Pennsylvanie, Géorgie, Ohio, Arizona: ces 4 États à surveiller lors des midterms

Pennsylvanie, Géorgie, Ohio, Arizona: ces 4 États à surveiller lors des midterms

Le rendez-vous a beau revenir à échéances régulières, son menu - gargantuesque -, et son ampleur - dantesque - en font un événement électoral unique au monde. Et cette édition 2022, entre polarisation politique extrême et incertitude du résultat, est particulièrement captivante. Ainsi, ce mardi, ont lieu les midterms, ou élections intermédiaires.

Les enjeux de ces scrutins sont très nombreux: en plus de trancher dans le vif des référendums locaux qui leur sont soumis, les Américains désignent les secrétaires de 27 États et les gouverneurs de 36 d'entre eux. Surtout, ils sont appelés à renouveler leur Congrès.

Dans le détail, ils se prononcent pour l'intégralité des 435 sièges de la Chambre des Représentants et pour le tiers des banquettes du Sénat. À défaut d'être jouées d'avance, les choses sont claires. Les démocrates devraient perdre leur majorité de 221 membres contre 212 républicains à la chambre basse. Mais le Sénat - où 50 républicains et 50 démocrates ou assimilés, auxquels la vice-président Kamala Harris apporte un avantage décisif en cas de blocage, se regardent en chiens de faïence - apparaît comme une autre paire de manches. Et quatre États sont dans tous les radars: la Pennsylvanie, la Géorgie, l'Ohio et l'Arizona.

Sondages dans un mouchoir de poche, personnalités des candidats, thématiques abordées, symboliques soulevées... ces régions sont à surveiller comme le lait sur le feu. BFMTV.com fait le point à la veille de la bataille.

• Pennsylvanie: tout un symbole

La Pennsylvanie est sans doute le combat le plus médiatique. Terre natale de Joe Biden - qui continue à y multiplier les déplacements -, elle est intimement liée au mandat en cours. C'est peut-être la raison pour laquelle ces derniers jours, la Pennsylvanie a été le théâtre d'un défilé de présidents inédit.

Outre Joe Biden donc, on y a vu Barack Obama - notamment pour un discours remarqué à Philadelphie - mais aussi Donald Trump. Comme une nouvelle mouture du dernier duel présidentiel à l'issue duquel Joe Biden l'avait emporté d'une très courte tête - 50,01% des suffrages exprimés - sur le milliardaire.

Quant aux enjeux de l'élection elle-même, il faut ici découpler la course au poste de gouverneur de celle pour les fauteuils sénatoriaux. Dans le premier cas, la messe semble dite: Avec 51,8% des projections (selon le site FiveThirtyEight qui pondère les sondages les plus récents) contre 40,9% à son adversaire, le candidat démocrate Josh Shapiro semble tranquille face à son opposant républicain, Doug Mastriano.

Le second est bien plus spectaculaire. Presque tragique. Les démocrates tentent d'envoyer John Fetterman au Sénat. Or, l'homme vient d'être victime d'une attaque, qui l'a affaibli, et a affecté sa parole. Au point qu'il a fait peine à voir lors du débat qui l'a mis en présence de son contradicteur républicain, le très célèbre (pour ses fréquents passages télés) docteur Mehmet Oz.

Pour le moment, les problèmes de santé et les difficultés élocutoires de John Fetterman ne sont pas rédhibitoires aux yeux des électeurs: il est jaugé à 46,8% des cotes contre 46,4% pour le bord d'en face. Il y a un deux mois - comme le montrent les courbes de FiveThirtyEight -, il dominait cependant d'une dizaine de points Mehmet Oz.

• La Géorgie, dans tous les esprits

Depuis ce week-end, la Géorgie est dans tous les esprits. L'État se distingue en effet par une participation extrêmement forte lors du vote anticipé, organisé du 3 au 5 novembre. 2.504.956 électeurs ont déjà glissé leur bulletin d'après les chiffres officiels, un record pour des midterms, et pas loin du niveau de la dernière présidentielle (2,6 millions de suffrages anticipés) qui avait elle aussi couronné Joe Biden d'un cheveu, avec un pourcentage définitif de 49,47%.

En-dehors de cette affluence, la lutte pour la fonction de gouverneur se présente dans les mêmes termes qu'en Pennsylvanie, mais en inversant les couleurs. Cette fois le sortant "rouge" (couleur du Parti républicain) Brian Kemp et ses 51,6% surpassent les chances de la "bleue" démocrate Stacey Abrams, pataugeant autour à 44%. Sa campagne est de surcroît grevée par une guerre intestine dans sa propre famille politique, décrite ici par le New York Times.

Côté Sénat, le bras de fer est plus tendu. Il confronte le sortant démocrate, Raphael Warnock et Herschel Walker. Ce dernier est un ancien footballeur américain, qui n'en finit plus de défrayer la chronique. Comme L'Equipe l'a expliqué, il n'a cessé d'être pris en flagrant délit de mensonges, au sujet de sa carrière, de ses études comme de sa vie privée.

