« Le Règne Animal » de Thomas Cailley : Romain Duris se sent plus proche des animaux que des humains

CINÉMA - Et si l’homme redevenait un animal comme un autre ? Dans Le Règne Animal de Thomas Cailley, au cinéma ce mercredi 4 octobre, une épidémie de mutations génétiques transforme peu à peu certains humains en animaux. Romain Duris y joue François, dont la femme est touchée par cette maladie étrange.

Lorsqu’un nouveau centre spécialisé pour les créatures ouvre dans le sud de la France, il déménage avec Émile, son fils de 16 ans (Paul Kircher) pour la suivre. Mais lors du transport des patients, un accident du convoi laisse s’échapper des créatures dans la nature. François va tout faire pour retrouver sa femme, avec l’aide d’Adèle Exarchopoulos qui incarne une gendarme très investie.

Le film de Thomas Cailley est un mutant dans le paysage cinématographique français, à la croisée des genres entre film fantastique, drame familial avec des touches de comédie, et récit sur l’adolescence façon « coming of age movie ».

Pour le réalisateur, c’est « un film de genres au pluriel ». « J’aime bien que tout ça se marie, l’intime, le spectaculaire, l’action, la comédie », explique-t-il au HuffPost dans l’interview vidéo en tête d’article.

Romain Duris en communion avec la nature

Tourné dans les landes de Gascogne, Le Règne Animal se regarde comme une ode à la nature et au vivre-ensemble. Les mutations physiques, effrayantes aux premiers abords, sont petit à petit apprivoisées à l’écran, jusqu’à en devenir poétiques. « En tant qu’acteur ou spectateur, je remarque qu’on a envie de faire partie du monde animal », estime Romain Duris. « Plus j’étais proche des gens qui se transforment, plus j’étais heureux ».

Pour le réalisateur également, cette histoire fantastique relève davantage de l’utopie que de la dystopie. « On vit aujourd’hui dans un monde qui se raréfie. On voit bien qu’il y a un effondrement de la biodiversité », constate Thomas Cailley. « Pour moi le film montre exactement l’inverse, un monde plus riche, plus divers, où il y a plus de différences et de variétés. C’est presque un souhait ».

Un monde en mutation pour Thomas Cailley

Si les créatures sont filmées avec douceur, le film illustre aussi les réactions parfois violentes d’une société qui fait face à une situation inconnue. Des tags « pas de bestioles ici », apparaissent sur les murs du centre hospitalier, le voisinage distribue des t-shirts anti-créatures et au lycée, Émile préfère raconter que sa mère est décédée plutôt que de révéler qu’elle a muté.

« La façon dont la société réagit, elle est diverse, elle aussi », explique le réalisateur. « Il y a effectivement des pulsions sécuritaires et violentes. Mais il y a aussi des actes d’amour absolu, de solidarité », tient-il à rappeler. Plutôt qu’apporter une réponse morale, il souhaite avec son film poser une question : « Que fait-on de ce vivre-ensemble ? Comment est-ce que l’on cohabite ».

À travers François, il montre un monde lui aussi en pleine mutation, qui doit s’adapter à ces changements. Par amour pour sa femme et son fils, le personnage joué par Romain Duris opte pour la bienveillance : « Sa force, c’est déjà assez tôt d’accepter de vivre avec les bêtes et de les aimer », détaille Romain Duris. Au contraire, l’intolérance d’autres personnages face à l’ouverture du centre pour créatures n’est pas sans rappeler l’accueil violent trop souvent réservé aux migrants en Europe.

Les landes de Gascogne ont servi de décor naturel au tournage du « Règne Animal », avant d’être dévastées par un incendie.
Studiocanal Les landes de Gascogne ont servi de décor naturel au tournage du « Règne Animal », avant d’être dévastées par un incendie.

« Le Règne Animal » fait écho à la réalité

Et ce n’est pas le seul parallèle avec l’actualité. La pandémie de mutations génétiques dans le film résonne avec celle bien réelle du Covid-19, qui a commencé un an après le début de l’écriture du scénario. Thomas Cailley a même d’abord pensé qu’il n’y avait « plus aucun intérêt de faire ce film » car la réalité était devenue plus forte que la fiction.

« C’est devenu beaucoup plus intéressant quand la société a commencé à accepter de vivre dans cet état un peu particulier où c’est là, ce n’est pas là, on se confine, on se déconfine, on fait semblant que tout va bien », raconte-t-il. « C’est précisément ce qu’il se passe dans le film : on fait tout pour continuer à vivre des vies normales alors que le monde est devenu fou ».

Et le tournage a lui aussi été perturbé par une autre actualité : les feux de forêt de l’été 2022, qui ont ravagé certains décors naturels. « Avant le gigantesque incendie de Gironde, on avait eu la canicule, la sécheresse et des orages violents totalement imprévus. Le tournage entier a été baigné dans l’atmosphère du changement climatique », raconte Thomas Cailley.

Le Règne Animal offre un futur finalement plus attrayant que la réalité pour l’acteur et le réalisateur. Tous deux se verraient d’ailleurs bien se transformer en l’animal de leur choix : un panda roux pour Thomas Cailley et un héron cendré pour Romain Duris, « pour prendre la hauteur ».

À voir également sur Le HuffPost :

Le film « Le procès Goldman » raconte le procès du frère Goldman auquel on pense moins

« The Creator » : pour le réalisateur Gareth Edwards, l’IA est un outil qu’il faut encadrer « comme une arme à feu »