Guerre en Ukraine : le possible envoi de chars français réveille les divisions de la NUPES

POLITIQUE - Unis en France sur le front des retraites, dissonants à l’international sur celui de l’Ukraine. Ce jeudi 26 janvier, l’insoumis Manuel Bompard et le communiste Fabien Roussel ont estimé que la question d’une possible livraison de chars Leclerc à Kiev pour faire face à l’agression russe doit être tranchée par les parlementaires.

« Si on devait prendre une telle décision, on ne peut pas le faire sans un débat à l’Assemblée nationale », a déclaré le député LFI des Bouches-du-Rhône, considérant que la livraison de ce matériel réclamée par Volodymyr Zelensky constitue « une montée en puissance du niveau d’armement qu’on fournirait aux Ukrainiens ».

À ce stade, le coordinateur de la France insoumise affirme que sa formation ne se prononcera pas « sans les informations stratégiques et militaires », justifiant cet envoi. Même chose du côté du communiste Fabien Roussel. « Cette décision ne peut pas être prise seulement par le président », a estimé le secrétaire national du Parti communiste, qui pointe un risque d’escalade.

« Est-ce que nous assumerions le risque de rentrer en conflit avec la Russie ? », interroge le député du Nord, craignant que cette livraison entraîne Vladimir Poutine à considérer la France comme cobelligérante. Un narratif déjà utilisé par les insoumis et communistes.

Ambiguïté

Lors de la campagne présidentielle, Fabien Roussel estimait que la France « ne peut pas prendre part à ce conflit, ni directement, ni indirectement par l’intermédiaire de livraisons d’armes ». Ce qui était aussi le cas de Jean-Luc Mélenchon qui, à cette époque, considérait que la toute livraison d’armes « feraient de nous des cobelligérants », à rebours du consensus militaire sur le sujet et de l’article 51 de la Charte des Nations unies.

Les déclarations du jour de Manuel Bompard et de Fabien Roussel révèlent une forme d’ambiguïté longtemps reprochée aux communistes et aux insoumis au sujet de la Russie, qui considèrent que c’est exclusivement l’action diplomatique qui conduira la Vladimir Poutine à stopper son agression. « Seule la négociation peut permettre de sortir de l’impasse de la guerre totale », déclarait à l’Assemblée nationale Mathilde Panot, qui, à l’inverse de ses collègues socialistes et écologistes, n’avait pas applaudi la livraison d’armes en Ukraine.

Une dissonance qui revient, sans surprise, sur la question de l’envoi de chars. « On est pour l’envoi de chars et d’armes », tranche sans la moindre ambiguïté auprès du HuffPost une source parlementaire socialiste. Ce que confirme la députée PS Anna Pic, membre de la Commission défense de l’Assemblée nationale.

« Ce n’est pas de notre ressort »

« Il faut donner les moyens aux Ukrainiens de repousser l’agression russe, au plus près de ce dont ils ont besoin », justifie la députée de la Manche, qui ne partage pas l’idée émise par Manuel Bompard et Fabien Roussel de trancher cette question au Parlement. « Ce n’est pas de notre ressort. Il y a des contraintes d’urgence et de temporalité qui font que c’est au chef de l’État de décider », poursuit l’élue socialiste, qui précise que les parlementaires peuvent faire connaître leurs positions par le biais de résolutions débattues et votées au Parlement.

Anna Pic souligne également que pour se prononcer correctement, les députés et sénateurs auraient à discuter des détails publiquement. Des détails précieux et stratégiques auxquels aurait accès, de facto, Moscou en suivant les débats. « On peut passer par le Parlement lorsqu’il faut décider du maintien ou non de forces engagées sur un théâtre d’opérations, mais pas dans le cadre d’une livraison d’armes. Ou alors ce serait une première », insiste-t-elle.

Également membre de la Commission défense de l’Assemblée nationale, le député EELV de Paris Julien Bayou ne dit pas autre chose. « Nous sommes clairement pour l’envoi de chars en général », affirme au HuffPost l’élu parisien, qui émet néanmoins une petite réserve sur la compatibilité des chars Leclerc avec le théâtre ukrainien.

« Mais sur le principe, il faut soutenir l’Ukraine et d’un point de vue stratégie, agir de concert avec nos alliés », souligne l’écologiste, qui appelle à envoyer « le plus rapidement possible » les équipements nécessaires à la défense ukrainienne. Si Julien Bayou trouve « intéressant » que les parlementaires puissent travailler sur ces questions, il refuse de « subordonner un envoi qui n’a que trop tardé à un vote du Parlement ».

Le député trouve par ailleurs « ineptes » voire « hypocrites » les alertes sur les risques de cobelligérance, exprimées par certains de ses collègues de la NUPES : « notre devoir, c’est d’apporter une réponse juste, nécessaire et proportionnée à l’agression russe. Le pacifisme, ce n’est pas de laisser l’Ukraine se faire écraser ». À bon entendeur.

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