Philippe Lioret, réalisateur de "Welcome", accusé par 10 actrices d’agression sexuelle et de gestes "déplacés"

Dans une enquête publiée par Radio France, dix comédiennes témoignent pour dénoncer des "baisers forcés" et des demandes intimes du cinéaste, lors du casting de "Toutes nos envies". Le réalisateur nie tout abus.

Le réalisateur Philippe Lioret, ici en 2017 à Los Angeles, est accusé par dix actrices d’agressions sexuelles et de comportements déplacés.

METEOO - Des récits qui font écho à la nouvelle vague Metoo dans le cinéma français, impulsée par Judith Godrèche. Une enquête de la cellule investigation de Radio France, publiée ce mardi 9 avril, dévoile les témoignages de dix actrices accusant le réalisateur français Philippe Lioret d’agression sexuelle et d’avoir eu un comportement « déplacé » lors ou en marge de castings. Le scénariste de Welcome réfute ces accusations, déclarant ne jamais avoir forcé ces femmes.

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La plupart des récits se déroulent à l’été 2010, alors que Philippe Lioret cherche de nouvelles actrices pour son nouveau long métrage, Toutes nos envies. L’une des femmes auditionnées, Hélène Seuzaret, raconte que le cinéaste lui aurait donné des cours privés pour qu’elle obtienne un rôle. Des cours qui se seraient transformés en moments d’intimité forcés. À la fin d’une des séances de travail, Philippe Lioret lui aurait volé un baiser : « Une fois dehors, alors qu’on retourne à nos véhicules respectifs, il essaye de m’embrasser sur la bouche », se souvient la comédienne, qui dénonce « un abus de pouvoir ».

Pour sa part, le réalisateur nie tout abus de pouvoir : « Je n’ai jamais eu la sensation d’essayer d’abuser de qui que ce soit de toute ma vie », a-t-il affirmé aux journalistes de Radio France. L’avocate du réalisateur a précisé : « Qu’il ait pu tenter de séduire, ça, c’est tout à fait possible. Mais il s’est toujours arrêté dès lors qu’il s’est trouvé face à un refus ». Dans la vidéo ci-dessous des journalistes de Radio France, qui détaillent leur travail d’enquête, on lit également que Philippe Lioret « s’excuse si son comportement a pu heurter ».

Baisers sans consentement

Deux autres actrices castées pour des rôles dans le film livrent un récit similaire : après une invitation au restaurant, Philippe Lioret aurait tenté de les embrasser sans leur consentement. L’une d’entre elles dit que l’avoir repoussé lui a coûté son rôle : « Philippe me dit que finalement, je n’aurai pas le rôle principal mais que je pouvais avoir un petit rôle dans son film, en guise de compensation ».

Outre ces baisers, d’autres comédiennes dénoncent des comportements « déplacés », où Philippe Lioret les aurait poussées à jouer des scènes intimes lors des essais. Selon Élodie Frenck, qui avait déjà joué dans son film Mademoiselle, le cinéaste qui lui donnait la réplique « mettait sa bouche dans [s]on cou ». Le repoussant, il aurait répliqué, en parlant du film : « ’Mais tu veux le faire ou tu ne veux pas le faire ?’ ». L’actrice Amandine Dewasmes a vécu exactement la même expérience douloureuse, lors du même casting.

La comédienne Émilie Deville explique, quant à elle, que le scénariste a insisté pour lui faire jouer des scènes qui n’étaient pas écrites dans le scénario. « Il fait l’enfant de six ans, il se met à genoux et il attrape mes hanches. Il colle son visage sur mon sexe en disant : ’Maman !’ », décrit-elle, dénonçant des « abus de pouvoir ».

"Ne pas se sentir respectée"

Celle qui a finalement obtenu le rôle principal dans Toutes nos envies, Marie Gillain, avoue, elle aussi, avoir ressenti « une sensation de malaise » lors des essais. En soutien aux artistes qui témoignent, elle rappelle que « ne pas se sentir respectée dans son intégrité morale et physique lors d’un entretien d’embauche n’est plus acceptable ».

D’autres femmes, dont Louise Szpindel, affirment que le réalisateur leur aurait demandé de lui montrer leurs seins. « Philippe Lioret m’a dit : ’Je voudrais voir ta poitrine. Je dois la voir si je dois la filmer’ », révèle l’une d’elles.

Avec ces témoignages, les femmes interrogées disent vouloir « assainir » les castings et avertir les jeunes actrices : « Vous n’avez pas à coucher, vous n’avez pas à vous avilir pour obtenir un rôle. N’acceptez pas des choses qui vous paraissent déplacées, malsaines, perverses ».

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