Qu’est-ce que l’immunité parlementaire ?

Députés dans l'hémicycle lors du rejet d'une motion de censure à l'Assemblée Nationale le 20 mars 2023 à Paris. (Photo by Victor LOCHON/Gamma-Rapho via Getty Images)
Députés dans l'hémicycle lors du rejet d'une motion de censure à l'Assemblée Nationale le 20 mars 2023 à Paris. (Photo by Victor LOCHON/Gamma-Rapho via Getty Images)

L’immunité parlementaire de Damien Abad, ex ministre des Solidarités et député, visé par une enquête préliminaire du parquet de Paris pour “tentative de viol”, a été levée par le bureau de l’Assemblée nationale. Mais de quoi parle-t-on ?

De par leur fonction, les députés et sénateurs français ne sont pas tout à fait des justiciables comme les autres. Ils bénéficient de l’immunité parlementaire, qui leur permet d’échapper notamment à la garde à vue. Dans le cas de Damien Abad, ancien ministre des Solidarités et actuel député de l’Ain, son immunité a été levée mercredi 24 mai par le bureau de l'Assemblée nationale. A quoi correspond l’immunité parlementaire et qu’est-ce que change sa levée ?

L’immunité parlementaire est définie à l’article 26 de la Constitution. Elle a été instituée pour qu’un député ou un sénateur puisse librement exprimer ses opinions dans le cadre de son mandat, sans s’exposer à des poursuites arbitraires ou politiques. “Loin d’être un privilège, c’est une mesure d’ordre public instituée dans l’intérêt du fonctionnement de la démocratie”, précise le site de l’Assemblée nationale.

Les principes d'irresponsabilité et d'inviolabilité

Le premier volet de l’article consacre l’irresponsabilité d’un parlementaire, aussi appelée immunité fonctionnelle ou immunité de fond. “Aucun membre du Parlement ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l'occasion des opinions ou votes émis par lui dans l'exercice de ses fonctions”, peut-on lire à l’article 26. Les votes et paroles des parlementaires sont donc protégés par la loi. En revanche, les coups et blessures contre un autre parlementaire ne rentrent pas dans ce cadre.

Le second principe de l’immunité est l'inviolabilité. “Aucun membre du Parlement ne peut faire l'objet, en matière criminelle ou correctionnelle, d'une arrestation ou de toute autre mesure privative ou restrictive de liberté qu'avec l'autorisation du Bureau de l'assemblée dont il fait partie”, précise le même article. Sont concernés ici tous les actes détachables de la fonction parlementaire, comme un viol commis dans le cadre privé. Le texte apporte une nuance : “Cette autorisation n'est pas requise en cas de crime ou délit flagrant ou de condamnation définitive."

Une garde à vue possible

Comme l’immunité parlementaire est d’ordre public, un parlementaire ne peut pas y renoncer. Cependant, elle peut être levée avec l’autorisation du Bureau de l’Assemblée nationale pour un député ou du Bureau du Sénat pour un sénateur. Le parlementaire concerné peut alors faire l’objet d’une mesure privative ou restrictive de liberté, comme la garde à vue, pour des actes relevant de sa vie privée. Il reste protégé par le principe de l’irresponsabilité relatif à sa fonction de parlementaire, et ce même s’il n’est pas réélu ensuite.

A la suite de la levée d’immunité demandée par la justice le 3 avril dernier dans le cadre de l’enquête préliminaire pour “tentative de viol” concernant Damien Abad, le député pourrait donc être placé en garde à vue par les enquêteurs. Le député s'était dit "favorable" à la levée de son immunité et réclamait d'"être entendu par la justice comme n'importe quel autre citoyen et ce, sous quelque régime que ce soit (...) pour laver [son] honneur”.

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