Pourquoi s’offre-t-on du muguet le 1er mai ?
S’offrir de jolis brins de muguet au début du printemps est une tradition bien française de plus de 400 ans. Découvrez l’histoire de ce rituel royal qui a traversé les époques.
Au départ, s’offrir du muguet n’avait rien à voir avec la fête du Travail, ce 1er mai devenu férié pour une grande partie des pays européens. Car ce petit rituel-là est bien né en France – ni les Espagnols, ni les Allemands ou les Italiens ne s’offrent du muguet ce jour-là.
Une fleur de légende dans de nombreuses cultures
Au-delà de symboliser le retour du printemps, puisque sa floraison démarre courant avril, le muguet porte bonheur depuis plusieurs siècles : dans la Rome Antique qui célébrait les Floralies ou encore chez les Grecs, dont la légende veut qu’Apollon en ait tapissé le mont Parnasse pour ne pas abîmer les pieds des muses.
On retrouve aussi le muguet chez les anciens Celtes, pendant la fête printanière de Beltaine, vouée à honorer le soleil et la fertilité des terres. Aujourd’hui, il est aussi la fleur nationale de la Finlande, mais la tradition qui vise à en offrir serait née… en France.
Le 1ᵉʳ mai 1560, alors qu’il visite la Drôme, le roi Charles IX se voit offrir un brin de muguet par un chevalier. Charmé, le roi réitère la pratique dès l’année suivante en remettant aux dames de la cour la fleur à clochettes, raconte Le Parisien. Au fil du temps, la coutume ne se limite plus à la sphère aristocratique et s’étend à tout le peuple français.
Le muguet s’associe à la fête du Travail sous Pétain
La fête du Travail n’intervient que… trois siècles plus tard. Pendant la Révolution, en 1793, le calendrier républicain instaure d’abord un "jour républicain", célébré le 7 Floréal, c’est-à-dire le 26 avril ! 100 ans plus tard, la date bascule : le 1er mai 1889 devient officiellement la première journée internationale des travailleurs. Mais il n’est plus question de muguet ! À cette date symbolique, on porte à la boutonnière un triangle rouge, puis plus tard de l’églantine rouge, en soutien aux travailleurs.
Le muguet, un peu perdu de vu, refait parler de lui à travers la musique et la mode. Il est chanté par Félix Mayol en 1895 et revient dans les mains des Parisiennes de la Belle Époque, qui se le voient offrir par les grands couturiers. La petite fleur blanche devient aussi l’emblème de Christian Dior. Mais on le dissocie encore complètement de la fête du Travail.
C’est le maréchal Pétain qui décide de lier les deux en 1941, rappelle Le Monde. Désireux d’implanter sa devise "Travail, famille, patrie", le chef d’État français veut que l’on cesse de porter de l’églantine rouge, trop associée au communisme et à la gauche, lors de sa "fête du Travail et de la Concorde sociale" du 1er mai des travailleurs. La fête pétainiste disparaît à la Libération, puis revient en 1968 pour devenir la fête du Travail que l’on connaît aujourd’hui ; le muguet, lui, reste.
Un marché qui pèse 90 millions d’euros
La tradition est définitivement implantée, elle se répand dans toute la France tout au long du XXème siècle. Aujourd’hui, le pays produit chaque année 60 millions de brins de muguet. Il vient en grande majorité du bassin nantais, qui détient 90 % de la production, et de la région bordelaise. En 2023, les Français ont dépensé 19,6 millions d'euros pour du muguet, chiffre la Tribune. Le marché de la petite fleur à clochettes pèse plus de 90 millions d'euros et fait travailler 6000 salariés, qui commencent la cueillette dès la mi-avril, ajoute Le Figaro.
Aujourd’hui, la symbolique reste forte : il est coutume d’offrir 3 brins de muguet, afin de réunir 13 clochettes pour porter chance à celui qui reçoit le bouquet. Mais attention à sa toxicité, même si les cas sont rares ! Les animaux et les enfants en bas-âge sont à surveiller, car l’ingestion du muguet provoque des troubles digestifs et cardiaques.