Où en est le chantier de Notre-Dame, 3 ans après l'incendie ?

Ce vendredi 15 avril, le président de la République Emmanuel Macron visitera les lieux du sinistre, où la phase de restauration de la cathédrale a débuté.

PATRIMOINE - “Nous rebâtirons Notre-Dame plus belle encore. Je veux que ce soit achevé d’ici cinq années.” Au lendemain de l’incendie de la plus célèbre des cathédrales parisiennes, le 16 avril 2019, voici ce que déclarait Emmanuel Macron. Trois ans plus tard, ce vendredi 15, en plein entre-deux-tours, le président de la République doit se rendre sur le chantier de restauration et observer l’avancée des travaux.

Car s’il a depuis été admis que les délais ne seraient pas tenus, l’objectif est tout de même de “rendre au culte et au public” l’édifice le 16 avril 2024. En clair, de permettre la tenue d’un office religieux à l’occasion de la date anniversaire des cinq ans avancée par le président.

Or comme pourra le constater Emmanuel Macron -qui se déplace ce vendredi en tant que chef de l’État et non comme candidat à l’élection présidentielle-, notamment en échangeant avec des artisans travaillant sur la cathédrale, celle-ci commence à retrouver son allure d’antan. Le fruit d’un travail débuté dans les mois ayant suivi l’incendie, de la mise en sûreté des œuvres au déblaiement des débris en passant par sécurisation du lieu et l’installation d’un “parapluie” (un dispositif coulissant protégeant l’édifice de pluie).

Entre le printemps et l'été 2021, ces demi-cintres de bois ont été installés sous les voûtes les plus fragilisées par l'incendie d'avril 2019. (Photo: Ariane Mercier de Beaurouvre / Etablissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris)
Entre le printemps et l'été 2021, ces demi-cintres de bois ont été installés sous les voûtes les plus fragilisées par l'incendie d'avril 2019. (Photo: Ariane Mercier de Beaurouvre / Etablissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris)

Entre le printemps et l'été 2021, ces demi-cintres de bois ont été installés sous les voûtes les plus fragilisées par l'incendie d'avril 2019. (Photo: Ariane Mercier de Beaurouvre / Etablissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris)

Après cette première étape, les travaux sont entrés depuis l’été 2021 dans une nouvelle phase, celle de la restauration à proprement parler. À l’intérieur de l’édifice, le dépoussiérage des murs, des sols et des voûtes est par exemple censé se terminer prochainement. Au moment de l’incendie, des poussières de plomb s’étaient effectivement répandues partout dans le bâtiment, et il a fallu aspirer jusqu’aux recoins des voûtes et décontaminer les sols.

Dessalage et nouvelle flèche

Et ce n’était que le début. Car entre les quantités d’eau projetées par les pompiers pour éteindre les flammes et les eaux de pluie tombées sur Paris avant la mise en place du “parapluie”, un nouveau danger s’est présenté: la cristallisation du sel contenu dans les pierres. Par une réaction chimique, celui-ci, présent naturellement dans la roche, est en effet remonté à la surface des pierres, risquant d’augmenter en volume jusqu’à potentiellement faire éclater certaines pierres. Ce qui a contraint les services de restauration à dessaler l’ensemble de l’ouvrage, une opération qui continue encore actuellement.

Alors que des chantiers “test” ont d’ores et déjà eu lieu sur le buffet du grand orgue et dans plusieurs chapelles, permettant entre autres la restauration de fresques et de peintures murales, des travaux plus larges doivent désormais débuter dans l’ensemble de l’intérieur de l’édifice. Des tailleurs de pierre, des ferronniers d’art, des maîtres-verriers et des restaurateurs de sculptures et de peintures rejoindront ainsi le chantier d’ici quelques semaines, sur la base du protocole éprouvé dans les premières chapelles.

Entre l'automne 2020 et le printemps suivant, plusieurs chapelles ont servi de
Entre l'automne 2020 et le printemps suivant, plusieurs chapelles ont servi de

Entre l'automne 2020 et le printemps suivant, plusieurs chapelles ont servi de "test" à la restauration. On voit ici une restauratrice à l'œuvre sur des peintures murales. (Photo: David Bordes / Etablissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris)

Dans la foulée, il est aussi prévu -après appel d’offre et sélection des entreprises retenues- que les préparatifs en vue du retour de la flèche de Notre-Dame conçue par Viollet-le-Duc démarrent. Ainsi, une chape de ciment doit être coulée avant l’été au sol de la croisée du transept. Elle servira à l’installation d’un échafaudage de 600 tonnes et s’élevant à une centaine de mètres du sol qui permettra ensuite l’érection de la nouvelle flèche, au sommet de laquelle un coq sera posé à une hauteur de 96 mètres.

