Réforme des retraites : l’examen au Sénat ne sera pas de tout repos pour le gouvernement

L’examen de la réforme des retraites au Sénat ne sera pas de tout repos pour le gouvernement
L’examen de la réforme des retraites au Sénat ne sera pas de tout repos pour le gouvernement

POLITIQUE - L’acte II commence, le rideau peut se lever. Enfin presque. Après les discussions chaotiques de l’Assemblée nationale suivie d’une semaine de pause parlementaire, le projet de réforme des retraites débute son parcours au Sénat par un examen en commission, à huis clos, ce mardi 28 février. Le texte rejoindra l’hémicycle deux jours plus tard, jeudi, pour un débat de quinze jours au total.

Réputée plus policée, la Haute assemblée prend la main après les scènes éruptives au Palais Bourbon et un enlisement qui n’aura pas permis aux députés d’aller jusqu’au vote. Bonne nouvelle pour le camp présidentiel, au-delà de cet environnement sans doute plus paisible : le rapport de force lui est beaucoup plus favorable. La majorité de droite, et du centre, soutient le principe du report de l’âge de départ en retraite à 64 ans.

De quoi promettre au gouvernement une promenade de santé pour cette deuxième manche ? Pas vraiment. L’examen à l’Assemblée a révélé plusieurs zones d’ombre dans le texte, sur la retraite à 1 200 euros ou les carrières longues. Autant de failles que l’opposition déterminée au Sénat compte bien exploiter. Mais ce n’est pas tout. Les Républicains n’ont pas prévu de faire de cadeaux à l’exécutif non plus.

L’opposition de la gauche, les conditions de la droite

Car c’est bien là, l’autre particularité du Sénat. Les troupes du président de la République y sont très minoritaires, le groupe présidé par François Patriat, macroniste de la première heure, ne compte que 24 âmes. Les partis politiques traditionnels composent le gros de l’effectif des 348 sénateurs.

D’un côté, la gauche qui ne veut pas de la réforme. Forte d’une petite centaine de sénateurs, entre les groupes PS, CRCE à majorité communiste et écologiste, elle a les moyens de faire durer les débats. La stratégie n’est pas encore complètement arrêtée, mais se profilent déjà plusieurs motions pour rejeter le texte, le renvoyer en commission, ou solliciter un référendum, sans compter les nombreux amendements. Le tout, avec la préoccupation de tenir un débat sur « le fond ».

« L’ensemble de la gauche sénatoriale va déposer entre 1 200 et 1 500 amendements, soit dix fois moins qu’à l’Assemblée nationale. Des amendements de fond », relève le chef de file des socialistes Patrick Kanner, dans un entretien aux Échos, pour mieux mettre à distance le tumulte à l’Assemblée, « nous ne voulons pas que les débats tournent au spectacle. »

De l’autre, une droite favorable à un projet « nécessaire », comme le soutiennent en chœur les chefs de file LR Bruno Retailleau et centriste Hervé Marseille ou encore Claude Malhuret, soutien affiché d’Édouard Philippe, mais qui aura à cœur de mettre sa patte sur le texte du gouvernement. Un projet à peine effleuré par les députés et dont les LR du Sénat revendiquent quasiment des droits d’auteur.

« Le gouvernement est venu sur les positions de la majorité sénatoriale », répète le président de la Haute assemblée Gérard Larcher. Malgré cela, les carrières longues, l’emploi des seniors, les petites retraites, la pénibilité, les femmes… Sont autant de sujets qui pourront déboucher sur des passes d’arme entre les figures sénatoriales, de gauche ou de droite, et les ministres Olivier Dussopt ou Gabriel Attal.

Le gouvernement essaie de déminer

Bruno Retailleau a d’ailleurs dressé sa feuille de route, dimanche 26 février, dans les colonnes du Parisien, évoquant des « exigences » à satisfaire et des « injustices » à « réparer ». Le Vendéen propose par exemple un départ anticipé à 63 ans ou à 64, mais avec surcote, pour les « mères de famille », au nom d’une politique « nataliste ambitieuse. » Il prône également des « mesures concrètes pour favoriser l’emploi des seniors », considérant que l’index voulu par l’exécutif ne sert pas à grand-chose.

Dans ce contexte, le gouvernement se montre favorable aux discussions avec la droite et ouvert à ses propositions, comme depuis la présentation du texte, soucieux de ménager cet allié de circonstance qui lui est indispensable pour faire voter son projet. « Nous sommes à l’écoute des sénateurs, (...), prêts aussi à amender, à modifier, à améliorer notre texte », assurait Olivier Véran la semaine dernière sur France Inter, en citant, justement la question de l’emploi des plus âgés.

Olivier Dussopt lui a embrayé le pas, dimanche, sur BFMTV. « Nous sommes d’accord et ouverts », a expliqué le ministre du Travail, sur le point précis de la retraite des femmes soulevé par Les Républicains, en prévenant toutefois qu’« avoir des âges de départ différenciés entre les femmes et les hommes, ce n’est pas très juste ».

À gauche, la ligne est plus claire. Pas d’insoumis ni d’étiquette Nupes au Sénat, mais la farouche opposition au report de l’âge légal, et la volonté d’en discuter dans l’hémicycle. Existe en revanche un doute sur la marche à suivre, avec une quasi-certitude : si le projet est mis au vote dans deux semaines, il sera adopté. De quoi prévoir de nouveaux maux de tête au Parlement, et pas dans la majorité uniquement.

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