Qu'est-ce que la créolisation, concept qui oppose Mélenchon et Zemmour ?

Le concept de créolisation a été développé par le poète et écrivain Édouard Glissant, pour définir un mélange de culture qui crée quelque chose de nouveau.

"Quel que soit notre genre, quelle que soit notre couleur de peau ou notre religion, nous sommes appelés à nous aimer. Et alors, nous mettons en commun nos goûts et nos cultures. C'est cela, la créolisation. La créolisation est l'avenir de l'humanité", clame Jean-Luc Mélenchon durant ses meetings et interviews depuis plusieurs mois.

Un concept que renie Éric Zemmour qui estime que "le grand remplacement et la créolisation sont des termes synonymes. C'est le même phénomène que l'on décrit", expliquait le candidat désormais officiel à la présidence de la République en septembre dans son émission sur CNews.

"C’est un métissage d’arts ou de langages qui produit de l’inattendu"

À l'origine de la popularité de ce concept, il y a le poète et écrivain martiniquais Édouard Glissant, qui a développé l'idée de créolisation dans les années 80, avant que ce concept ne soit repris depuis plus d'un an par Jean-Luc Mélenchon sur conseil de l’eurodéputé LFI Younous Omarjee.

"La créolisation, c’est un métissage d’arts, ou de langages qui produit de l’inattendu. (...) C’est la création d’une culture ouverte et inextricable, qui bouscule l’uniformisation par les grandes centrales médiatiques et artistiques. Elle se fait dans tous les domaines, musiques, arts plastiques, littérature, cinéma, cuisine, à une allure vertigineuse…", expliquait l'écrivain aujourd'hui disparu au Monde 2 en 2005.

Un mot basé sur l'histoire créole

Dans l'esprit d'Édouard Glissant, le mot "créolisation" définit donc un mélange des cultures qui crée quelque chose de nouveau, qui n’appartient à aucune des cultures qui la compose.

À l'origine de ce mot, il y a l'expérience créole. Car la colonisation des Amériques, des Caraïbes et des îles de l'océan Indien ont fait se rencontrer des peuples de cultures diverses, entre indigènes, africains déportés et colons européens.

"La créolisation du monde est irréversible"

`"Ils ont dû apprendre à vivre ensemble et à trouver une sorte de culture commune, de mode de vie commun. L'esclavisé n'avait pas la même langue, donc une langue s'est créée à la rencontre de toutes les langues : africaine, amérindienne, européenne. Une vraie langue, pas un jargon", explique à Slate Françoise Simasotchi-Bronès, professeure des universités en littératures francophones à l'université Paris 8 et co-autrice du livre Archipels Glissant.

Selon Édouard Glissant, interrogé en 2005, l'Europe se créolise. "Elle possède plusieurs langues et littératures très riches, qui s’influencent et s’interpénètrent, tous les étudiants les apprennent, en possèdent plusieurs, et pas seulement l’anglais", illustrait-il toujours dans Le Monde 2, ajoutant que "la créolisation du monde est irréversible".

Pour Mélenchon, c'est "une alternative au modèle de la société segmentée à l’américaine"

Interrogé par Le Parisien sur sa définition de créolisation, Jean-Luc Mélenchon détaille : "La créolisation n’est pas une nuance à l’universalisme, elle en est au contraire le chaînon manquant (...) La créolisation est une alternative au modèle de la société segmentée à l’américaine, et à celui de la culture dominante qui demande la soumission de toutes les autres".

À l'opposé, Eric Zemmour voit derrière l'utilisation du mot créolisation par le candidat insoumis un autre concept. "Quand Jean-Luc Mélenchon parle de créolisation de la société, en 2050, qu’est-ce qu’il dit ? Il prend un mot qui fait plaisir, on pense aux jolies Martiniquaises et au punch. Mais en vérité, ce n’est pas ça qui nous guette. Ce qui nous guette, ce sont les voiles et les kebabs hallal. C’est ça ! Ce n’est pas la créolisation, c’est l’islamisation", expliquait le pas encore candidat d'extrême droite, lors d'une université d'été fin août.

Un concept qui irrite jusqu'à gauche : la candidat du Parti communiste Fabien Roussel se dit opposé au concept de créolisation, comme Arnaud Montebourg. “Je crois que Jean-Luc Mélenchon a un problème dans sa vision de la République et je ne me retrouve pas dans sa "créolisation", dénonce le (futur ex ?) candidat de la Remontada.

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