Philippe et les sondages de la présidentielle 2027 : tous ces favoris qui ont pris un mur avant lui
Le maire du Havre rappelle souvent l’exemple d’Alain Juppé pour mettre à distance les chiffres flatteurs sur sa potentielle candidature. Son mentor n’est pas un cas unique.
POLITIQUE - Le Doudou des sondages. Depuis qu’il a quitté Matignon en juillet 2020, poussé vers la sortie par Emmanuel Macron, Édouard Philippe jouit d’une belle cote de popularité. Il est aujourd’hui la personnalité politique préférée des Français et le mieux placé au centre et à droite selon les enquêtes d’opinion pour l’emporter sur Marine Le Pen en 2027.
Un statut que le maire du Havre peut régulièrement mesurer sur le terrain ou dans les médias. En pleine offensive pour la sortie de son livre Des lieux qui disent (ce mercredi 13 septembre aux éditions Lattès), Édouard Philippe est régulièrement questionné sur ses intentions pour la prochaine présidentielle et sur sa popularité dans les sondages. Mais cette position aussi enviée qu’elle soit par les autres prétendants n’immunise pas contre les échecs cuisants, loin de là.
L’ancien Premier Ministre en sait quelque chose. « C’est même toujours le contraire », a-t-il souri, ce mercredi, lorsque Léa Salamé lui a fait remarquer sur France Inter que les mieux placés ne gagnent pas toujours à la fin. « C’est une donnée objective. Elle fait que plus de gens veulent me voir que si j’étais au fond de la liste », mais à la « valeur prédictive nulle », résume-t-il dans Le Monde ce même jour. De fait, les exemples des personnalités très populaires, favorites dans les enquêtes d’opinions mais défaites dans les urnes, sont nombreux.
Le traumatisme Juppé
Le président d’Horizons cite toujours l’un de ses mentors Alain Juppé pour mettre à distance les estimations flatteuses, surtout à plus de trois ans de l’échéance. « J’ai la grande chance, pendant toute ma vie politique, d’avoir travaillé avec Alain Juppé (...) et quand on a travaillé avec lui on sait la valeur qu’il faut accorder à un caractère prédictif des sondages », a-t-il ainsi soufflé dimanche dernier dans l’émission 7 à 8 sur TF1 avant d’invoquer la même référence dans son entretien au Monde. Comme un traumatisme.
Il y a sept ans, en novembre 2016, Alain Juppé est sèchement battu par François Fillon à la primaire de la droite organisée pour la présidentielle du printemps suivant, malgré les sondages éblouissants qui avaient porté sa candidature jusqu’ici. Favori pour la présidentielle, le maire de Bordeaux à l’époque sera crédité d’une quinzaine de points d’avance sur Nicolas Sarkozy les mois précédents son crash.
« Je me suis trompé de campagne », confesse aujourd’hui l’ancien maire et Premier ministre dans ses mémoires, en expliquant avoir priorisé l’ouverture au centre au détriment de la droite qu’il pensait « fidèle » : « Bonne tactique en effet… Pour la campagne présidentielle elle-même, pas pour celle de la primaire. » Édouard Philippe, alors porte-parole du « bonze de Bordeaux » assiste aux premières loges à cette désillusion redoutée par tous les favoris.
Jospin, Balladur, Giscard…
Car avant lui, bien d’autres l’ont vécu. Plus encore que le socialiste Lionel Jospin, éliminé dès le premier tour d’une élection « imperdable » en 2002, Édouard Balladur par exemple tient une belle place dans le club des favoris déchus.
Longtemps donné gagnant à la présidentielle 1995, celui qui sort de Matignon après une période de cohabitation avec François Mitterrand échoue finalement au premier tour, devancé par Jacques Chirac et le socialiste Lionel Jospin. Son matelas (il était mesuré à 33 % d’intentions de vote contre 14 % pour Jacques Chirac un an avant par TNS-Sofres) ne résiste pas à l’ascension fulgurante de son rival à droite, qui remportera le second tour et enchaînera deux mandats.
Plusieurs années plus tôt, 100 jours avant le scrutin de 1981, c’est Valéry Giscard d’Estaing qui, selon les sondages n’a pas de souci à se faire pour sa réélection. Les enquêtes le donnent gagnant depuis plusieurs mois, et ses opposants partent divisés. Raté. Son avance sur François Mitterrand, 59 % contre 41 % selon TNS en novembre 80, commence à fondre avant la fin de cette même année et il perd quelques mois plus tard face au socialiste.
À cette liste, on peut également ajouter François Fillon favori de l’élection présidentielle 2017 jusque tard dans la campagne et l’émergence d’Emmanuel Macron puis le cauchemar du « Pénélope gate ». Ou même Dominique Strauss-Kahn plusieurs années plus tôt. Avant l’affaire du Sofitel de New York en mai 2011 et les accusations de viols, le directeur du FMI était le grand favori des sondages pour la présidentielle 2012.
Autant d’exemples qu’Édouard Philippe et ses troupes ont en tête. Et s’ils ne les ont pas, certains se chargent malgré eux de les rappeler. Comme ce début septembre, lorsque le numéro 2 d’Horizons Christian Estrosi a commis un lapsus en appelant à la tribune de sa rentrée niçoise le maire du Havre Édouard… Balladur. Une petite bourde qui a fait rire l’assistance. Pour l’instant ?
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