Pourquoi les « midterms » sont si cruciales aux États-Unis

ÉTATS-UNIS - Vu de France, c’est une situation pratiquement inimaginable ces vingt dernières années : un président de la République privé de majorité et qui demeure impuissant face à l’opposition au Parlement dans une sorte de cohabitation. Aux États-Unis, le fonctionnement même du système institutionnel fait des « midterms » programmées ce mardi 8 novembre une occasion pour les républicains de priver Joe Biden et les démocrates de tout pouvoir législatif.

En effet, comme vous pouvez le voir dans notre vidéo en tête d’article, cette journée de scrutin située deux ans après la présidentielle est tout sauf anodine dans la vie politique américaine. Historiquement d’ailleurs, l’exercice des « midterms » est ardu pour le pouvoir en place, qui est régulièrement sanctionné par les électeurs pour n’avoir pas encore tenu ses promesses de campagne ou parce qu’il n’agit pas assez vite. Barack Obama avait ainsi perdu celles de 2010.

Les électeurs sont ainsi appelés aux urnes pour renouveler l’intégralité de la Chambre des représentants (l’équivalent de l’Assemblée nationale), un tiers du Sénat (35 sièges sur 100 cette année), élire des dizaines de gouverneurs (les dépositaires du pouvoir exécutif au niveau de chaque État) et même se prononcer sur différentes problématiques locales dans le cadre de référendums.

Vers un chamboulement des majorités parlementaires

Or dans le contexte actuel, les scrutins sont indécis. Et pour cause : Joe Biden ne dispose que d’une très faible majorité à la Chambre des représentants (huit sièges d’avance), et c’est encore pire au Sénat où la vice-présidente Kamala Harris doit user de son « 101e » vote pour trancher face à un hémicycle parfaitement divisé entre 50 membres de chaque camp.

Et si les sondages donnent pour l’heure de bonnes chances au camp présidentiel de conserver la Chambre, c’est beaucoup plus tendu au Sénat. En Géorgie et dans le Nevada par exemple, les sortants démocrates Raphael Warnock et Catherine Cortez Masto sont loin d’avoir réélection gagnée et la défaite de l’un d’entre eux pourrait précipiter le Sénat entre les mains des républicains. Surtout si les conservateurs remportent les scrutins clés prévus dans le Wisconsin et en Pennsylvanie.

Et l’on peut rappeler au passage que des majorités parlementaires permettraient en outre à un camp ou l’autre de freiner ou au contraire d’avancer sur des enquêtes comme celle portant sur l’assaut du Capitole ou celle s’intéressant aux mensonges répétés de Donald Trump sur une présidentielle 2020 qui lui aurait été « volée ». Ainsi, des républicains en position de force au sortir du scrutin pourraient décider d’enquêter sur les affaires de la famille Biden ou sur la débâcle du retrait des troupes d’Afghanistan, et endommager encore davantage l’image du président en exercice.

La présidentielle est dans tous les esprits

D’autant, et c’est bien là l’un des éléments qui font de ces « midterms » un scrutin aussi important, que la course vers la présidentielle de 2024 est déjà lancée. Et à ce petit jeu, entre un Donald Trump qui rêve encore et toujours de faire son retour, un Joe Biden déjà bien éreinté par l’après-Covid et la crise économique, et des ténors républicains comme Ron DeSantis et Greg Abbott qui souhaitent s’imposer comme des alternatives crédibles dans le camp conservateur, les enjeux à scruter seront multiples.

On peut ajouter à cela le fait que des considérations plus larges, comme la remise en question de l’accès à l’avortement ou la guerre en Ukraine se soient invitées dans les débats. Ainsi, en plus de toutes ces problématiques nationales, la Californie votera ce mardi pour inscrire le droit à la contraception dans sa constitution.

Un exemple parmi d’autre. Car les « midterms » verront également les Américains élire localement des juges, des gouverneurs, des procureurs et autres Parlements locaux. Autant d’élections subsidiaires qui pourront donner au pays une couleur politique bien différente de celle d’aujourd’hui, et qui poseront sans aucun doute les bases de la campagne présidentielle qui s’engagera dans la foulée, à deux ans du prochain scrutin.

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