Pourquoi la prolifération de la chenille processionnaire inquiète autant ?
Un décret du 27 avril dernier a déclaré les chenilles processionnaires du pin et du chêne comme nuisibles à la santé humaine.
Des chenilles avec teinte brun foncé, quelques taches rougeâtres sur la partie supérieure des flancs, avec ventre jaune et une tête noire, qui se déplacent par centaines en longue procession, pour construire un nouveau nid.
Ces chenilles processionnaires, en apparence inoffensives, viennent d'être ajoutées à la liste des espèces dont la prolifération est nuisible à la santé humaine par un décret du 25 avril 2022.Une progression due au réchauffement climatique
Il en existe deux sortes : la chenille processionnaire du pin et la chenille processionnaire du chêne, selon leur arbre de prédilection dans lesquelles elles font leur nid. Avec le réchauffement climatique, ces chenilles, cantonnées pendant longtemps à l'extrême sud de la France, remontent progressivement vers le Nord, à raison de 4km par année durant ces dix dernières années, ces espèces sont désormais présentes dans au moins 84 des 96 départements français.
Une prolifération qui inquiète, car si l'espèce est classée nuisible à la santé humaine, c'est à cause de ses poils urticants. Le risque pour l'être humain intervient lorsque les processions des chenilles quittent le nid situé dans l'arbre afin de se diriger vers le sol en fil indienne et trouver un endroit où s’installer à 15-20cm. Lors de ces processions, le risque de contact avec l'être humain est important. Une période de déplacement qui s'étale de mars à août.
Un danger pour l'Homme et les animaux
Ces "poils urticants vont se détacher, donc il n'y a même pas besoin de contact direct. Comme des petites fléchettes, ils vont venir se nicher dans la peau. Cela provoque des plaques rouges, de l'urticaire, parfois cela peut toucher les yeux", explique à BFMTV la professeure Marie-Sylvie Doutre, dermatologue au CHU de Bordeaux et membre de la société française de dermatologie.
Entre janvier 2012 et décembre 2019, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail a recensé 1274 cas de personnes touchées. Un danger pour l'être humain, mais aussi pour les animaux de compagnie.
Les arbres exposés au danger des chenilles
La truffe au ras du sol, les animaux sont bien davantage exposés au contact avec ces poils urticants. Le Parisien rapporte des témoignages de maîtres de chien dont les animaux ont été en contact avec ces chenilles processionnaires dans les forêts franciliennes. Bilan : langue qui gonfle, vomissements, fièvre, et une partie de la langue nécrosée qui a dû être coupée.
Un danger pour l'être humain, les animaux de compagnie dont les chiens, mais aussi les arbres. Car les chenilles processionnaires peuvent provoquer des conséquences néfastes pour l’arbre. La chenille "va se nourrir la nuit des feuilles des chênes et les premiers signes sur l’arbre seront visibles : parties desséchées, pertes de feuillage qui augmentent avec l’appétit des chenilles... Si l’arbre ne meurt pas, sauf dans le cas d’infestation extrême, il est affaibli. La perte de feuillage diminue la capacité de photosynthèse, ce qui entraîne le ralentissement de la croissance. Il devient ainsi plus sensible aux maladies et aux autres ravageurs", explique l'Office national des forêts (ONF).
Les symptômes disparaissent d'eux-mêmes
Pour limiter les risques, "Il faut porter des chemises, des pantalons, des chaussures fermées et ne pas sortir en tongs ! Et quand on revient à la maison, il faut les laver puis les passer à la machine à laver et au sèche-linge", conseille Marie-Sylvie Doutre. Si malgré les précautions vous entrez en contact avec une de ces chenilles, les démangeaisons partent le plus souvent en quelques heures, la prise d'antihistaminiques et l'application de crèmes avec de la cortisone sont conseillées pour faire passer les symptômes.
Désormais traitées en espèce nuisibles à la santé humaine, cela va permettre et même obliger les préfets à "mettre en place des traitements et des stratégies pour lutter contre leur prolifération", dans les lieux où les chenilles risquent de toucher les populations et les animaux domestiques. Concrètement, on va avoir des gestions plus ou moins obligatoires en fonction du risque", explique Alice Samama, animatrice à l'Observatoire des chenilles processionnaires, auprès de France Bleu. "Par exemple, si des chenilles sont observées dans un parc pour enfants ou l'aire de jeux d'une école, le préfet sera obligé d'agir. À l'inverse, dans une forêt peu fréquentée, la gestion du risque ne sera pas obligatoire", poursuit la spécialiste.
Pour agir, le développement des prédateurs comme la mésange et la chauve-souris, mais aussi des écopièges sous forme de colliers placés en bas des troncs d'arbres sont les solutions privilégiées pour réduire la population des chenilles processionnaires.
VIDEO - Il filme des chenilles fascinantes se déplaçant en file indienne