Trois morts au Venezuela après des pillages

BOLIVAR/TACHIRA, Venezuela (Reuters) - Trois personnes sont mortes et plus de 400 autres ont été arrêtées depuis le week-end au Venezuela lors de manifestations ou de pillages provoqués par la suppression des billets de 100 bolivars, la plus forte valeur en circulation, rapportent lundi les autorités. Un homme, une femme et un adolescent de 14 ans ont été tués par balles dans la région de Bolivar (sud), la plus touchée par les troubles consécutifs à la décision présidentielle. L'opposition annonce un bilan de cinq morts. Le chef de l'Etat, Nicolas Maduro, a fait retirer jeudi ces billets de la circulation alors que les nouveaux billets de 500, 2.000 et 20.000 bolivars créés pour s'adapter à l'inflation n'avaient pas encore été livrés. Nombre de Vénézuéliens se sont retrouvés sans moyens de paiement - 40% de la population n'a pas de compte bancaire - et des émeutes et pillages ont rapidement éclaté. D'après les responsables économiques locaux, quelque 350 magasins ont été pillés dans la seule ville de Ciudad Bolivar. Dans 90% des cas, il s'agissait d'établissements alimentaires. Des habitants ont dressé des barricades pour se protéger d'autres violences. A Santa Elena de Uairen, près de la frontière avec le Brésil, commerçants et habitants ont formé des groupes de vigiles pour assurer la sécurité des magasins. Après deux journées de violences, Nicolas Maduro a annoncé samedi qu'il repoussait au 2 janvier la date limite d'utilisation des billets de 100 bolivars tandis que les premiers chargements de nouveaux billets sont arrivés par avion. Ce report a contribué à calmer les esprits, même si de nouveaux pillages étaient signalés dimanche à Ciudad Bolivar (sud) et si certains commerçants ont refusé d'accepter des billets de 100 bolivars. Parmi les personnes interpellées ces derniers jours figurent des cadres et des militants de deux partis de l'opposition, Volonté populaire et Justice d'abord, a précisé Maduro dans un discours télévisé, les accusant de suivre des instructions "putschistes" venues de Washington. "Ne venez pas me dire qu'ils sont des prisonniers politiques. Ils appartiennent aux deux partis des 'gringos' au Venezuela", a-t-il dit. Maduro, au pouvoir depuis la mort de Hugo Chavez, en 2013, justifie la suppression des billets de 100 bolivars au nom de la lutte contre la mafia et de la contrebande. Mais alors que le pays est en récession depuis trois ans, l'opposition dénonce une nouvelle preuve de la "politique économique désastreuse" menée par le pouvoir. "Le seul coupable du chaos et de la violence de ces derniers jours, c'est Nicolas Maduro", a déclaré le parti Justice d'abord dans un communiqué. (Andrew Cawthorne et Corina Pons avec María Ramírez in Ciudad Bolivar; Henri-Pierre André et Jean-Stéphane Brosse pour le service français)