Ce grand détracteur de l'avortement est de surcroît accusé d'avoir payé deux jeunes femmes pour qu'elles interrompent leur grossesse. C'est d'ailleurs sous cet angle que Raphael warnock l'attaque, comme l'a remarqué ici le Washington Post. Lors d'un meeting mardi dernier, il a ainsi dépeint Herschel Walker comme un "menteur pathologique", moquant: "Et maintenant, il veut qu'on le croît d'une manière ou d'une autre apte à être sénateur des Etats-Unis". Mais l'opinion est moins impitoyable. Avec 46,6% des intentions contre 46,5% au sortant, c'est bien Herschel Walker qui avance pour l'heure vers la chambre haute.

• Ohio: l'avance de Vance

L'Ohio fait valoir sa singularité parmi cette bande des quatre. Cet État, qui concentre historiquement les regards des Américains les soirs d'élection, a penché en faveur de Donald Trump en 2020, lui accordant 53,27% des suffrages valides. Et cette faveur se lit aujourd'hui dans l'écart qui sépare le gouverneur sortant républicain, Mike DeWine, de sa rivale démocrate, Nan Whaley, maire de Dayton. Un écart ou un fossé: 56,3% contre 36%, toujours selon FiveThirtyEight.

Encore une fois, la campagne pour le Sénat est plus croquignolesque. Elle met aux prises le représentant Tim Ryan, pour les démocrates, et l'entrepreneur J.D. Vance. Ce dernier s'est bâti une notoriété immense aux États-Unis grâce à ses mémoires, Hillbilly Elegy, dont le public a fait un bestseller, et Netflix un film.

Par ailleurs, la conversion politique de J.D. Vance a retenu l'attention. Autrefois connu pour ses critiques acerbes de Donald Trump, celui qui s'est défini comme "un franc-tireur conservateur" selon ABC s'est mis à en entonner les louanges pour les besoins de la cause. Allant jusqu'à reprendre le refrain d'une présidentielle "volée" sur le plateau de Fox News. L'ironie de la situation n'a pas échappé au principal intéressé. Comme l'a relevé ici CNN, Donald Trump a ainsi lâché en plein meeting, mi-septembre: "J.D. fait le lèche-cul, tellement il a besoin de mon soutien".

Il faut croire que le procédé paie. D'après une étude conduite par l'Université d'Emerson, et citée par The Hill, J.D. Vance est pointé à 51% des intentions contre 49% pour Tim Ryan.

• Le clan Trump rêve de faire de l'Arizona sa base arrière

Certes, l'Arizona a consacré Joe Biden (à une majorité relative de 49,36% des voix enregistrées) en 2020, mais le clan Trump rêve d'en faire sa base arrière à l'occasion de ces midterms. Comme l'a noté la RTS suisse, le Parti républicain n'y a investi que des candidats "deniers"", c'est-à-dire persuadés - au moins en public - que leur champion n'a dû sa défaite qu'à une scandaleuse fraude électorale. L'argument n'a pas l'air de suffire pour arranger les bidons de son prétendant au Sénat toutefois: Blake Masters est donné perdant par 46,3% des projections contre 48,3% dévolus au démocrate Mark Kelly.

Mais peu importe, car c'est la personnalité tonitruante de la candidate républicaine au mandat de gouverneur qui capte la lumière. Kari Lake est une ancienne journaliste et présentatrice télé locale. Et si elle a soutenu Barack Obama durant son premier séjour à la Maison Blanche, elle a bien changé depuis. Elle enchaîne les déclarations outrancières - listées ici par La Croix - comme autant de gages de sa bonne foi à l'aile la plus droitière de sa famille politique d'accueil.

Tout d'abord, elle refuse de confirmer qu'elle respectera un éventuel résultat défavorable. "Je vais gagner l’élection, c’est le résultat que j’accepterai", a-t-elle ainsi affirmé, selon la traduction de La Croix. De plus, elle revendique le legs trumpiste jusque dans sa volonté d'achever le fameux mur anti-migrants en Arizona. Elle fait encore de l'IVG le "pêché suprême", et prête à Joe Biden "un agenda démoniaque".

Soucieuse de plaire à l'électorat conservateur, elle l'est moins de plaire sur la scène médiatique. Selon des propos rapportés ici par le New York Times, elle se veut "le pire cauchemar" de la presse, l'ex-journaliste fustigeant même des reporters qu'elle qualifie de "monstres". Très mobilisée contre le port du masque et la vaccination, elle a poussé le bouchon jusqu'à réclamer l'arrestation d'Anthony Fauci, le médecin emblématique de la campagne anti-Covid 19. Il faut croire que cette fibre pour le moins offensive séduit: elle mène de 48,9% des estimations à 46,4% dédiés à sa challenger démocrate Katie Hobbs d'après FiveThirtyEight.

Article original publié sur BFMTV.com