Qu'est-ce que la dissolution de l'Assemblée nationale, annoncée par Emmanuel Macron ?

Le président de la République a annoncé la dissolution de l'Assemblée nationale ce dimanche, après les résultats des Européennes donnant Jordan Bardella largement en tête.

Le président de la République Emmanuel Macron a annoncé la dissolution de l'Assemblée nationale ce dimanche, après les résultats des Européennes. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le président de la République Emmanuel Macron a annoncé la dissolution de l'Assemblée nationale ce dimanche, après les résultats des Européennes. (Photo Ludovic MARIN / AFP)

Emmanuel Macron a mis a exécution la demande du Rassemblement national. Après les résultats historiques du parti d'extrême droite, le président de la République a annoncé la dissolution de l'Assemblée nationale, comme Jordan Bardella le réclamait depuis plusieurs semaine en cas de victoire.

Mais à quoi fait référence le président de la République ? Tout simplement à l'article 12 de la Constitution de 1958, qui stipule que "le Président de la République peut, après consultation du Premier ministre et des Présidents des Assemblées, prononcer la dissolution de l'Assemblée nationale". Le texte constitutionnel prévoit d'ailleurs un certain nombre de modalité d'applications.

Le principe de la dissolution est très simple : par décision unilatérale, le chef de l'Etat révoque tous les députés en place et remet leur mandat en jeu. D'un point de vue pratique, de nouvelles élections législatives se tiendront donc le 30 juin et le 7 juillet, a annoncé le président de la République. À noter que, pour éviter tout excès, il est impossible de procéder à une nouvelle dissolution dans l'année qui suit ces élections.

Le rythme du calendrier des élections nationales en est par ailleurs chamboulé, avec un décalage entre les élections présidentielles et législatives qui n'existait plus depuis les années 1990. Le scrutin suivant sera en effet mécaniquement repoussé à l'année 2029... sauf en cas de nouvelle dissolution.

La procédure permettant de révoquer le parlement n'est pas une spécificité de la Ve République. Elle est ainsi apparue dans notre pays quelques années seulement après la Révolution française et l'instauration du régime parlementaire, pendant la période de la Ière République (1792-1804).

Au moment d'élire Bonaparte consul à vie en 1802, le Sénat lui donne également le pouvoir de mettre fin au mandat de deux des trois chambres législatives en place. Dès l'origine, donc, la dissolution est pensée comme une possibilité pour un monarque de redistribuer la composition d'un parlement qui ne lui convient pas ou plus.

C'est d'ailleurs par ce biais que la procédure va s'installer dans les habitudes politiques du pays au cours du XIXe siècle. Elle fera ainsi office de garantie et d'instrument de contrôle pour les rois successifs pendant la Restauration, puis la Monarchie de Juillet, avant d'être également utilisée par Napoléon III sous le Second Empire.

Survivant à la chute de ce dernier, la procédure de dissolution apparaît à nouveau dans la Constitution de la IIIe République. Pour la première fois, d'ailleurs, elle concerne une assemblée élue au suffrage universel direct, qui pourra être dissoute sur décision du Président de la République, avec l'aval du Sénat.

Les députés choisis par le peuple peuvent donc à tout moment être révoqués par deux autorités (Président de la République et Sénat donc) ayant été désignées au suffrage indirect. La dissolution devient ainsi un outil au service de manigances politiciennes, avec deux utilisations dès les débuts du nouveau régime, en 1871 et 1877.

Après cette date, elle n'a cependant plus jamais été employée dans le cadre de la IIIe République. Elle le sera une fois seulement sous la IVe République (en 1955), avant de devenir un recours plutôt utile pour le chef de l'Etat dans le régime très vertical de la Ve République.

En 66 ans, l'Assemblée nationale a ainsi été dissoute à cinq reprises avant l'annonce d'Emmanuel Macron ce dimanche : deux fois par Charles de Gaulle (en 1962 et 1968), deux fois par François Mitterrand (en 1981 et 1988, à chaque fois dans la foulée de sa victoire à l'élection présidentielle, dans le but d'obtenir la majorité à l'Assemblée) et une fois par Jacques Chirac (en 1997, avec un échec et une cohabitation à la clé).