Rachida Dati ministre de la Culture : avant d’être nommée, l’ex-garde des Sceaux avait inspiré les artistes

Avant d’en être la ministre, Rachida Dati (ici en 2010) a beaucoup inspiré la (pop) culture
JOHN THYS / AFP Avant d’en être la ministre, Rachida Dati (ici en 2010) a beaucoup inspiré la (pop) culture

POLITIQUE - Est-ce dû à son franc-parler et à sa répartie légendaires ? À une détermination sans faille qui a conduit cette fille d’immigrés aux revenus modestes à intégrer l’École nationale de la magistrature puis à être nommée ministre de la Justice en 2007 à seulement 41 ans ? Ou bien à son attrait revendiqué pour une forme de « bling-bling » et les grands couturiers ?

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Rares sont les membres du gouvernement à avoir, autant que Rachida Dati, font l’objet d’autant de références dans la culture populaire. Comme un symbole, le mensuel culturel et branché Technikart s’interroge, en 2020, alors que la mairie du VIIe arrondissement vient de lancer sa candidature pour les municipales à Paris : « Comment ne pas aimer Rachida Dati ? »

En réalité, le phénomène a commencé peu de temps après l’entrée de la ministre dans le gouvernement de François Fillon. En 2009, le groupe électro Sexy Sushi publie l’album Tu l’as bien mérité !, sur lequel figure une chanson particulièrement subversive intitulée A bien regarder ; Rachida.

Dans le titre, la leader lesbienne du groupe Rebeka Warrior fantasme sur la ministre de la Justice dans des termes particulièrement explicites. « À bien regarder, j’aime ta position/Les jambes croisées, jupe ou pantalon […] / Rachida, mon petit chat/T’as besoin que d’un seul doigt/Pour m’envoyer en prison », chante l’autrice du texte.

La chanson est devenue, au fil des ans, l’un des titres phares de Sexy Sushi. Sans doute parce que son texte ne se prive pas, quelques vers plus loin, de critiquer la politique menée par la droite de Nicolas Sarkozy à l’époque : « Votez pour moi vous serez récompensés/Je vais transformer le pays en charnier/Et vous exploiter pour ensuite vous supprimer. »

Les rappeurs s’en donnent à cœur joie

De critiques, il en est également question dans un morceau du groupe de rap Sniper sorti en juillet 2011. La chanson Fadela, critique les responsables qui trahissent leurs origines pour accéder au pouvoir. « On t’a donné une bonne place/T’as oublié ta vie, t’as oublié ta race », dénonce le groupe composé de Tunisiano et d’Aketo, citant explicitement « Fadela » Amara, secrétaire d’État chargée de la Politique de la Ville dans le gouvernement François Fillon de 2007 à 2010, et « Rachida » Dati. Or, rappelle Sniper, pour les « fafs » – militants d’extrême droite –, « t’auras toujours le même blaze ».

Le morceau fait grand bruit, d’autant que quelques années plus tôt, Nicolas Sarkozy alors ministre de l’Intérieur, avait pris à partie les membres du groupe, les qualifiant de « voyous qui déshonorent la France ». Ambiance.

Deux ans plus tôt, les rappeurs Dirty Dahn et Richie Rich, publient au contraire une ode à celle qui vient de quitter le ministère de la Justice. « T’as trop de classe, t’as trop le style/Peu importe ce que disent les gens », déclament-ils dans Amoureux de Rachida. Dans un clip parodique et rempli de second degré, les deux rappeurs amateurs font une véritable déclaration à la garde des Sceaux.

Quelques mois plus tard, après un lapsus de celle qui est désormais députée européenne – elle parle de « fellation » au lieu d’« inflation » – le duo récidive pour lui apporter son soutien avec Amoureux 2 Rachida. L’élue est interrogée sur le morceau en direct sur France Inter : « Je trouve ça assez sympathique. Ces deux personnes avaient déjà fait un rap […] quand j’avais été fortement attaquée et c’est plutôt gentil », déclare-t-elle au micro de Pascale Clark.

Le récent morceau Rachida Dati de L’Don, publié en janvier 2023, montre que l’influence de la nouvelle ministre aura traversé les décennies dans le rap. Tout comme son image d’amatrice de marque de luxe. « Mes concurrents, j’les aplatis/Pour m’embourgeoiser comme Rachida Dati », rappe l’artiste, qui lâche ensuite une insulte à l’endroit de la nouvelle ministre de la Culture.

Au-delà du monde de la musique, Rachida Dati a aussi été représentée au cinéma et dans la littérature. Dans La Conquête, film sorti en 2011 qui retrace l’ascension de Nicolas Sarkozy jusqu’à l’Élysée, elle est incarnée par Saïda Jawad. Un homme ça ne pleure pas, quatrième roman de Faïza Guène publié en 2014 aux éditions de La Loupe, raconte l’histoire des Chennoun, une famille algérienne installée à Nice. La fille aînée, Dounia, est un sosie de Rachida Dati.

Quand Rachida Dati voulait faire interdire une BD

Dans le rayon des livres, il faut également citer la BD satirique Rachida, aux noms des pères, d’Yves Derai, Bernard Swysen et Marco Paulo. « S’appuyant sur une enquête rondement menée par un mystérieux détective qui cherche à découvrir l’identité du père de sa fille Zohra, les auteurs revisitent avec humour l’incroyable parcours de la “beurette de Chalon-sur-Saône”, celle qui rêve désormais de s’installer à l’Hôtel de ville de Paris », résume l’éditeur, 12 Bis, en quatrième de couverture.

À sa sortie en 2013, Rachida Dati saisit la justice pour demander l’interdiction du livre. Elle sera déboutée par le juge des référés de Versailles, selon lequel la BD « ne dépasse pas les lois de la satire politique ».

Aujourd’hui à la tête d’un monde de la culture qui l’a souvent moquée et se montre aujourd’hui sceptique face à sa nomination, Rachida Dati promet de ne pas être rancunière. Dans son premier discours rue de Valois, la ministre a promis de mettre ses punchlines au service des artistes. « Je serai toujours là pour défendre cette exception culturelle », a-t-elle déclaré avant de raccompagner Rima Abdul-Malak vers la sortie.

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