Que se passe-t-il si Donald Trump refuse de quitter la Maison Blanche?

Si la victoire du Démocrate Joe Biden a été proclamée samedi par les médias, Donald Trump ne manifeste, ce lundi, toujours aucune volonté à reconnaître sa défaite à la présidentielle. S'il refusait de quitter la Maison Blanche le 20 janvier prochain, il reviendrait aux services secrets de l'en expulser.

44 hommes ont précédé Donald Trump dans le Bureau ovale. Sur ces 44 présidents, 35 ont quitté les lieux sans esclandre, peu importe la raison de leur départ, huit sont morts durant leur mandat et un - Richard Nixon - a démissionné. Donald Trump menace de fonder une quatrième catégorie en niant le résultat du scrutin qui a sacré son rival Joe Biden et en refusant de quitter sa fonction.

Alors que les médias ont proclamé samedi la victoire du Démocrate, Donald Trump en est en effet toujours à estimer qu'il a gagné, et gagné "de beaucoup", et à multiplier les poursuites judiciaires pour rééxaminer les bulletins dans certains Etats-clés pendant que ses avocats ne cessent d'intervenir dans les médias. Face à cet acharnement, la question, en principe un brin surréaliste, peut donc venir à se poser sérieusement: que se passera-t-il si Donald Trump refuse de quitter la Maison Blanche le 20 janvier prochain, date de l'investiture de Joe Biden?

Les failles du système

Sur le site de The Independent, Joshua Sandman, professeur en sciences politiques à l'Université de New Haven cherche à rassurer: "En toute hypothèse, on n'a pas vraiment besoin de la Maison Blanche. C'est un symbole, ça n'a pas d'obligation à être le siège du pouvoir".

Certes. Mais on imagine mal l'ampleur de la confusion déclenchée si le président se "barricadait dans le Bureau ovale" comme l'a titré Vanity Fair. Or, la Constitution américaine ne prévoit pas expréssement pareil cas, ni dans son XIIe amendement, qui régente les modalités de l'élection du président et de son vice-président, ni dans son XXe amendement qui détaille les règles de l'intronisation.

Sur NBC News, Edward Foley, universitaire de la faculté de l'Ohio, a ainsi reconnu le 2 novembre, avant même la tenue du scrutin: "Il y a des failles dans le système malheureusement, et un esprit partisan exacerbé peut les mettre au grand jour, rendant le pays particulièrement vulnérable."

Escorté hors de la Maison Blanche?

Le calendrier ménage quand même quelques certitudes. Le 14 décembre, le collège électoral, c'est-à-dire les 538 grands électeurs, se réunira pour désigner le président et son vice-président. Le 6 janvier, le Congrès réuni en session extraordinaire décachetera ces suffrages, certifiant l'identité des deux appointés, et le 20 janvier ils prêteront serment, commençant alors à exercer leurs nouvelles fonctions. Pour Jennifer Rodgers, consultante judiciaire de CNN, les choses sont donc claires, comme elle l'a expliqué avant que la défaite de Donald Trump soit officielle:

"Mon pronostic est que si Donald Trump perd l’élection, et qu’il échoue dans toutes ses poursuites judiciaires, le nouveau président prêtera serment et contrôlera l’armée, les moyens de la justice et les différents niveaux de l’administration, et pourra lui ordonner de quitter la Maison Blanche".

Pourtant, dans un communiqué publié samedi, ce n'est pas vers l'armée qu'Andrew Bates, porte-parole de la campagne de Joe Biden, a jeté son regard: "Le gouvernement des Etats-Unis d'Amérique est parfaitement capable d'escorter tout intrus hors de la Maison Blanche".

Le 10 juin dernier déjà, Joe Biden avait lui-même évoqué un possible blocage lors d'un entretien accordé au présentateur Trevor Noah: "Je suis absolument convaincu qu’ils l’escorteront hors de la Maison Blanche avec beaucoup de diligence".

A la charge du Secret service

Et ce "ils" ne pourrait en aucun cas renvoyer aux militaires selon ce qu'ont dit un ancien officiel ayant participé à la transition entre Barack Obama et Donald Trump et un expert auprès de Newsweek. Usant d'une image similaire à celle du porte-parole de la campagne de Joe Biden, l'ancien officiel a ainsi expliqué:

"Le Secret service escorterait Donald Trump hors de la Maison Blanche, il le traiterait comme on s'occuperait de n'importe quel vieillard errant dans une propriété qui ne lui appartient pas".

Malcolm Nance, spécialiste des services secrets et du contre-terrorisme a prolongé auprès de Newsweek: "S'il dit qu'il ne quittera pas la Maison Blanche, ils l'évacueront physiquement. Ils pourront même lui mettre la main dessus. Et ils pourraient lui dire que s'il ne prend pas le vol prévu, il devra payer de sa poche pour s'embarquer sur un autre".

En d'autres termes, il apparaît que c'est aux services secrets, chargés depuis quatre ans de protéger le 45e président des Etats-Unis, que reviendrait la tâche de l'expulser le cas échéant. Pour ce qui est de l'Inauguration Day, c'est-à-dire la cérémonie d'investiture de son successeur, pas de dilemme: Donald Trump pourra s'il le souhaite faire la mauvaise tête et ne pas y assister, la présence de l'ex-président n'étant pas obligatoirement requise.

La parade Nancy Pelosi

Reste une dernière dimension. C'est au 6 janvier donc que le Congrès devra certifier l'élection de Joe Biden et Kamala Harris. A cette date, le Sénat sera d'ailleurs toujours présidé par Mike Pence, le vice-président de Donald Trump.

Or, admettons que pour des raisons X ou Y, comme une indécision du collège électoral par exemple, les législateurs soient incapables de valider ces deux nouveaux noms. Les deux institutions américaines auraient ici la parade, comme l'a noté NBC News. Nancy Pelosi deviendrait présidente des Etats-Unis par intérim, sous conditions d'avoir conservé son poste de présidente de la Chambre des Représentants. Même dans le turbulent et imprévisible contexte actuel, cette éventualité demeure cependant hautement improbable.

Article original publié sur BFMTV.com

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