Pourquoi la tension est montée d'un cran entre Emmanuel Macron et Édouard Philippe

Alors que l'Élysée a posé un veto à la stratégie politique de son ancien Premier ministre, le maire du Havre goûte peu la manière et le fait savoir. Tout en restant fidèle au président de la République.

La tension monte d'un cran entre Édouard Philippe et Emmanuel Macron. Alors que le président refuse la fusion entre Agir, le parti de centre-droit et Horizons, le mouvement politique de son ancien Premier ministre, l'ancien locataire de Matignon hausse le ton.

C'est une sortie inhabituelle pour le maire du Havre. Alors qu'il assurait sur France 2 le 5 janvier dernier, en réaction aux propos du président qui appelait "à emmerder les non-vaccinés" "vouloir sortir (...) des polémiques incessantes", il a tenu au journal L'Opinion un tout autre discours.

"Je n'ai pas envie qu'on m'emmerde puisque c'est un terme à la mode", lâche-t-il ce lundi.

Rejoindre Ensemble citoyens à la seule condition de la fusion

L'expression se veut vive, à la mesure de l'exaspération ressentie par le Havrais. Peu convaincu par Ensemble citoyens, la maison commune de la majorité présidentielle, portée notamment par François Bayrou qu'il n'apprécie guère, Édouard Philippe a accepté de rejoindre le dispositif à une condition.

Il veut faire fusionner son mouvement, Horizons avec celui d'Agir, le parti de Frank Riester. Dans les principes du mouvement, le rapprochement entre les deux formations a d'ailleurs été acté. Le maire du Havre qui estime avoir été loyal vis-à-vis de l'Élysée depuis son départ de Matignon, juge que la macronie lui doit bien cela.

Des initiatives peu appréciées par la macronie

Problème: on l'entend tout autrement du côté de l'exécutif où l'on a peu goûté divers signaux. A commencer par un entretien dans Challenges dans lequel Édouard Philippe sonnait "l'alerte" sur la gestion des finances publiques en septembre dernier, puis le lancement de son parti en octobre et enfin l'installation de celui-ci dans l'ancien QG de Jacques Chirac, gagnant de la présidentielle en 1995...

En guise d'avertissement, le chef de l'État aurait mis un coup d'arrêt à la fusion envisagée, rapporte Le Parisien le 7 janvier dernier. Au-delà de la méthode choisie par l'édile, la majorité craint que le Havrais soit trop gourmand dans les négociations pour obtenir des investitures après la présidentielle.

"Tout le monde a un peu peur que ses futurs députés bordelisent la majorité et soient les frondeurs de la future mandature", lâchait, inquiet, un parlementaire de la majorité auprès de BFMTV.com.

Pas de moyens financiers pour Horizons

Édouard Philippe n'avait d'ailleurs pas fait semblant sur France 2 le 5 janvier. Interrogé sur son souhait de peser dans les législatives, il avait répondu, bravache: "Bien sûr. Je ne suis pas venu pour beurrer les tartines." Une référence aux Tontons flingueurs, l'un des films préférés... d'Emmanuel Macron.

Si l'ancien Premier ministre avait mis un temps le refus de cette fusion entre Agir et Horizons sur le compte de l'entourage d'Emmanuel Macron, le 11 janvier change la donne. Ce jour-là, Franck Riester convoque le comité national de son parti et parle clair. Sans aucun doute cette fois-ci, c'est le locataire de l'Élysée lui-même qui refuse cette union. Elle aurait en effet permis à Édouard Philippe de disposer de moyens financiers et matériels, un casus belli pour Emmanuel Macron.

C'en est trop pour l'élu local qui a encore assuré de "sa loyauté" la présidence début janvier à trois mois du premier tour.

La politique de la chaise vide

"Je ne comprends pas très bien la stratégie de se départir de son flanc droit face à la stratégie de Valérie Pécresse", remarque-t-il ainsi dans L'Opinion avant d'ajouter que le refus de fusionner avec Agir "n'est pas impactant mais très signifiant".

Pour marquer sa colère, l'ancien Premier ministre ne se rendra pas mardi au siège de la République en marche qui accueillera tous les dirigeants qui composent Ensemble citoyens. Une façon de rappeler comme avait pu le faire savoir au Parisien Gilles Boyer, intime parmi les intimes, qu'Édouard Philippe n'avait "pas de chef".

Officiellement à Horizons, on regarde devant, jure Arnaud Péricard, référent régional du parti. "On est en train de prendre notre envol en dévoilant nos comités locaux, en avançant, en créant un parti solide. Ça, personne ne pourra nous le prendre", nous assure-t-il.

Article original publié sur BFMTV.com

VIDÉO - Convictions - François Hollande : "Je vais vous faire un aveu, je n’imaginais pas que la situation était aussi grave"