cette tendance "troublante".
"Dans certaines parties du monde, les jeunes traversent déjà l'équivalent d'une crise de la quarantaine et cela impose de prendre des mesures", affirme-t-il.
Un "signal d'alarme" pour les Américains
En la matière, le cas américain est particulièrement éloquent. Vivek Murthy, l'administrateur de la santé publique américaine sollicité par le Guardian, voit même dans ce rapport un "signal d'alarme".
Toutes catégories d'âge confondues, les États-Unis arrivent à la 23e place du classement mondial, juste devant l'Allemagne. Le pays fait cependant un bond au 10e rang mondial lorsque l'on prend en ligne de compte les seuls Américains âgés de plus de 60 ans.
A contrario, il plonge en 62e position et se situe entre la République dominicaine et le Pérou pour les 30 ans et moins. Il y a seulement une décennie de cela, l'indice de bonheur était pourtant presque similaire - environ 7,3 sur une échelle de 0 à 10 - pour ces deux catégories de population.
La Finlande n'est pas épargnée
Ce même contraste entre les générations est également observable outre-Manche, avec un indice du bonheur supérieur de 0,6 point chez les Britanniques les plus âgés que chez leurs jeunes compatriotes.
En France, l'indice du bonheur, qui s'établissait à environ 6,5, est désormais quasiment similaire quel que soit l'âge. Chaque année depuis 2006, et à une exception près, l'indice était pourtant plus élevé pour les moins de 30 ans que pour les Français de 60 ans et plus.
Quant aux champions du monde finlandais, ils ne sont pas épargnés par cette tendance avec un indice de bonheur de 7,9 pour les plus âgés et de 7,3 pour les plus jeunes. Les Finlandais de moins de 30 ans n'occupent ainsi "que" la 7e position du classement, la Lituanie, Israël et la Serbie occupant le podium.
La faute des réseaux sociaux?
Le rapport dévoilé mercredi, basé sur l'évaluation que les gens font de leur bonheur et de données économiques et sociales, n'explique pas les raisons de cette évolution mais des facteurs comme la difficulté d'accès au logement, les inégalités de revenus et les craintes liées à la guerre et au changement climatique sont autant de pistes potentielles.
Vivek Murthy insiste lui sur un autre facteur: les réseaux sociaux et leur omniprésence dans le quotidien des adolescents américains. Il appelle ainsi au passage d'une loi diminuant leurs effets délétères en limitant voir en supprimant les boutons "J'aime" ou la possibilité de faire défiler les messages à l'infini.
Vivek Murthy défend également l'idée d'une action concertée à l'échelle internationale pour le renforcement des liens sociaux chez les jeunes afin de lutte contre ce qu'il a défini dans un récent rapport comme une "épidémie de solitude".