Prisons : le nombre de détenus en France bat un nouveau record pour la sixième fois en quelques mois

La surpopulation carcérale chronique avait valu à la France le 6 juillet une nouvelle condamnation de la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH).
La surpopulation carcérale chronique avait valu à la France le 6 juillet une nouvelle condamnation de la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH).

INCARCÉRATION - Encore un nouveau record dans les prisons françaises. Le nombre de détenus a atteint un nouveau chiffre historique en France, avec un total de 74 513 personnes incarcérées au 1er juillet contre 73 699 le mois précédent, selon les statistiques officielles du ministère de la Justice publiés lundi 31 juillet.

Avec ce nouveau pic inédit, la France bat pour la sixième fois en quelques mois son nombre record de détenus, et dépasse pour la première fois la barre des 74 000 prisonniers. Les prisons françaises comptabilisaient 814 détenus en plus au 1er juillet par rapport au 1er juin. Cette hausse est plus importante que lors des précédents records (+537 détenus au 1er juin, +82 au 1er mai).

Il y a également près de 2 500 détenus de plus qu’il y a un an. Ceci alors que la surpopulation carcérale chronique a valu à la France le 6 juillet une nouvelle condamnation de la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH). Avec 60 666 places opérationnelles dans les établissements pénitentiaires au 1er juillet, la densité carcérale globale s’établit désormais à 122,8% contre 118,7% il y a un an.

Taux d’occupation record

Le taux d’occupation est de 146,3% dans les maisons d’arrêt, où sont incarcérés les détenus en attente de jugement, et donc présumés innocents, et ceux condamnés à de courtes peines.

Il atteint ou dépasse même les 200% dans huit établissements, dont 278,1% à Majicavo (Mayotte), 212,2% à Perpignan, 212% à Nîmes, 205,8% à Rochefort (Charente-Maritime) ou encore 204,6% à Foix.  Au total, 16 643 personnes détenues sont actuellement en surnombre par rapport aux places disponibles dans les prisons françaises.

En raison de cette surpopulation, 2 478 détenus sont contraints de dormir sur un matelas posé à même le sol. Ils étaient 1 872 le 1er juillet 2022. Parmi les personnes incarcérées, 20 189 sont des prévenus, incarcérés dans l’attente de leur jugement. Ils représentent 27,1% du nombre total de détenus (contre 26,9% il y a un an).

Au total, 91 127 personnes étaient placées sous écrou au 1er juillet, un nombre là aussi en hausse. Parmi elles, on compte 16 614 personnes non détenues faisant l’objet d’un placement sous bracelet électronique (15.781) ou d’un placement à l’extérieur (833).

Le nombre de femmes écrouées (3,7% de la population carcérale totale) augmente légèrement, tandis que celui de mineurs (0,8%) reste stable.

Mécanisme de régulation carcérale

Dans un rapport présenté le 19 juillet à l’Assemblée nationale, deux députées, Caroline Abadie (Renaissance, majorité présidentielle) et Elsa Faucillon (communiste), recommandaient d’inscrire dans la loi un mécanisme de régulation carcérale, pour faire face à la surpopulation des prisons, frein majeur à la lutte contre la récidive.

Après cinq mois de travaux, les rapporteures se disaient alors certaines : il faudrait interdire d’incarcérer quelqu’un dans une prison quand le taux de 100% d’occupation est atteint. Cette mesure faisait partie des recommandations des États généraux de la Justice, dont s’est largement inspiré le projet de loi d’Éric Dupond-Moretti adopté la veille à l’Assemblée nationale.

Mais elle n’a pas été retenue, le garde des Sceaux préférant mettre en avant le plan (annoncé en 2018) de construction de « 15 000 places » de prisons supplémentaires d’ici à 2027. Les peines prononcées sont aujourd’hui « deux fois plus sévères » qu’il y a vingt ans, avait alors rappelé Caroline Abadie, lors d’une conférence de presse à l’Assemblée nationale.

Ce mécanisme de régulation ne concernerait que les maisons d’arrêts, « là où il n’y a pas de criminels, et uniquement les infractions punies de deux ans d’emprisonnement maximum », avait-elle insisténotant que « l’alternative à la détention a montré son efficacité » sur les peines courtes en matière de réinsertion. Il faut « sortir du populisme carcéral », l’incarcération « coûte plus cher » que les alternatives à la détention, avait aussi souligné Elsa Faucillon.

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