Rafalite aiguë

Un avion Rafale décolle pour la Syrie depuis une base située dans le Golfe pour une mission de reconnaissance, le 8 septembre 2015.

Depuis la signature du contrat Rafale en Inde, un mal étrange semble toucher certains chroniqueurs ou blogueurs spécialistes des questions de défense : la rafalite aiguë. On a même lu que ce contrat marquait «la déroute des pisse-vinaigre, adeptes du masochisme national». Les symptômes en sont bouffées patriotiques et disparition de la moindre trace d’esprit critique. C’est le syndrome Top Gun qui se traduit par une fascination immodérée pour tout ce qui porte Ray-Ban et vole à Mach 1,8 ; pour les militaires en général et les industriels qui les équipent.

C’est de bonne guerre : il faut reconnaître à Dassault une sacrée opiniâtreté vu le nombre de déboires rencontrés en Inde par les négociateurs français. Il faut saluer aussi le rôle du ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, qui n’a pas hésité à mouiller sa chemise pour arracher cette commande qui assure des emplois en France. Mais enfin c’est bien le moins ! Le Rafale est un avion ultra-sophistiqué qui a été développé, certes pour équiper l’armée française, mais aussi et surtout pour maintenir en vie la maison Dassault. Depuis les années 80, l’Etat, et donc le contribuable, y a consacré des milliards et des milliards. Ce projet 100 % français a par ailleurs empêché la mise sur pied d’un programme d’avion de combat européen, et il a pris au fil du temps un tel poids dans le budget de la Défense que l’aéronautique française a dû renoncer à se lancer dans la production de drones, LE système d’armes moderne.

Pour vendre ses équipements militaires à des pays comme l’Egypte et le Qatar, l’Etat français a par ailleurs dû accepter des compromis dont nous ne connaissons pas encore toute la portée et l’on n'en sait encore bien peu sur ces fameux «offsets» (compensations) exigés à hauteur de 50 % dans le contrat conclu avec l’Inde. Bref, avant de pousser leur cri de guerre, peut-être certains devraient-ils ôter leurs Ray-Ban.



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