Printemps de Bourges : pourquoi les festivals sont plus chers pour tout le monde

La saison des festivals s’ouvre la semaine du 17 avril (ici au Printemps de Bourges le 21 avril 2022), avec quelques difficultés économique pour ce secteur, à peine remis de la crise du Covid.
La saison des festivals s’ouvre la semaine du 17 avril (ici au Printemps de Bourges le 21 avril 2022), avec quelques difficultés économique pour ce secteur, à peine remis de la crise du Covid.

Le Printemps de Bourges ouvre la saison des festivals dès ce mardi 18 avril. Une édition 2023 qui s’annonce tendue entre inflation, cachets des artistes toujours plus élevés et exigences du public.

FESTIVALS - Il y a eu le Covid, la guerre russo-ukraine et l’inflation qui s’installe durablement dans le paysage économique. Beaucoup de bâtons dans les roues pour le secteur évènementiel et notamment pour les organisateurs des festivals de musique qui voient les coûts de production bondir.

Pour ne pas refroidir les futurs festivaliers, certains assurent ne pas augmenter les prix des places. C’est le cas du Printemps de Bourges, qui démarre traditionnellement la saison des festivals, ce mardi 18 avril et jusqu’au dimanche 23. Ils sont à l’équilibre « pour le moment », nous dit-on.

Mais d’autres organisateurs ont déjà répercuté ces coûts sur le prix des places, comme le détaille le magazine Tsugi. « La coordinatrice du festival Au foin de la rue [en Mayenne], n’a toujours pas bouclé sa programmation mais a dû se résoudre à augmenter le prix des billets, de 35 à 40€ pour le pass jour, et de 55 à 69€ pour le pass 2 jours ». Pareil pour le Hellfest, « qui a dépensé 17 millions d’euros sur sa dernière programmation, et qui vient de faire monter le prix de son pass quatre jours de 289 à 329 euros », d’après Tsugi toujours.

Derrière la problématique de l’inflation, d’autres paramètres s’imbriquent et rendent l’équation comptable encore moins tenable. Comme en témoigne pour le HuffPost, Boris Vedel, directeur général du festival du Printemps de Bourges depuis 2015 : « Pour faire le même festival, cette année, nous comptons environ 10 à 12 % d’augmentation des coûts. L’énergie et les matières premières sont nettement plus chères. »

Après Covid et écoresponsabilité

L’année dernière, les festivaliers ont répondu présent. « Selon une étude réalisée par le Prodiss - syndicat du spectacle musical - auprès de ses adhérents organisant des festivals, le nombre de festivaliers en 2022 est en hausse de 9 % par rapport à 2019 » rapportait Ouest France en janvier dernier.

La fréquentation ne baisse donc pas, en revanche, les organisateurs peinent à embaucher du personnel depuis la désertion, pendant la pandémie, d’une certaine branche de métier. « Il y a une pression nette sur les salaires, c’est très visible. Nous peinons à recruter des techniciens, beaucoup sont partis pendant la crise du covid car nous étions à l’arrêt », détaille Boris Vedel, « alors nous essayons de les attirer, et cela passe par le salaire inévitablement. Donc une dépense en plus.»

Mettre sur pied un tel événement, c’est aussi assurer la sécurité des festivaliers. Depuis les attentats de 2015, « l’État a mis le paquet sur le plan vigipirate » remarque Boris Vedel. Ce cadre réglementaire n’en finit plus de s’alourdir, selon le directeur du Printemps de Bourges : « C’est un enfer ! Quand parfois nous avons affaire à des gens qui nous imposent un modèle parfait, ils sont complètement déconnectés de la réalité ».

Et tandis que les réglementations de l’État s’accroissent, les exigences des festivaliers sur la responsabilité des festivals aussi. « Le public demande plus de toilettes, de la nourriture plus saine et veut participer à un évènement plus écoresponsable » constate Boris Vedel. « Alors nous souhaitons de notre côté répondre présent, bien sûr, mais cela n’est pas gratuit. Par exemple, nous nous engageons depuis des années à suivre la norme ISO 20121, visant le festival à devenir plus éco responsable, or cela coûte concrètement chaque année 50 000 euros en plus ».

« Des artistes trop cher »

Les chanteurs et stars internationales n’arrangent pas la trésorerie des festivals. Le cachet des artistes flambe, comme le relate Le Monde le 16 mars dernier. Et de donner en exemple la chanteuse Billie Eilish demandant une somme astronomique pour un festival français : « La toute jeune Américaine Billie Eilish, qui comptait déjà huit singles d’or et vingt-deux de platine en décembre 2020, à l’âge de 19 ans, devrait toucher au moins 1,5 million d’euros pour son concert à Rock en Seine ».

En parallèle une course au show le plus spectaculaire s’opère. « Il y a clairement une surenchère dans le spectacle artistique. Nous sommes dans une génération de l’image, il faut que tout soit instagrammable », déplore Boris Vedel. Faire un spectacle avec du feu, toujours plus de lumières et d’effets, ça a un coût.

L’enjeu est aussi de limiter la disparité entre les grands festivals de musique qui peuvent, par leur budget plus confortable, payer des artistes internationaux et en face, les festivals plus modestes qui seront obligés de renoncer à inviter des artistes très populaires et reconnus car devenus trop chers.

« Il va y avoir une cassure, c’est évident. Le fossé se creuse et il y a une telle aspiration vers le haut avec les stars internationales qui n’ont plus de limite en termes de tarifs », prédit Boris Vedel.

Il pense déjà à revoir sa copie pour l’année prochaine : « Il y a des artistes que je trouve trop cher, ce n’est pas justifié et je regrette. L’année prochaine on fera différemment. »

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