PSG-Barça: comment les deux clubs ont placé la jeunesse au cœur de leurs projets (mais différemment)

Dix jours après s’être imposé (2-0) au Vélodrome, le Paris Saint-Germain s’apprête à disputer ce mercredi (21h, en direct sur RMC Sport 1) un nouveau classique, cette fois-ci en Ligue des champions, et ce sera face au Barça. La septième confrontation à élimination directe entre deux clubs aux destins liés revêt un caractère symbolique. Pour Kylian Mbappé, le très probable futur joueur du Real Madrid, tout d’abord, mais également pour le club de la capitale, qui espère à cette occasion chasser définitivement les fantômes du passé (2013, 2015, 2017) en terrassant son rival catalan.

Si les deux clubs partagent un vécu commun où se côtoient les moments de grâce et les désillusions et qu’ils n’ont jamais semblé lutter à ce point à armes égales avant de se rencontrer en C1, le PSG et le Barça se retrouvent aussi sur un point: leur volonté de faire place à la nouvelle génération. Mais leurs politiques, bien qu’animées des mêmes intentions, ne sont en revanche pas toujours adossées aux mêmes contraintes qui les obligent parfois, s’agissant du Barça notamment, à puiser dans leur centre de formation.

Les pépites du FC Masia

C’est une tendance que l’on commençait à entrevoir au Barça sous la férule de Ronald Koeman (2020-2021), et qui resurgit avec force depuis l’arrivée de Xavi Hernandez sur le banc. Après avoir été reléguée aux oubliettes par l’ancien président du club Josep Bartomeu, qui privilégiait le recrutement de joueurs confirmés au détriment de son centre de formation, la Masia est de retour au cœur du projet barcelonais sous l’égide de son successeur.

Cette saison, les quatre joueurs les plus jeunes à avoir débuté un match du championnat espagnol de première division appartiennent au Barça: Lamine Yamal (âgé de 16 ans et 1 mois lors de son premier match), Pau Cubarsi (16 ans, 11 mois et 30 jours), Hector Fort (17 ans, 5 mois et 25 jours) et Marc Giu (17 ans, 9 mois et 18 jours). Certains d’entre eux, comme Lamine Yamal et Pau Cubarsi, se sont même installés dans le onze titulaire à leurs postes respectifs. Le président Laporta en est certain: ces deux joueurs “vont marquer une époque". Une époque qu’il espère voir durer car cela signifierait le retour en grâce de ce qui constitue l’identité barcelonaise, son joyau.

"C'est ce que nous construisons, c'est ce que nous tirons des talents locaux de la Masia", revendiquait fièrement Xavi en janvier 2022.

"Il y a beaucoup de gens en coulisses qui ont travaillé pour que les garçons soient prêts. C'est le Barça, la Masia", complétait l'entraîneur, ex-milieu de terrain emblématique du club et pur produit du centre de formation barcelonais. Le technicien catalan a fait de cet engagement pour la jeunesse son cheval de bataille, et de l’équipe première un sol fertile pour ces talents dont regorge le centre de formation du club catalan.

"Moi, tu me parles pas d’âge", clamait en mai 2018 Kylian Mbappé. Il n’est pas certain que Xavi se soit inspiré de cette déclaration devenue une marque déposée, mais au Barça comme dans l’esprit fécond du prodige de Bondy, le pouvoir est donné aux méritants, quels que soient leurs âges. Xavi agit par conviction, mais l’entraîneur du Barça n’a jamais caché qu’il s’était aussi fait dicter sa politique par les circonstances au cœur d’une saison marquée par les blessures, et ce que la situation financière autrefois critique d’un club qui demeure surveillé lui imposait.

Le recours aux jeunes est devenu une nécessité au Barça qui, très récemment encore (Jules Koundé la saison dernière), n’a pas toujours pu signer les joueurs qu’il courtisait ou les enregistrer une fois qu’ils étaient recrutés. Pouvoir compter sur une Masia qui lui garantit des bases solides pour continuer à construire le présent et l’avenir en fournissant à l’équipe première des joueurs de talent pour un coût quasiment nul s’est révélé être une aubaine pour un club à la situation économique instable.

Au Barça, la jeunesse émergente est reine. Mais le principal atout du club catalan est aussi une arme à double tranchant. Car ce qu'il gagne en fougue et en insouciance, le FC Barcelone le perd aussi en expérience. Et à ce stade de la compétition, en Ligue des champions, elle demeure précieuse.

Une nouvelle ère à Paris, pour de bon?

7 janvier 2024. Nasser Al-Khelaïfi accueille les pensionnaires des centres de formation à Poissy, l’occasion pour le président parisien de s’enorgueillir de disposer du "meilleur centre de formation du monde". Et le président du club de formuler ce vœu: "Notre ambition est de faire grandir ici en France, ici à Paris, la nouvelle génération de champions." La philosophie consistant à se baser sur de jeunes éléments amenés à grandir dans la capitale n’est pas nouvelle. Par le passé, il a déjà été dit que le nouveau Messi grandirait à Paris.

