Point de blocage, accords... Où en sont les tractations entre la majorité et la droite sur la loi immigration?

Toujours pas de fumée blanche. De longues heures de négociations a huis-clos ont eu lieu ce lundi entre sénateurs et députés au sujet du contenu de la loi immigration. Les travaux de cette Commission mixte paritaire (CMP) ont été suspendus pour la nuit et reprendront à 10h30 ce mardi 19 décembre, macronistes et Républicains butant sur des désaccords de dernière minute.

Alors qu'un accord se dessinait entre la droite et le camp présidentiel, les négociations ont en effet pâti d'un différend inattendu sur les allocations familiales.

• Point de blocage sur les prestations sociales versées aux étrangers

La droite veut conditionner les prestations sociales à cinq ans de présence sur le territoire (30 mois pour ceux qui travaillent), y compris les aides personnalisées au logement (APL), que la majorité souhaite au contraire voir échapper à ces restrictions.

La mesure devenue crispante au point de menacer le texte dans son intégralité a d'ores et déjà été repoussée à la fin des débats, le temps de trouver un nouvel accord. Une délégation de députés de la majorité chargés du projet de loi sur l'immigration a fait un passage rapide à Matignon lundi soir avant de retourner siéger.

• Accords sur le délit de séjour irrégulier et les restrictions sur les tarifs réduits dans les transports

En attendant l'arrivée du fameux article sur les allocations, la CMP a validé plusieurs mesures introduites par la droite au Sénat: un délit de séjour irrégulier puni d'une amende, ou encore une restriction de l'accès aux tarifs réduits dans les transports pour les sans-papiers.

Selon nos informations, l'éventuel accord pourrait aussi contenir le principe d'une caution demandée à tout étranger hors UE qui voudrait venir étudier en France.

La Première ministre a également répondu in extremis à un ultimatum de la droite sur l'Aide médicale d'État, promettant par écrit d'"engager en début d'année 2024" une réforme de ce dispositif qui permet aux étrangers sans papiers de bénéficier de soins médicaux.

• Qu'en pensent le reste de l'opposition et la majorité?

"La majorité a cédé sur toutes les lignes rouges et a dépassé les lignes bleu marine", a dénoncé devant les journalistes le président du groupe socialiste Boris Vallaud, membre de la CMP. "Les castors avalent des couleuvres. La préférence nationale de Le Pen passerait crème. La honte", tacle sur X, ex-Twitter, l'insoumise Nadège Abomangoli.

"Il n'y a pas un seul sujet depuis le début de la discussion sur lequel les macronistes ont tenu bon", a aussi lancé devant la presse le sénateur communiste de Paris Ian Brossat.

Du côté du Rassemblement national, l'ambiance était plutôt festive. "On se réjouit que ce texte reprenne un nombre considérable de propositions de Marine Le Pen", se félicitait dans la soirée la députée RN Edwige Diaz.

À force "d'avaler des couleuvres", certains membres de la majorité ne risquent-ils pas d'avoir le tournis? Au point de ne pas voter le projet de loi? Entre une "quinzaine et une vingtaine" de députés de la majorité présidentielle pourraient voter contre le texte de Gérald Darmanin en cas d'accord avec la droite, estimait BFMTV lundi matin. Dans ce cas, l'exécutif pourra compter sur le soutien des Républicains.... mais aussi potentiellement du Rassemblement national.

Après avoir salué des "victoires idéologiques" pour son camp, le député RN membre de la CMP, Yoann Gillet, a indiqué qu'il était "trop tôt" pour dire si son parti s'opposerait ou non au projet de loi. Il ne ferme en tout cas pas la porte à un vote ou à une abstention, qui serait décisive.

Et même en cas d'éventuel accord, le texte pourra-t-il être voté? Un vote final des conclusions de la Commission mixte paritaire était prévu pour ce mardi après-midi à l'Assemblée nationale. La CMP doit reprendre à 10h30 et étudier encore des dizaines d'articles du projet de loi.

"Ce n’est plus un fiasco, mais un accident industriel", résume sur X, ex-Twitter, le socialiste Jérôme Guedj, qui juge un vote à 14h30 au Sénat puis à 16h30 à l'Assemblée nationale ce mardi "impossible".

Article original publié sur BFMTV.com