Prison ferme pour des agresseurs de policiers

Le tribunal correctionnel de Paris a condamné mercredi à des peines allant jusqu'à sept ans de prison ferme six activistes proches de l'ultra-gauche qui avaient incendié en mai 2016 une voiture occupée par deux policiers à Paris. /Photo d'archives/REUTERS/Eric Gaillard

par Emmanuel Jarry PARIS (Reuters) - Le tribunal correctionnel de Paris a condamné mercredi à des peines allant jusqu'à sept ans de prison ferme six activistes proches de l'ultra-gauche qui avaient incendié en mai 2016 une voiture occupée par deux policiers à Paris. Les peines prononcées sont cependant en deçà de celles demandées par le ministère public, qui avait donné un tour très politique à ce qui aurait pu n'être qu'un fait divers en marge du mouvement contre la loi Travail. La peine la plus lourde, sept ans, a été prononcée contre le seul absent au procès, Johachim Landwehr, 28 ans, qui réside en Suisse et est sous le coup d'un mandat d'arrêt. Il a été identifié comme étant l'homme qui a mis le feu à la voiture de police en y jetant un fumigène, avec à l'intérieur les gardiens de la paix Kevin Philippy et Allison Barthélemy. La seconde peine la plus lourde, cinq ans de prison dont deux avec sursis, a été infligée à Antonin Bernanos, 23 ans, étudiant et descendant direct de l'écrivain Georges Bernanos, qui se revendique de la lutte antifasciste. Ce jeune homme à l'allure sage a été identifié par un témoin sous X et sur des images vidéo comme étant celui qui a défoncé la vitre arrière du véhicule, par où le fumigène a été jeté, et l'un de ceux qui ont frappé Kevin Philippy. Il a constamment nié avoir pris part à l'agression mais le président du tribunal a rejeté ses dénégations en s'appuyant sur son "identification formelle". Selon son avocat, Antonin Bernanos, qui a fait dix mois de détention provisoire et avait déjà été condamné en 2013 pour violences aggravées, a cependant de fortes chances de bénéficier d'aménagements de peine. "Il est très possible qu'il ne retourne jamais en prison", a dit à Reuters Me Arié Alimi, qui n'était d'ailleurs pas certain mercredi de faire appel. "Il est très probable que personne ne fasse appel parce que c'est une décision politique qui permet aux uns et aux autres de l'éviter", a ajouté l'avocat, tout en espérant que le parquet ne céderait pas à la pression des syndicats de police. PAS DE MANDAT DE DÉPÔT Le tribunal a certes décidé le maintien en prison de deux prévenus encore en détention provisoire et condamnés à quatre et cinq ans de prison ferme, dont la moitié avec sursis. Mais selon leurs avocats, ils devraient être assez rapidement libérés. Et le tribunal n'a pas demandé de mandat de dépôt pour les autres. Le plus âgé des prévenus, Nicolas Fensch, 40 ans, informaticien sans emploi, qui a pour sa part reconnu avoir frappé Kevin Philippy avec une barre métallique, a écopé d'une peine de cinq ans dont deux ans et demi avec sursis. Mais compte tenu de la détention provisoire déjà effectuée, de ses regrets à la barre et d'un faible risque de récidive, son avocat, Antoine Vey, estime qu'il ne retournera pas en prison. "C'est une peine sévère mais mon client l'accepte. Il espère retrouver un travail et avoir une vie tranquille. Nous ne ferons pas appel", a expliqué à Reuters Me Vey. Le jugement a été accueilli au cri de "crève, justice de merde", par une sympathisante des prévenus dans la salle d'audience et de "tout le monde déteste la justice" par plusieurs dizaines de personnes contenues par un important dispositif de sécurité à l'extérieur du tribunal. "On est entré dans une forme de régression pour les libertés publiques et les droits de l'homme. Antonin Bernanos était un défenseur de ces libertés et de ces droits de l'homme", a dit Me Arié Alimi à Reuters à l'issue de l'audience. "On l'a jugé coupable sur des éléments infimes qui reposent sur des considérations pour le moins politiques." (Edité par Yves Clarisse)