"Il y a onze ans, j’ai dit que je voulais former le futur Messi, aujourd’hui je dis qu’on veut former le futur Mbappé, qui viendrait lui aussi de Paris", annonçait Al-Khelaïfi en 2022.

Le discours volontariste n’a pas souvent résisté à l’épreuve des faits. Le projet démesuré de QSI n’a pas toujours eu pour vocation non plus de faire la part belle aux jeunes joueurs, qu’ils soient issus du centre de formation ou recrutés à l’étranger, mais plutôt de faire briller la vitrine.

S’agissant des jeunes du club, les campagnes de présaison ont pu servir de manière discontinue à les mettre en valeur quand les stars manquaient à l’appel, mais une fois la Ligue 1 lancée, les cadres reprenaient leur place et l’environnement du club ne favorisait plus forcément la croissance des jeunes. Sous les ordres de Christophe Galtier, ils ont progressivement disparu du panorama à mesure que l’équipe avançait dans la saison et se rapprochait des échéances les plus importantes.

La donne a quelque peu changé cette saison, avec la fin des paillettes décidée par le propriétaire et l’exfiltration des derniers vestiges d’une époque que le PSG dit révolue. Le président Nasser Al-Khelaïfi a plusieurs fois décrété que s’achevait l’ère du bling-bling, annonçant l’instauration d’un nouveau cadre, sans que ce nouveau projet prenne forme. Mais l’avènement d’un nouvel ordre à Paris est peut-être arrivé en même temps que Luis Enrique.

Du temps où il était sélectionneur de la Roja, l’entraîneur asturien n’a jamais hésité à convoquer des jeunes pour les grandes échéances: Pedri à l’Euro 2021, Gavi lors de la Coupe du monde au Qatar. L’Espagne était d’ailleurs l’équipe la plus jeune du plateau lors du dernier Mondial, la plus jeune sélection espagnole au XXIe siècle.

Cela ne lui a pas franchement réussi, mais s’il est une chose que l’on ne peut pas reprocher à l’ancien coach de la réserve du Barça, c’est la mise en application de ce qu’il annonce.

"Mes actes diront ce que je pense", avait-il promis aux journalistes français.

La question ne concernait pas la jeunesse, mais elle intervenait après qu’il avait invité les jeunes parisiens à avoir "une ambition démesurée" lors de sa conférence de presse de présentation.

Warren Zaïre-Emery n’a pas attendu la signature de Luis Enrique pour battre les records de précocité et se faire un nom au PSG avant sa majorité, mais c’est bien sous les ordres du technicien espagnol qu'il est devenu un taulier à Paris. Bluffant de maturité et d’intelligence, Warren Zaïre-Emery a été promu capitaine de l’équipe de France Espoirs par Thierry Henry, puis appelé dans la foulée avec les A par Didier Deschamps alors que les arbres se préparaient à l'hiver.

"S’ils ont les qualités et les capacités, on peut les faire monter pour s’entraîner avec l’équipe première. C’est vraiment un bon test pour évaluer leur niveau", expliquait Luis Enrique avant un match contre Strasbourg, en février.

L’ancien sélectionneur de la Roja a donné des opportunités aux jeunes de se montrer cette saison. Senny Mayulu en a profité, avec des convocations de plus en plus régulières dans le groupe pour le milieu de terrain, qui a disputé quatre rencontres et inscrit un but. Très courtisé en Europe, le milieu offensif s’impatiente chez les U19, mais Paris a formulé une offre à son entourage, un geste qui témoigne de l’envie du club de conserver un talent brut. Mais il n’est pas le seul.

Le PSG insiste sur sa volonté à moyen terme de se développer autour de son centre d’entraînement mais également de bâtir son projet autour d’une jeunesse dorée dont il irait chercher les joyaux ailleurs. Ce qu’il a commencé dès 2022 en misant sur des jeunes joueurs talentueux à fort potentiel à des postes clés (Nuno Mendes, Beraldo, Tenas, Barcola, Gonçalo Ramos etc…).

Un pari qui s’est pour l’instant révélé gagnant. Cette saison, le PSG aligne son équipe la plus jeune depuis l’arrivée de QSI en 2011. Contre la Real Sociedad, au match retour, Luis Enrique a même composé l’équipe la plus jeune de l’histoire du club en Ligue des champions (23 ans et 361 jours de moyenne d’âge).

L’équipe du Paris Saint-Germain possède également la moyenne d’âge la plus basse parmi les clubs qualifiés en quarts de finale. Un handicap pour viser la victoire finale? "Je ne regarde pas l’âge où l’expérience, cela ne me dit rien", a évacué Luis Enrique le mois dernier. "Aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des années." Warren Zaïre-Emery en est un exemple éclatant. La citation extraite du Cid, le Titi parisien la connaît mieux que personne pour l’avoir déclamé en 2022 à l’occasion d’un concours d’éloquence, organisé chaque année par le PSG, sous les yeux de Kylian Mbappé. Un modèle pour cette jeunesse parisienne qui a soif de réussite.

Article original publié sur RMC Sport