Procès des attentats de janvier 2015: deux anciens otages de l'Hyper Cacher racontent l'"interminable attente"

Brigitte, une des rescapées de l'Hyper Cacher à notre micro ce mercredi. - BFMTV
Brigitte, une des rescapées de l'Hyper Cacher à notre micro ce mercredi. - BFMTV

Plusieurs rescapés de l'attentat perpétré vendredi 9 janvier 2015 dans l'Hyper Cacher de la porte de Vincennes à Paris ont raconté, ce mercredi, leur "terreur totale" et leur incapacité à reprendre une vie normale depuis les attentats de 2015. Certains ont accepté de témoigner au micro de BFMTV, à leur sortie de l'audience qui se tenait ce mercredi à la cour d'assises spéciale à Paris.

"C'est des heures interminables où on sait qu'on va mourir, on est persuadé qu'on en sortira mort", raconte Brigitte, rescapée de l'attentat de l'Hyper Cacher. "Il y a une Brigitte qui est restée, et une Brigitte qui en est sortie. Mais ce n'est plus la même".

Après la tuerie de Charlie Hebdo et l'assassinat de Montrouge, la cour d'assises spéciale de Paris se replonge depuis lundi dans l'horreur de la prise d'otages de l'Hyper Cacher du 9 janvier 2015, au cours de laquelle quatre hommes, tous juifs, ont été tués.

"On est caché" comme "un animal blessé"

"Il (Amedy Coulibaly, le terroriste) nous parlait comme je vous parle, j'en rigole mais d'un ton presque 'copain-copain', et après il switchait quand il comprenait qu'il fallait qu'il fasse son rôle en fait", se souvient cette femme. Selon elle, Amedy Coulibaly se disait: 'non, là je dois re-rentrer dans la peau d'Amedy Coulibaly et faire comprendre que c'est moi le boss, c'est moi le patron en fait', et quand j'ordonne, qu'ils le fassent. Et il ne faut pas qu'ils me retournent le cerveau".

De son côté, Jean-Luc est resté caché quatre heures dans la chambre-froide du supermarché pendant la prise d'otages, avec six autres personnes, "trois femmes, un autre homme et un bébé". Pendant les quatre heures de la prise d'otages, "il faut s'occuper du bébé. On essaie de lui sourire, de montrer que tout va bien. Mais il ne faut pas qu'il pleure. Le plus important, c'est qu'il ne pleure pas (...) On avait peur qu'il (Coulibaly) nous entende et qu'il descende", lâche une autre otage à la barre.

"On était caché, mais on n'était pas à l'abri", renchérit Jean-Luc. Puis quand sa fille l'appelle sur son téléphone, il raconte ne pas réussir à décrocher. "Pour lui dire quoi? Au revoir? Que je l'aime? Que je ne vais pas la revoir?", s'interroge-t-il.

Des images qui "reviennent constamment"

"J'étais caché", raconte encore cet homme de 57 ans. "J'étais retranché dans la chambre froide et là on attend notre mort. Ça fait mal. Ça fait mal aux genoux, on est dans le noir. On est un animal blessé", poursuit-il. "On reste caché en espérant qu'il ne va pas vous trouver. Et même, à un moment, on aimerait que ça se termine, qu'il vienne à moi et qu'il en termine parce que c'est insupportable. Une minute, c'est une heure pour nous".

Certains otages, dont Jean-Luc, finissent par accepter de remonter. À l'audience, il raconte avoir fait face au "terroriste, d'une froideur et d'un calme" absolus, décide, lui, d'aller "à l'encontre des ordres" et de "rester" en bas. "Je me dis 's'il doit me tuer, il faut mieux qu'il vienne à moi que je vienne à lui'.

L'attente, "interminable", prend fin vers 17 heures. Les forces d'intervention préviennent les otages par téléphone qu'ils s'apprêtent à donner l'assaut. "Ils nous disent 'ça va pas tarder', puis 'mettez-vous à genoux, ça va se faire'. La porte est tombée, on a vu des voyants rouges partout, ils nous ont fait sortir", relate Jean-Luc. Quand ils remontent dans le magasin, c'est "une scène de guerre", avec "du sang partout" et "une odeur de brûlé mélangée à de la poudre". Des images qui "reviennent constamment" à l'esprit de Jean-Luc.

Article original publié sur BFMTV.com