Présidentielle : ces sujets sur lesquels Macron et Le Pen ont changé d'avis lors de l'entre-deux tours

Emmanuel Macron et Marine Le Pen, qualifiés au second tour de l'élection présidentielle (Photo by Charly TRIBALLEAU / AFP)

Dans l'entre deux tours, les deux candidats ont revu leur position sur plusieurs sujets, de gré ou de force.

Revirement sincère ou stratégique avant le second tour ? À quelques jours du second tour de la présidentielle 2022, Emmanuel Macron et Marine Le Pen ont revu leur position sur plusieurs sujets.

Le revirement le plus commenté a lieu du côté du président candidat, sur l'âge de départ à la retraite. Le 17 mars, avant le premier tour donc, Emmanuel Macron présente son programme et notamment sa volonté de reculer progressivement l’âge légal de départ à la retraite à 65 ans en 10 ans, soit d'ici 2032.

Le flou autour de l'âge de départ à la retraite

Mais au lendemain du premier tour, face au rejet de cette proposition le président ouvre la porte à un départ à la retraite à 64 ans sur BFMTV. “Je suis prêt à bouger le rapport au temps et dire qu’on ne fait pas forcément une réforme jusqu’en 2030 si je ressens trop d’angoisse chez les gens, a-t-il déclaré. On ne peut pas dire le dimanche soir ‘je veux rassembler’ et quand on va écouter les gens dire ‘je ne bouge pas’. Les 65 ans ne sont pas un dogme.”

Nouveau revirement du coté des soutiens du président candidat ce weekend. Christophe Castaner, président du groupe La République En Marche à l'Assemblée Nationale, a rappelé que l'objectif reste l'âge de départ à 65 ans".

Macron désormais favorable à la proportionnelle intégrale

Même son de cloche ce mardi matin chez le ministre de l'Economie Bruno le Maire, pour qui le chef de l'État n'a "jamais dévié de sa ligne" sur l'âge de départ à la retraite, rappelant l'objectif de 65 ans, a-t-il précisé su Europe 1.

Autre sujet sur lequel le chef de l'Etat a fait évoluer sa position, et sans ambigüité cette fois, la proportionnelle. En 2017, le candidat d’En marche avait promis d’instaurer une dose de proportionnelle, mais la proposition n'a pas vu le jour. Cette fois, Emmanuel Macron explique "ne pas être opposé" à la proportionnelle intégrale.

La déconjugalisation de l'AAH, une évolution du président

Emmanuel Macron a également montré son revirement concernant la déconjugalisation de l'Allocation adulte handicapé, un sujet sur lequel il va "bouger", a-t-il annoncé sur France Info. L'AAH, une aide financière attribuée aux adultes en situation de handicap et dans l’impossibilité de travailler, est aujourd'hui calculée en fonction des revenus du foyer, dont ceux du conjoint de la personne handicapée. L’allocation peut être réduite voire supprimée si les ressources du couple dépassent les plafonds autorisés pour la percevoir, créant ainsi une dépendance au sein du couple, dénoncent les associations.

La déconjugalisation, c'est-à-dire le fait de ne pas prendre en compte les revenus du conjoint, mais uniquement de la personne en situation du handicap, avait été proposée par les Sénateurs durant le quinquennat, avant d'être rejetée par la majorité à l'Assemblée, suscitant la colère des associations. Le gouvernement a eu recours à la procédure du vote bloqué pour s’opposer à une proposition de loi visant à individualiser l’Allocation adulte handicapé, faisant pourtant consensus dans l'opposition.

Marine Le Pen et le port du voile dans l'espace public

Mais Emmanuel Macron n'a pas le monopole du revirement dans cet entre-deux tours. Chez Marine Le Pen, le revirement le plus flagrant a lieu sur le port du voile. Avant le premier tour, la candidate du RN promettait d'interdire le port du voile dans l'espace public. Un souhait répété notamment à la veille du premier tour sur RTL. "Demain, le voile sera interdit en France. On aura une contravention de la même manière qu'il est interdit de ne pas mettre sa ceinture de sécurité", martelait la candidate qui a récolté 8 133 828 voix au premier tour, soit 23,15% des suffrages exprimés.

En 10 jours, la candidate et son parti ont considérablement revu leur position sur le sujet.

Dans l'entre-deux tours, Marine Le Pen évoque désormais un "problème complexe. J'en suis parfaitement consciente de cela, je ne suis pas obtuse. Il y aura de toute façon des débats. L'Assemblée nationale aura son mot à dire. Et je rappelle que grâce à mon référendum d'initiative citoyenne, 500 000 citoyens peuvent demander à faire voter les Français sur l'abrogation d'une loi qui leur déplaît. Je ne peux pas faire plus démocratique que ce fonctionnement-là", a-t-elle déclaré lors d'un déplacement dans l'Eure samedi 16 avril.

Interrogé le lendemain sur BFMTV, le RN député Sébastien Chenu a en outre déclaré que la candidate RN, si elle était élue présidente dimanche prochain, confierait au Parlement le soin de préciser les contours d’une limitation du voile : "le Parlement se saisira de cette question et apportera les réponses pratiques pour qu’effectivement la grand-mère de 70 ans qui porte son petit voile depuis des années ne soit pas concernée, car elle n’est pas la cible. La cible ce sont les islamistes".

Ce lundi, Jordan Bardella a martelé qu'il n’y aura aucune distinction d’âge” contredisant ainsi Sébastien Chenu.

Sur le référendum, revirement forcé

Autre revirement marquant, concernant la proposition de référendum. Au cœur de son programme concernant la vie démocratique, le RIC (référendum d'initiative citoyenne), qui permettrait de soumettre à un référendum tout sujet soutenu par 500 000 citoyens.

Lors d'une conférence de presse dédiée à la "démocratie" mardi 12 avril la candidate RN assure que dans “une démocratie mature” aucun débat n’était interdit, dont celui sur la restauration de la peine de mort, bien qu’elle soit favorable de son côté à l’instauration d’une “perpétuité réelle”.

Interrogée deux jours plus tard 14 avril sur France 2, Marine Le Pen maintien sa position et affirme que “la question de la peine de mort pourrait passer par un référendum. Tout pourrait passer par un référendum”.

Le lendemain, revirement total de position chez sur BFMTV, où elle indique qu'une telle proposition serait "anticonstitutionnelle”. Entre temps, plusieurs constitutionnalistes ont mis en doute la solidité de son projet, dont plusieurs mesures se heurteraient à la Constitution dont son référendum sur l'immigration.

Autant de revirements qui font dire à Jean Castex, Premier ministre en poste et soutien d'Emmanuel Macron, que le "programme de madame Le Pen est extrêmement difficile à suivre, ça change tous les jours".

VIDÉO - Marine Le Pen : "Je veux faire un référendum sur l’immigration. C’est la première chose que je ferai quand je serai élue"