Selon les prévisions de l’établissement public en charge de la restauration de la cathédrale, cette nouvelle flèche devrait commencer à poindre dans le ciel parisien à partir du printemps 2023. Rappelons au passage qu’il a été décidé par Emmanuel Macron, en accord avec les instances compétentes, de reconstruire Notre-Dame à l’identique.

Des artisans mis à contribution partout en France

Mais à l’heure actuelle, il n’y a pas que dans la cathédrale que des travaux sont menés. En parallèle, des artisans sont aussi mis à contribution partout en France. On peut à cet égard citer les très nombreux chênes qui ont été sélectionnés et récoltés au printemps 2021, et qui doivent servir à édifier la fameuse flèche ainsi que différents éléments d’architecture pour les voûtes.

À la fin de l'été 2020, le grand orgue a été déposé et nettoyé en attendant d'être totalement restauré. Ici une vue de la rose occidentale depuis l'échafaudage. (Photo: David Bordes / Etablissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris)
À la fin de l'été 2020, le grand orgue a été déposé et nettoyé en attendant d'être totalement restauré. Ici une vue de la rose occidentale depuis l'échafaudage. (Photo: David Bordes / Etablissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris)

À la fin de l'été 2020, le grand orgue a été déposé et nettoyé en attendant d'être totalement restauré. Ici une vue de la rose occidentale depuis l'échafaudage. (Photo: David Bordes / Etablissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris)

Certains arbres choisis sont particulièrement massifs: huit d’entre eux font plus d’un mètre de diamètre et sont longs d’au moins 20 mètres, caractéristiques qui les destinent à former le “tabouret” de la flèche imaginée par Viollet-le-Duc. Déjà répartis dans des scieries partout en France et après avoir été assemblés d’ici la fin 2022, il est prévu qu’ils soient installés à Notre-Dame dans le courant de l’année prochaine.

Dans la même veine, des pierres qui serviront à la reconstruction des arcs de voûtes qui s’étaient effondrés dans la catastrophe d’avril 2019 ont commencé à être extraites dans des carrières de l’Oise. Des géologues et sédimentologues ont notamment été sollicités pour trouver des pierres aux caractéristiques aussi proches que possible de celle du sous-sol de Paris qui ont servi à la construction de la cathédrale entre le XIIe et le XIVe siècle.

844 millions de dons

Et pour ce qui est du mobilier intérieur de la cathédrale, des travaux d’ampleur ont également cours. Les 8000 tuyaux et différentes pièces en bois de l’orgue ont par exemple été répartis dans trois ateliers (dans l’Hérault, en Corrèze et dans le Vaucluse) pour y être restaurés. Une opération extrêmement précise et parfois fastidieuse qui doit aboutir au remontage de l’instrument dans le courant de l’année 2023, avant une étape-clé: l’harmonisation et l’accord de l’orgue. Cette phase, prévue au plus tôt en 2024, devra se dérouler intégralement de nuit puisqu’elle requiert le silence le plus complet.

Alors qu'Emmanuel Macron avait promis une restauration terminée en cinq ans, il est d'ores et déjà prévu du retard. Mais un office religieux doit tout de même pouvoir avoir lieu cinq ans après l'incendie. (Photo: Pascal Tournaire / Jarnias)
Alors qu'Emmanuel Macron avait promis une restauration terminée en cinq ans, il est d'ores et déjà prévu du retard. Mais un office religieux doit tout de même pouvoir avoir lieu cinq ans après l'incendie. (Photo: Pascal Tournaire / Jarnias)

Alors qu'Emmanuel Macron avait promis une restauration terminée en cinq ans, il est d'ores et déjà prévu du retard. Mais un office religieux doit tout de même pouvoir avoir lieu cinq ans après l'incendie. (Photo: Pascal Tournaire / Jarnias)

De même, en vue de la réouverture, différents tableaux qui décoraient l’intérieur de la cathédrale au moment de l’incendie ont aussi été envoyés à un artisan dans l’Essonne pour y retrouver leur lustre. On y trouve des œuvres datant des XVIIe et XVIIIe siècles signées de maîtres tels que Charles Le Brun, qui fut l’un des artistes phares du règne de Louis XIV.

Au total, dans son point de situation publié à la veille de l’anniversaire de l’incendie, l’établissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris précise finalement où en sont les très nombreux dons promis dans la foulée de l’incendie. Il évoque que 340.000 donateurs issus de 150 pays ont d’ores et déjà versé 844 millions d’euros, et que 98% des promesses ont été honorées ou ont donné lieu à des engagements juridiques signifiant qu’elles le seront.

Une levée de fonds colossale qualifiée “d’élan de générosité sans précédent dans l’Histoire de la philanthropie française” qui doit donc servir à redonner toute sa splendeur à l’un des monuments les plus connus à travers le monde.

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Cet article a été initialement publié sur Le HuffPost et a été actualisé.

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