Projet de loi sur la fin de vie: les cultes se disent "inquiets" avant l'examen du texte

Les responsables des principaux cultes ont dit ce mercredi 24 avril leurs "inquiétudes" face au projet de loi sur la fin de vie qui pourrait selon eux peser demain sur les plus fragiles.

Ce texte "nous fait basculer vers un modèle qui rompt une digue essentielle, un principe structurant: celui de l'interdit de tuer", a affirmé devant la commission spéciale de l'Assemblée nationale le vice-président de la Conférence des évêques de France Vincent Jordy.

Inquiétudes pour les "personnes fragiles et précaires"

"Nous sommes inquiets des effets sociaux d'un tel projet", a ajouté l'archevêque de Tours en listant ses inquiétudes: "Comment le cadre tiendra-t-il mieux qu'ailleurs? Comment éviter la banalisation qui poussera les personnes fragiles ou précaires à penser qu'elles sont de trop? Comment éviter une dérive économique libérale où la fin de vie devienne la variable d'ajustement des comptes?"

Côté musulmans, le médecin Sadek Beloucif s'est inquiété d'"une loi inopportune" qui envoie "un message troublant pour les plus pauvres", ou sur "des vies qui ne vaudraient plus d'être vécues".

Il a aussi souligné la "grande différence de nature" avec la sédation profonde que prévoit l'actuelle loi Claeys-Leonetti: dans ce cas, "je veux soulager, je prévois que la vie soit écourtée mais je ne le veux pas. C'est très différent de l'euthanasie où l'intention est mortifère".

"Rupture anthropologique"

La loi actuelle "est pleinement adaptée", "encore faudrait-il qu'elle soit pleinement connue et appliquée partout", a déclaré le co-président de l'Union bouddhiste de France Antony Boussemart.

Parlant de "loi pour la psychologie des bien-portants", le président de la Fédération protestante de France Christian Krieger a lui comparé ce texte au "domino majeur qui tombe", ouvrant la voie à une "rupture anthropologique".

Il a aussi insisté sur l'importance de "développer une culture des soins palliatifs" avec une loi de programmation décennale.

"Une sorte de dérapage éthique"

L'avocat Carol Saba, qui représentait les orthodoxes, a dénoncé "une sorte de dérapage éthique". "Sommes-nous dans une posture politique, électoraliste, pour satisfaire une partie de l'opinion publique?" a-t-il lancé.

Alors que certains membres de la commission questionnaient une volonté d'influence indue des religieux, l'archevêque de Rennes Pierre d'Ornellas a expliqué que "nous nous permettons de réfléchir en intégrant le temps long, sans avoir nécessairement de certitudes, mais pour ouvrir des interrogations qui nous semblent essentielles".

D'ailleurs "le protestantisme est, en interne, en débat" sur le projet de loi, a souligné Christian Krieger. Pour des raisons d'agenda, aucun représentant juif n'était présent.

Article original publié sur BFMTV.com