Qu'est-ce que le collectif Némésis, défendu par l'extrême droite après une action coup de poing à Besançon ?

Elles se revendiquent féministes et identitaires et sont de plus en plus remarquées pour leurs actions coups de poing dans l'espace public.

Alice Cordier, présidente du Collectif Némésis, sur l'émission TPMP / Capture écran
Alice Cordier, présidente du Collectif Némésis, sur l'émission TPMP / Capture écran

"Violeurs étrangers dehors", "libérez-nous de l’immigration", ce sont les deux messages affichés sur des pancartes à Besançon et suspendues "sur une façade de la grande rue", lors du carnaval du 7 avril par des militantes du collectif Némésis qui ont valu une plainte pour "incitation à la haine" de la maire de la ville. L'une d'elles, Yona, a été placée en garde à vue ce mardi, avant d'être libérée. L’avocat du collectif annonce au Figaro qu'il va porter plainte pour "atteintes à la liberté individuelle".

  • Un collectif qui ne se retrouve pas dans les autres groupes féministes "gangrenés par l'extrême gauche"

Selon leur site Internet, Némésis est un collectif qui se pense "féminin et patriote", "féministes et anti-immigration", complète l'hebdomadaire d'extrême droite Valeurs actuelles.

Un collectif crée en 2019 car "nous ne nous retrouvons pas dans les autres groupes féministes car ces mouvements sont généralement gangrenés par l'extrême gauche et préfèrent se focaliser sur des thématiques anecdotiques (écriture inclusive, sexisme dans la pub…). Et ils ne traitent les violences que subissent quotidiennement les femmes (comme le harcèlement de rue) qu'en les noyant sous des concepts abstraits comme celui de patriarcat pour occulter le fait que nos agresseurs sont massivement d'origine extra-européenne", expliquait le collectif au média de "réinformation" Paris Vox.

  • Qui fait partie du collectif Nemesis ?

Il est composé de jeunes femmes âgées de 18 à 30 ans. À sa tête, sa fondatrice, Alice Cordier, formée à l’activisme au sein de l’Action française, dont elle ne renie pas l'héritage.

Une enquête de Libération pointe l’origine des militantes et leur proximité avec plusieurs groupes d’extrême droite : royalistes de l’Action française, anti-immigration de Génération identitaire ou encore et surtout étudiants du syndicat La Cocarde.

  • Protégés et soutenus par l'extrême droite

En manifestation, pour les protéger durant leurs coups d'éclat, le collectif Némésis peut compter sur l'organisation étudiante d'extrême droite la Cocarde étudiante, les Zouaves Paris, un groupuscule héritier du GUD, ainsi que de Génération identitaire, dissous en conseil des ministres.

Les actions du collectif sont souvent soutenues par des personnalités d'extrême droite : Jordan Bardella, Damien Rieu, Marion Maréchal ou encore Gilbert Collard et Mila, qui partage de nombreux contenus publiées par Alice Cordier, directrice du collectif Némésis. Dans l'entre-deux-tours, le collectif Némésis avait appelé à voter pour Marine Le Pen, après avoir notamment été vu du côté de meetings d'Éric Zemmour.

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L'une des militantes du collectif Némésis a même été embauchée par un député RN, Romain Baubry, comme le révèle StreetPress. Une autre, Yona, s'est vu remettre une médaille "pour acte de courage" par le sénateur Reconquête Stéphane Ravier. Le collectif est en outre descendu dans la rue pour s'opposer à la dissolution du groupuscule Générations identitaire.

  • Habitués des coups d'éclat aux relents racistes

Le carnaval de Besançon n'est qu'un coup d'éclat de plus de la part de ce collectif, qui s'est déjà distingué lors d'autres évènements publics. Lors de la braderie de Lille en 2023, le collectif Némésis mène plusieurs actions, comme le signale alors La Voix du Nord.

Une banderole est brandie : "Lille devient Saint-Denis. Qui est la cause de nos soucis ?", en référence à un classement douteux qui faisait de Lille la ville "la plus dangereuse" de France. Puis une autre sur la Grand place de Lille. "Lectures salafistes dans les lycées de votre ville, vous sentez-vous en sécurité à la braderie de Lille ?".

Des "lectures" qui en réalité ne concernent que le lycée Averroès de Lille, un établissement privé sous contrat avec l’État, contrat qui a depuis été rompu.

Le collectif Némésis multiplie également les infiltrations de cortèges féministes, donnant souvent lieu à des tensions voire des violences entre manifestantes. En 2021, lors de la manifestation annuelle de #NousToutes, des jeunes femmes du collectif avaient tenté de rejoindre le cortège avec des pancartes et banderoles xénophobes ciblant les étrangers, avant de se faire expulser manu militari par des groupes d’antifascistes présents ce jour-là.

En 2019, les "féministes identitaires" s’étaient également présentées à la manifestation avec des pancartes aux relents xénophobes comme "Femmes = frontières violables" ou encore "Cologne, Rotherham, bientôt Panam'", villes dans lesquelles des faits de viols avaient été attribués à des migrants.

  • S'affiche aux côtés de ministres

Autre mode d'action préféré du collectif Némésis, se faire prendre en photo aux côtés d'un ministre pour faire croire à un soutien. À la braderie de Lille, Alice Cordier, présidente de Némésis, avait posé aux côtés de Gérald Darmanin avant de tenter de l’interpeller dans la foulée sur "la non-application des OQTF". C’est à cet instant que le ministre de l’Intérieur avait coupé court à la conversation. De l’aveu même d’Alice Cordier, Gérald Darmanin ne savait pas qui elle était : "C’était un troll", a-t-elle assumé sur X.

Le collectif s'affiche aussi aux côtés de Jean-Michel Blanquer, ministre de l'Éducation au soir de la réélection d'Emmanuel Macron. Le ministre se défend et dénonce une "grossière manipulation". "Je ne partage rien avec eux. Je condamne aussi la vulgarité du procédé et des gestes", ajoute-t-il sur X.

  • Une présence médiatique accrue

Le collectif Némésis, et surtout sa présidente Alice Cordier sont de plus en plus invités dans les médias grands publics, sans pour autant que ne soit précisé leur positionnement à l'extrême droite.

On retrouve ainsi fréquemment Alice Cordier sur TPMP ou dans l'émission Les Grandes Gueules sur RMC, et désormais sur CNews.

  • Des poursuites en justice

Avant la maire de Besançon, qui a annoncé porter plainte pour "incitation à la haine raciale, manifestation et affichage non autorisés", d'autres poursuites en justice ont été amorcées.

Le déploiement d'une banderole à Lille a entrainé une plainte de la maire de la ville Martine Aubry (PS) pour "incitation à la haine raciale", de l'hôtel Carlton, d'où la banderole a été déployée pour "atteinte à l’image" et "mise en danger de la vie d’autrui". Alice Cordier a elle annoncé attaquer en diffamation les journaux La Voix du Nord et Libération pour des propos dans leurs articles sur l'événement.

Une enquête est également ouverte à la suite d’un signalement auprès du procureur de la République de Paris par l’association SOS Racisme pour "diffamation à caractère racial" et "provocation à la haine raciale" : une de leur affiche, barrée du slogan "Rapefugees not welcome" ("rape" pour viol en anglais et "refugees", réfugiés) met en scène une jeune femme blonde poursuivie par deux hommes, l’un noir, l’autre portant la barbe et des vêtements censés le désigner comme musulman.