Les Républicains: Éric Ciotti démet Aurélien Pradié de son poste de numéro 2 du parti

Eric Ciotti et Aurélien Pradié. - AFP
Eric Ciotti et Aurélien Pradié. - AFP

La crise couvait depuis plusieurs semaines: le président des Républicains Éric Ciotti a annoncé samedi démettre de ses fonctions son numéro 2 Aurélien Pradié, ouvertement opposé à un pan de la réforme des retraites pourtant soutenue par LR.

"Ses prises de positions répétées (n'étaient) plus conformes avec les valeurs de cohérence, d'unité et de rassemblement qui doivent guider la droite républicaine", a justifié le patron des LR dans un communiqué, dénonçant une "aventure personnelle".

La crise couvait depuis des semaines et éclate tout à fait au lendemain de la fin de l'examen tumultueux de la réforme au Palais Bourbon.

Des lignes divergentes sur la réforme des retraites

Alors qu'Éric Ciotti et Olivier Marleix, chef du groupe LR à l'Assemblée, soutiennent depuis des semaines le projet gouvernemental de réforme des retraites qui ferait passer l'âge légal de départ de 62 à 64 ans, Aurélien Pradié, qui occupait la place de vice-président exécutif du parti, conditionne ouvertement son soutien à la réforme à des avancées strictes sur le dispositif des carrières longues.

Le député du Lot entend obtenir du gouvernement l'assurance stricte que toute personne qui entre sur le marché du travail avant 21 ans puisse partir à la retraite à taux plein après avoir cotisé 43 annuités, et ce sans que l'âge légal de départ ne constitue une barrière.

Si le gouvernement a semblé faire un pas en ce sens à plusieurs reprises, d'abord par des déclarations de la première ministre Elisabeth Borne, puis par des propos dans l'hémicycle d'Olivier Dussopt, Aurélien Pradié comme d'autres députés LR ont considéré que les garanties apportés par l'exécutif n'écartaient pas totalement la possibilité pour certaines personnes effectuant des carrières longues de devoir cotiser 44 annuités.

Une position finalement reprise vendredi dans un amendement de son groupe, et même par Horizons, au point que les oppositions de gauche ont salué les prises de parole du député dans l'hémicycle.

"Qu'il soit applaudi par la Nupes a été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase", explique-t-on dans l'entourage d'Eric Ciotti, exaspéré aussi par les atermoiements d'Aurélien Pradié sur un amendement dont il était pourtant cosignataire.

Le président du parti, qui a pris sa décision vendredi soir après avoir sondé le groupe, a annoncé sa décision à Aurélien Pradié par SMS, n'ayant pu le joindre par téléphone.

Réaction d'Aurélien Pradié

"Le seul sort qui compte, c'est celui des Français pour lesquels nous sommes engagés. Des convictions, ça se défend. Sans relâche", a tweeté Aurélien Pradié samedi, quelques minutes après la parution du communiqué LR.

Éric Ciotti et Aurélien Pradié avaient ferraillé lors des élections pour la présidence du parti, avec le président des sénateurs LR Bruno Retailleau. Après sa victoire, Éric Ciotti avait annoncé le 18 janvier qu'il se doterait d'une équipe dirigeante incluant Aurélien Pradié en tant que vice-président exécutif.

Les proches du sénateur Bruno Retailleau, qui avait lui-même appelé à la destitution d'Aurélien Pradié il y a une semaine, ne cachaient pas leur satisfaction. "On ne peut pas être dedans et dehors", a affirmé à l'AFP Othman Nasrou, premier secrétaire général délégué du parti, tandis que le sénateur Stéphane le Rudulier saluait une "clarification idéologique qui réfute un pseudo travaillisme socialo-occitan".

"Enfermé dans le rôle de l'opposant interne"

Avec ses positions tranchées et sa parole parfois rugueuse, Aurélien Pradié exaspérait l'aile libérale et conservatrice du parti, notamment les sénateurs inquiets de voir chaque concession sur les retraites détricoter un texte très proche de leurs propres souhaits.

Son omniprésence dans les médias a aussi irrité. "Aurélien Pradié est un élu de talent mais il s'est malheureusement enfermé dans le rôle de l'opposant interne et du provocateur au risque de tous nous fragiliser", affirme l'eurodéputée Agnès Evren.

Dans son communiqué, Eric Ciotti a aussi déploré une "aventure personnelle", qui "ne peut se substituer à l'action collective et à l'esprit de responsabilité". Une interprétation que récusent les proches du député du Lot: "Aurélien Pradié c'est un collectif sur des valeurs", assure son collègue du Haut-Rhin Raphaël Schellenberger, alors que le député du Lot défend une droite populaire se réclamant de Jacques Chirac.

"Il a saturé les médias au mépris du collectif!" rétorque, exaspéré, un cadre du parti, où certains le soupçonnent d'avoir voulu préempter le rapport de force avec Matignon: Aurélien Pradié a longuement été appelé par le cabinet d'Elisabeth Borne le week-end dernier. Au point de fragiliser la position du nouveau président du parti? Un cadre salue un "acte d'autorité" envers le numéro 2, nommé à ce poste après avoir réuni 22% des voix au premier tour de l'élection à la tête de LR en décembre.

Il partageait ce fauteuil avec François-Xavier Bellamy, proche du sénateur Bruno Retailleau qui s'était lui hissé en finale de l'élection. Quant à une exclusion du parti, elle ne semble pas à l'ordre du jour. "Il n'est pas exclu de LR", assure la secrétaire générale Annie Genevard, pour qui Aurélien Pradié "partage les valeurs" du parti... mais pas le sens du collectif".

Article original publié sur BFMTV.com