Pourquoi l’Espagne va revoir sa loi modèle sur les violences sexuelles

Spain's Prime Minister Pedro Sanchez looks on as he waits for the arrival of Guatemala's President before their meeting at La Moncloa Palace in Madrid, on January 20, 2023. (Photo by Pierre-Philippe Marcou / AFP)
PIERRE-PHILIPPE MARCOU / AFP Spain's Prime Minister Pedro Sanchez looks on as he waits for the arrival of Guatemala's President before their meeting at La Moncloa Palace in Madrid, on January 20, 2023. (Photo by Pierre-Philippe Marcou / AFP)

ESPAGNE - Après plusieurs semaines de controverse, le gouvernement de gauche espagnol a annoncé lundi 30 janvier qu’il allait modifier sa loi phare contre les violences sexuelles qui a eu pour effet pervers de faire sortir de prison certains condamnés en réduisant leurs peines.

« Dans les prochains jours, nous présenterons » un projet de réforme « qui apportera une réponse et une solution à ces effets indésirables que nous ne voulons évidemment pas voir se répéter à l’avenir », a déclaré la ministre de l’Éducation et porte-parole du Parti socialiste, Pilar Alegria.

« Logiquement, ce que nous avons envisagé, c’est que la formule pour corriger ponctuellement ces effets indésirables (...) prenne la forme d’une augmentation des peines pour les délinquants sexuels », a-t-elle ajouté.

Surnommée « seul un oui est un oui », la loi contre les violences sexuelles, entrée en vigueur le 7 octobre, a introduit l’obligation de consentement sexuel explicite, une promesse faite par le gouvernement après un viol collectif qui avait indigné le pays.

Le texte a aboli la distinction entre le délit d’« abus sexuel », aux peines plus faibles, et l’« agression sexuelle », qui incluait le viol et nécessitait la présence de violence ou d’intimidation pour être retenu. Désormais, toutes les violences sexuelles sont des « agressions sexuelles » dans le Code pénal.

La mise en œuvre de cette loi a cependant entraîné une vive polémique, le texte ayant paradoxalement abaissé les peines pour certains types de violences sexuelles, ce qui a eu pour effet pervers de faire sortir de prison certains condamnés.

En Espagne, les peines sont modifiées rétroactivement si une modification du Code pénal bénéficie aux condamnés.

Selon les médias espagnols, 20 personnes sont ainsi sorties de prison ces dernières semaines, tandis que 300 autres ont bénéficié de réductions de peines.

Consentement

La volonté des socialistes du Premier ministre Pedro Sanchez de réformer cette loi a donné lieu à de vives passes d’armes avec leurs partenaires de gauche radicale de Podemos au sein de la coalition au pouvoir.

Le Parti populaire (PP), principal parti d’opposition à droite, a avivé les tensions en s’empressant d’offrir son soutien parlementaire aux socialistes s’ils souhaitaient procéder aux changements sans le soutien de Podemos.

« Le consentement doit rester au cœur » de la loi. « Nous ne pouvons pas revenir à l’épreuve » consistant à devoir « prouver que nous avons suffisamment résisté ou que nous n’avions pas bu », a réagi sur Twitter la numéro un de Podemos, Ione Belarra, qui est ministre des Droits sociaux.

Le Parti socialiste a assuré de son côté que le changement envisagé ne visait qu’à combler les lacunes du texte, et ne remettrait pas en cause le point clé du consentement.

Le but est « d’éviter les effets indésirables à l’avenir », tout en laissant la question du consentement « au cœur » de la loi, « pour éviter que les femmes aient à subir une épreuve probatoire dans les procès pour agression sexuelle », a résumé Felix Bolaños, ministre de la Présidence et bras droit de Pedro Sanchez.

Jusqu’à présent, les victimes de viol devaient prouver qu’elles avaient subi des violences ou des intimidations. Sans cela, l’infraction était considérée comme un « abus sexuel » et entraînait des peines plus légères que le viol.

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